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Berlioz à Paris

La Salle Ventadour, 1829-1879

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    La période active de la Salle Ventadour comme lieu de représentations artistiques s’étend sur un demi-siècle, de 1829 à 1879: période assez mouvementée pendant laquelle elle héberge une succession de compagnies théâtrales. La construction de la Salle Ventadour, commencée en 1826 et terminée en 1829, avait pour objectif au départ de fournir un domicile permanent à l’Opéra-Comique (à la place de la Salle Feydeau). L’Opéra-Comique y donne sa première représentation le 20 avril 1829, mais il apparaît bien vite que la Salle Ventadour ne répond que mal à ses besoins: salle assez luxueuse, située dans un quartier assez cossu mais un peu à l’écart dans le 2ème arrondissement de Paris, elle semble plutôt rebutante aux classes moyennes qui constituent le public ordinaire de l’Opéra-Comique. Au bout de trois ans l’Opéra-Comique déménage de la Salle Ventadour pour s’installer au Théâtre des Nouveautés, où il se produit pour la première fois le 22 septembre 1832 (il ira s’établir pour finir à la Salle Favart en 1840). Après un intervalle d’inactivité la Salle Ventadour accueille une nouvelle compagnie plutôt insolite, le Théâtre Nautique, mais qui ne durera que peu de temps (de 1834 à 1835; voir ci-dessous). Nouvel interlude, puis la salle héberge pendant une courte saison le Théâtre-Italien (du 30 janvier au 31 mars 1838), obligé de délaisser la Salle Favart détruite par un incendie. Mais le Théâtre-Italien fait bien vite place à une nouvelle compagnie, le Théâtre de la Renaissance, fondé par son directeur Anténor Joly. Le champ d’action de ce nouveau théâtre était fort circonscrit: il lui est interdit en effet de faire concurrence soit à l’Opéra soit à l’Opéra-Comique. En butte dès le départ à l’hostilité de ces deux théâtres, le Théâtre de la Renaissance se voit bientôt acculé à la banqueroute. Ayant débuté le 8 novembre 1838 avec Ruy Blas de Victor Hugo il est obligé de fermer ses portes dès le 23 avril 1840 après une courte existence. Sa place sera prise de nouveau par le Théâtre-Italien, et cette fois définitivement: la Salle Ventadour devient maintenant le domicile permanent des opéras italiens à Paris de 1841 jusqu’à 1879. Dans cette période la Salle Ventadour est souvent nommée simplement le ‘Théatre-Italien’ plutôt que la Salle (ou le Théâtre) Ventadour. Les deux désignations sont en fait pratiquement interchangeables (voir par exemple Berlioz dans le Journal des Débats, 2 décembre 1850 et 9 février 1860), même quand la salle est utilisée, comme elle l’est souvent, non pour des opéras italiens mais pour des pièces de théâtre ou des concerts. Au fil des ans la popularité et la rentabilité du Théâtre-Italien à Paris déclinent, et pour finir il disparaît: en 1879 la Salle Ventadour est acquise par une société financière, la Banque d’Escompte de Paris, qui s’y établit. En 1892 la Banque de France prend charge du bâtiment, qui à l’heure actuelle lui appartient toujours. C’est peu après la fermeture de la Salle Ventadour comme lieu de spectacles qu’Octave Fouque publie son Histoire du Théâtre-Ventadour 1829-1879. Opéra-Comique — Théâtre de la Renaissance — Théâtre-Italien (Paris, G. Fischbacher, 1881), d’où nous avons tiré le résumé historique présenté ci-dessus. L’intention de Fouque était de commémorer l’histoire artistique du bâtiment au cours du demi-siècle précédent avant que sa mémoire n’en disparaisse à jamais.

    Berlioz a souvent l’occasion d’assister à des représentations à la Salle Ventadour, mais ses feuilletons n’en donnent qu’un écho partiel: la période de la Salle Ventadour comme domicile de l’Opéra-Comique (1829-1832) précède le début de l’activité régulière de Berlioz critique musical (à partir de 1833), et le Théâtre-Italien était en dehors de son champ d’action comme feuilletoniste au Journal des Débats: aux Débats l’opéra italien était depuis longtemps le domaine d’Émile Delécluze (1781-1863; cf. CG no. 1397 et les Débats, 17 janvier 1851 et 3 avril 1858). Mais Berlioz eut l’occasion de mentionner après coup le curieux épisode du Théâtre Nautique (Débats 30 septembre 1851), et il rend compte aussi, et en termes bien plus élogieux, des activités du Théâtre de la Renaissance et de son entreprenant directeur Anténor Joly (voir notamment Débats 9 août, 13 octobre et 31 décembre 1839).

    Pour ce qui est de la musique de Berlioz, la Salle Ventadour n’est pas liée à son nom d’aussi près que le Conservatoire ou la Salle Herz, même si la Salle Ventadour avait une capacité supérieure à ces deux dernières: elle était une fois et demi plus large que la salle du Conservatoire et pouvait donc accueillir environ 1,500 personnes (Fouque op. cit. p. 98). En 1834 Berlioz projetait de donner un grand concert à la Salle Ventadour l’année suivante en collaboration avec Narcisse Girard, qui y dirigeait le Théâtre Nautique et avec lequel il était alors en bons termes; mais le projet tourna court du fait de la faillite du Théâtre Nautique (CG nos. 392 avec la n. 1, 415, 424, 427bis et 428bis [tome VIII], 435).

   En l’occurrence Berlioz ne donnera à la Salle Ventadour qu’un seul grand concert comportant de ses ouvrages, le 4 mai 1844, mais concert qui a grand succès: il est donné avec la concours de Liszt, qui joue plusieurs de ses compositions pour piano, le Konzertstück de Weber pour piano et orchestre, ainsi que sa transcription du Bal de la Symphonie fantastique, immédiatement après une exécution de ce même mouvement par l’orchestre du Conservatoire dirigé par Berlioz. La cantatrice allemande Anna Zerr chante aussi quelques mélodies italiennes et allemandes. Berlioz dirige en outre une intégrale de Harold en Italie (avec Urhan dans la partie d’alto solo), ainsi que l’ouverture des Francs-Juges et celle alors toute neuve du Carnaval romain. Berlioz pousse la malice jusqu’à rendre compte lui-même du concert (Revue et Gazette Musicale 12 mai 1844, reproduit dans CM V pp. 479-82), et s’en déclare très satisfait (CG nos. 899 et 902; voir aussi la lettre du 16 mai de son oncle Félix Marmion qui avait assisté au concert). On sait beaucoup moins de l’autre concert donné par Berlioz à la Salle Ventadour, le 9 mai 1846, peu après son retour de son second voyage en Allemagne: il y dirige un concert orientalisant en l’honneur d’Ibrahim Pacha, gouverneur de Syrie et prince héritier du trône d’Égypte, qui comprend son instrumentation de la Marche marocaine de Léopold de Meyer, Le Désert de Félicien David, et quelques autres morceaux. Deux autres concerts à la Salle Ventadour, le 25 et 31 janvier 1860, retiendront particulièrement l’attention de Berlioz critique musical: il s’agit cette fois de nul autre Wagner qui veut faire entendre sa musique à Paris. Le compte-rendu que Berlioz publiera dans le Journal des Débats (9 février 1860, repris plus tard dans À Travers chants) lui cause bien des soucis.

    La Salle Ventadour sert aussi de théâtre. En novembre et décembre 1844 Berlioz assiste à des représentations de Shakespeare dans l’original par une troupe anglaise menée par Macready: il est enthousiasmé (Journal des Débats 29 décembre 1844; cf. CG no. 926). Quelques années plus tard Shakespeare l’attire de nouveau à la Salle Ventadour, mais cette fois en traduction italienne (Othello en septembre 1857, cf. CG nos. 2248-9 et le Journal des Débats 24 septembre 1857 [P.S. à la fin]; Hamlet et Othello en mai 1866, cf. CG nos. 3136, 3141).

Illustrations

    La photo moderne reproduite sur cette page a été prise par Michel Austin; les autres images ont été reproduites d’après des livres et journaux dans notre collection. ©  Monir Tayeb et Michel Austin. Tous droits de reproduction réservés.

La Salle Ventadour vers 1830
Salle Ventadour

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La gravure ci-dessus est tirée du livre d’A. Pugin, Paris and its Environs, publié à Londres en 1831, de notre collection.

L’intérieur de la Salle Ventadour en 1843
Salle Ventadour

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    Cette gravure par C. Mottram d’après E. Lami est imprimée dans le livre de Jules Janin, Un hiver à Paris, publié en 1843. Journaliste et critique littéraire réputé, Janin fut de 1829 à 1873 l’un des piliers du très influent Journal des Débats. Ami et collaborateur de Berlioz, il écrivit pour lui le texte de sa cantate le Chant des chemins de fer qui fut exécutée à Lille le 14 juin 1846.

L’intérieur de la Salle Ventadour en 1851
Salle Ventadour

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La gravure ci-dessus fut publiée dans The Illustrated London News le 8 février 1851.

La Salle Ventadour en 2000
Salle Ventadour

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© Michel Austin et Monir Tayeb pour toutes les images et informations sur cette page. Cette page créée le 20 octobre 2000; nouvelle version augmentée le 1er septembre 2016.

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