(Transcriptions littérales, dans l’ordre de l’inventaire)
I.
Transcriptions littérales, lettres R96.260.02, R96.856.1 à 3, 2011.02.116 à 153
III. Transcriptions
littérales, lettres 2011.02.197 à 265, 2011.02.298
Le texte corrigé des lettres d’Adèle Suat
se trouve sur des pages séparées:
I. 1828-1841
II. 1842-1847
III. 1848-1858. Lettres
de date incertaine
Texte
= mots ou lettres de lecture incertaine
*** = mots ou lettres non déchiffrés
[...] = lacune dans le texte
2011.02.154 | Jeudi 28 janvier 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages avec l’adresse à la dernière. Timbres postaux: SAINT- CHAMOND, 28 JANV. (1841); LYON, 28 (JANV. 1841); GRENOBLE, 30 JANV. 1841.
St Chamond Jeudi 28 janvier
Je te porte malheur
Chere Sœur chaque fois que je te felicite de garder notre bon pere je choisis
toujours le moment ou il part pour cela, j’ai reçu une lettre de lui depuis
son retour à la Côte assez satisfaisante, il me parle avec joie de la visite
que je lui promets pour le Carème, je te remercie beaucoup de celle que tu m’annonces
aux feries de Paques, je serai
bien heureuse chere sœur de ta visite chez moi, il y a si long-temps que j’espere
envain ta visite, je regrette seulement qu’a cette époque differentes
personnes de ma connaissance intime seront absentes, les dames Ardaillons surtout
avec qui j’aurais été bien aise de te faire faire connaissance J’aime tant ces dames, leur maison est si agréable pour
moi que leur sejour à Paris est un vrai chagrin pour moi,
elles sont partie cette semaine.
Enfin ma Chere je ferai mon possible pour que tu ne t’ennuies
pas trop avec nous je t’avoue que cela me préoccupe d’avance je ne puis
oublier ce que Camille m’avait dîs [p. 2] de la facheuse
impréssion que tu avais remporté de St Chamond la prémiere fois, il est vrai
que tout est bien changé autour de moi et que materiellement tu seras mieux, si
tu amenais Mathilde ce que je n’ose esperer je serais bien plus tranquille.
quand à mon voyage à St Vincent il se fera bien
aussi j’espere à la fin de l’été avant mon second sejour à la Cote mais
finette
sera plus grande elle marchera seule, et sera plus raisonnable, de cette maniere
nous ne resterons pas trop long-temps sans nous voir cette année.
Mon mari doit partir demain pour Beaurepaire il verra mon
pere un instant j’espère ce voyage d’affaire m’ennuis beaucoup Sophie m’ecrit
pour m’engager instamment a aller avec ma petite charmer mon veuvage avec le
sien, Mr Munet est absent pour quelque temps, mon mari me prendrait
à Lyon en revenant, tout cela est bien tentant, mais je deviens extremement
paresseuse pour sortir de chez moi je m’y trouve si bien sous tous les
rapports que je ne desire jamais en sortir puis mes indecisions sans fin !…
Il faut cependant que j’aille faire faire
ma fameuse robe de velours [p. 3] je suis invité a une brillante
soirée à St Etienne et mon mari tient beaucoup a ce que rien ne
manque à ma toilette, c’est donc une occasion de faire voir le jour
à la belle robe ; puis je viens de faire faire un corset a la fameuse
Mademoiselle Jocourt qui me fait
une taille de poupée tu vois Ma Chere que je ne veus pas trop être arrierée ;
quand on vieilli, il faut se soigner
J’ai reçu ces jours derniers une lettre de mon Oncle il
parait assez ennuiée de son long séjour a Huningues,
je le comprends il a le projet d’aller à Paris au p[......]
Sa belle robe de foulard a du ren[...] Mathilde bien heureuse, le corset
de velour bien plus encore je la vois charmante avec le joli costume que tu me
dépeins, son pere doit être heureux et fier de ses succès je ne serais pas
étonnée que ce ne fut pour sa fille qu’il ait desiré recevoir toute les
semaines.
J’ai eu Lundi un petit dîner de six dames tres gaie ;
nos mari avait un banquet au cercle ; et j’ai eu l’idee de nous réunir
à cette occasion, je crois Ma Chere que tu aurais appreciée mon excellent
dîner, j’avais voulu traiter ces dames dignement, nous avons attendu ces
Messieurs jusqu’a deux heures du matin
[p. 4] Finette va bien, elle veut
absolument marcher c’est un petit démon ; ces dents la font souffrir
depuis quelques jours. si je vais à Lyon j’irai sans elle positivement.
adieu Chere Sœur ta soiree d’aujourd’hui sera sans doute
brillante amuse toi bien
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
[au bas de la page sous l’adresse]
apprecie comme ils meritent les
compliments que tu reçois c’est une finale peut être Je ne sais si j’aurai
aussi plus tard mon été mon été de la St Martin comme qu’il
en soit peu m’importe !
je vous embrasse tous
ton affectionnée sœur
Adele Suat
2011.02.155 | Vendredi 12 février 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les deux premières écrites, adresse à la quatrième. Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 12 FEVR. 1841; LYON, 14 FEVR. 1841; GRENOBLE, 15 FEVR. 1841.
St Chamond Vendredi
Il parait que tu vas
suivre mon mauvais éxemple Chere Sœur car si je compte bien il y a aujourd’hui
seize jours que je n’ai pas de vos nouvelles, et je t’ai écris deux fois
dans cette intervalle, j’ignore si mon pere est aupres de toi, ton silence m’inquiéte
à cause de lui, peut être y-t-il une lettre perdue ? les plaisirs
nombreux seraient-ils seulement la cause de ce retard j’aime à me le
persuader, mais chaque année à cette époque je deviens plus craintive ;
rassure moi donc vite ma bonne sœur, jusque la je ne saurais que te dire ;
je craindrais trop les hors de propos : on nous annonce une nouvelle
inondation la Saône grossit épouvantablement, Dieu veuille nous préserver les
pauvres Lyonnais doivent étre éffrayés on ne redoutait encore rien la semaine
derniere pendant mon séjour à Lyon il parait que les pluies que nous avons
depuis sans interruption en sont cause.
Nous allons tous bien ; finette [p. 2] met
des dents à force qui la rend
bien penible les nuits, elle commence a faire de temps en temps quelques pas
seules mais je n’espère pas qu’elle marchera parfaitement avant un mois ou
deux.
Sa préference pour son pere est tous les jours plus marquée ;
je suis loin d’en être fachée ; mon bon Marc en est si heureux, puis
entre nous tout est de moitié.
Adieu ma Chere Amie j’ai une dame à diner, et il faut que
j’aille faire un tour de cuisine,
Je n’avais voulu t’écrire qu’apres l’arriveé du
dernier courier, et il est tard mille tendres caresses à notre pere qu’il
voudra bien partager avec vous tous grands et petits
Ton affectionnée sœur
A S
[p. 4] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
2011.02.156 | Lundi 7 ou mardi 8 mars 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages avec l’adresse à la dernière. Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 8 MARS 1841; GRENOBLE, 10 MARS 1841.
St Chamond 8 mars Lundi
Chere Sœur
Voila plusieurs jours que je fais envain le projet de t’écrires,
et je suis toujours dérangée au moment ou je me dispose à prendre ma
plume ; mais décidement je le veux et me voila lancée…
Je te remercie bonne sœur de m’avoir bien vite instruit de
la définitive résolution de mon pere ; j’espere de cette maniere que
mes tribulations de domestiques seront enfin terminées à l’époque ou
j’irai à la Côte ; mais je ne puis former encore de plan à ce sujet,
peut être à l’heure qu’il est mon pere pense déja à retourner chez lui [mot
biffé], le beau soleil va le tenter !
Je comprends chere sœur quelle difficulté il y a pour toi
à avoir constamment des distractions à lui offrir, il me serait bien doux de
partager avec toi, mes ressources, ne pourrons jamais lutter avec les tiennes
malheureusement mon pere ne viendra jamais chercher chez moi quelques jours de
douces jouissances de famille ; je pense souvent à cela avec tristesse ;
mon mari [p. 2] serions si empressés, si heureux de le
recevoir ce pauvre père ; mais il ne faut pas esperer je le crains qu’il
puisse se décider à faire un si long voyage ; la route de Grenoble est La
seule maintenant qui lui soit familiére ; c’est deja un beau triomphe
d’obtenir, et nous devons tous nous en féliciter ; à propos de
félicitions Marc a vu hier dans le Moniteur la nomination de ton beau frere ;
J’ai appris cette bonne nouvelle avec grand plaisir la société de ta belle
sœur te seras bien agréable, Madame Pochin doit être ravie comme vous tous et
plus encore.
J’ai ecris hier quelques lignes à Mme
Félicia
à cette occasion et pour lui rappeler qu’elle nous avait promis une visite,
j’espère que comme elle sait tous accommoder déménagement et autre chôses
elle sera assez aimable pour venir ici avant son depart et profiter aumoins une
fois du voisinage. ce n’est vraiment qu’une promenade de Vienne ici
maintenant que les jours sont longs.
Nous avons eu hier un brillant concert, notre société
philharmonique est d’un zèle admirable et fais merveille [p. 3]
la salle est neuve et bien décoreé, ces Messieurs ont deux tres bons maitres de
musiques, des repétitions fréquentes, aussi ils jouent de maniere à faire
plaisir et avec beaucoup d’ensemble ; ils sont tres nombreux ; ils
avaient fait venir de Lyon Mr Beaumann
celebre violon qui a un talent admirable je ne me figurais pas qu’un violon
pu
faire autant de plaisir, puis une excellente chanteuse et un chanteur distingué
en resumé la soirée a été cha[......] il y avait foule d’etrangers,
[...]
Richard avait Mr et Mme Bergeron et [deux
mots biffés] un grand diner en leur honneur avant le concert, puis
nous avons egalement terminés jusqu’a minuit chez elle ; j’ai beaucoup causé de Grenoble avec
ma charmante anglaise elle était consternée en apprenant la catastrophe de Henry
Simon !..
Mlle Michal, Mlle Lesage est beaucoup
d’autres ont été le sujet de notre conversation. point de nouvelles
d’Hector comme toi je compte sur mon Oncle pour savoir ce qu’ils deviennent
tous. [p. 4] Louise ne me répond point non plus, Mlle
Méline à qui j’avais écrit par les Dames Ardaillon il y a six semaines, pas
un mot ! non plus. mais en revanche j’ai recu une lettre charmante de cette dernière ce matin,
on ne peut plus affectueuse
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
[au bas de la page sous l’adresse]
Finette va bien, mais elle ne se lance pas à marcher seule moins même qu’il y a quelques jours. Adieu Chere Sœur mille caresses à mon pere et à Mathilde de ma part, et a toi et à ton mari une bonne embrassade toute fraternelle
Adele Suat
2011.02.157 | Vendredi 19 mars 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée écrite des deux côtés, la dernière écrite à l’envers avec l’adresse au milieu de la page). Lettre écrite à la hâte, écriture assez négligée. Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 19 MARS (1841); LYON, 19 MARS (1841); GRENOBLE, 20 MARS 1841.
St Chamond Vendredi 19 Mars
J’ai reçu hier soir
Ma Chere Sœur ta seconde lettre ; et celle qu’elle contenait m’a aussi
profondément affecté que toi, comme tu le dis tres bien Ma Chere il ne nous
est plus possible de nous associer a tout les rèves de fortune et de gloire de
notre pauvre frère ; une longue experience à ce sujet nous fait voir sa
position sous son veritable et triste jour, l’avenir de sa femme et de son
enfant est éffrayant avec une semblable maniere de faire, mais toutes ces
reflexions ne sont pas d’hier et ne changerons rien malheureusement.
quand aux six mille francs qu’il demande à mon pere, mon
mari lui aurait
écrit de suite pour lui
offrir à ce dernier de les lui avancer mais en y
réflechissant il a pensé qu’il vallait mieux que ce fut toi qui fit cette
offre de notre part à mon pere, mon mari ignorant ses affaires ne voudrait pas
paraitre empressé de s’y métier
sans qu’il le désirat, mais au premier mot a ce sujet il s’empressera de
retirer cette somme et de la mettre à la disposition de [dans la marge de
gauche, de haut en bas] mon mari attendra ta réponse avant de
demander son argent [p. 2] mon pere ; il pense d’ici à un
mois il faut ce temps pour le retirer ; maintenant il nous semble qu’il
serait peut être plus sage sous le pretexte de manque de fonds de mon père,
et dans le but de forcer Hector à manger plus lentement son petit
capital de ne lui envoyer que 3 ou 4000 tt
a la fois du reste Ma Chere cela est
indifferent à mon mari tu le comprends, et dans l’interet seul d’Hector
nous lui aurions écris à ce sujet, mais comme il ne s’est point adressé à
nous, tu voudras bien Ma Chere arranger cela comme tu plairas de même que pour
apprendre cela à [..]n pere en temps opportun ; je ne lui en écrirai rien
avant que tu m’ai répondu à ce sujet.
que tu as fait.
Maintenant ma bonne sœur pour me distraire de toutes ses pénibles
pensées parlons un peu du plaisir que nous aurons bientôt de nous embrasser,
je te remercie mille fois de ta visite promise, j’y pense sans cesse, je
fais mille projets pour te dorloter de mon mieux pour que tu te trouve bien chez
moi afin de t’engager à y venir souvent.
[p. 3] le plan de campagne que tu me propôses me
convient à merveille. et j’espere que rien ne m’empecheras de repartir
avec toi pour la Côte, mais je t’avertis que si tu ne m’amènes pas ma
titi
je ne m’engage à rien pas même a te recevoir de bonne grace ; j’ai deja
organisé une réunion de petites filles en son honneur, ou elle m’en ferait
beaucoup. comme tu ne me dis rien à ce sujet j’ai grand peur que tu médites
quelques coup de mere barbare que je ne te pardonnerais de ma vie je t’en
previens, à Mathilde à veiller a ses interets et aux miens parconséquent !
Finette ne marche toujours point dans ce moment cela me
serait cependant bien commode avec mes embarras, si je voulais te faire les
détails de mes tribulations de cuisiniere je te ferais peut être pitié ce
serait une histoire à la Bardousse
voila dix jours que ma méchante femelle est partie ;
Dimanche j’en avais installeè une autre à grand peine je m’abonnais
à la former faute de mieux. Lundi je l’envoyai à la riviere [p. 4]
sottement, là ma vielle bavarde avait tellement fait de rapports absurdes
qu’en rentrant cette fille me déclarat qu’elle voulait s’en aller qu’on
lui avait dit que j’etais terrible, que je ne gardais point de
domestiques, qu’on mourait de faim chez moi etc etc et mille autres bêtises
auxquelles je ne ferais point attention si cela n’avait une consequence fort
ennuieuse.
Mon mari impatienté de cela priat cette fille de faire son
paquet et de décamper de suite, elle nous fit une scène ; J’etais
tremblante comme une imbecille, et maintenant me voila ; je ne puis
te dire combien ces tracasseries sont pénibles, je me donne une peine affreuse
finette fait expres de ne vouloir pas rester une minute assise, j’ai pris une
ouvriere pour la tenir, mais elle a pris hors de propos un amour de Mere
désolant. je voulais prendre une femme de menage, impossible de la voir de
plusieurs jours.
Marguerite se multiplie de bonne grace [p. 5] c’est
bien quelque chôse, mais cette fille est souffrante, et je voudrais
pouvoir la faire reposer, mais comment faire, mon prochain voyage à la
Côte augmente mon impatience de voir ma maison désorganisée à ce point.
comment laisser mon mari seul si je n’ai pas enfin installée quelqu’un sur
qui je puisse compter pour le servir convenablement Enfin je ne veus pas trop me
tourmenter avec de la patience tout s’arrangera j’espère
J’ai reçu hîer une lettre de Mme Félicie qui
me promet une visite dans 15 jours J’en serais bien enchantée, je trouverais
bien moyen de leur faire faire [..] bon dîner en depit de tout.
Louise m’écrit hîer également, pour elle la vie se passe ; sans fatigue et
sans inquiétude aucune, les plaisirs et la parure voila son
affaire ; elle me donne une commission enorme de rubans ; je ne
sais quand je trouverai le loisîr de m’en occuper, je ne m’appartiens pas,
pour t’ecrire si longuement il faut que je mette en colère. finette me rompt
la tête, et je ne sais comment s’appelera notre déjeuner.
[p. 6] [page écrite à l’envers] Mon
mari ne veut point que je l’oublie aupres de vous tous
Je t’embrasse
tendrement
Toute à toi
Adele
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
[au bas de la page sous l’adresse]
J’ecrivis de même
avant hier à mon père. Adieu chere Sœur a bientôt cette perspective me
parait bien douce, mais Mathilde ou rien je te le déclares !….
à Pauline une visite de ma part en attendant que je puisse
lui écrire.
2011.02.158 | Mardi 23 mars 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Lettre commencée le lundi soir et terminée le lendemain matin. Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée écrite des deux côtés, la dernière écrite à l’envers avec l’adresse au milieu de la page). Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 23 MARS (année illisible); LYON, 23 MARS (1841); GRENOBLE, 24 MARS (1841).
St Chamond Lundi Soir
Tu as bien raison ma
bonne sœur d’attendre ton arriveé à la Côte pour mettre mon pere au
courant des affaires d’Hector, ses décisions sont toujours si promptes, et
souvent si bizarres qu’il est prudent de parler au lieu d’écrire quand à
ce que tu as écrit à Hector mon mari avec sa bonté et sa délicatesse
extraordinaires est presque faché que tu ai éxigé qu’il s’adressat
directement à lui, il craint que cela ne blesse la fierté de notre frère, qui
dans cette occasion croyait ne demander que ce qui lui appartenait, il se doute
même qu’il ne préfère chercher des ressources ailleurs à des interets
éxorbitants ; son prémier mouvement a été de le prevenir en lui écrivant de suite pour le mettre à l’aise, mais apres avoir pensé
comme lui d’abord, j’ai réflechi qu’il était peut être plus sage de
laisser aller les chôses, et d’attendre l’éffet de ta lettre ; sans
écouter l’impulsion [p. 2] de notre cœur, Marc a eut de la peine
à se résigner, il lui semble que ce doit être si cruel de frapper à
plusieurs portes quand on est dans une gêne de ce genre mais si cette peine
pouvait engager notre pauvre frère à l’économie, il faut le tenter sans l’esperer
trop malheureusement.
Je viens de recevoir une lettre de mon pere qui m’a fait
plaisir en me donnant de bonnes nouvelles de sa santé ; mais qui n’a pas
simplifié mon embarras tant s’en faut, je suis horriblement contrariée qu’il
ait pris sans me prevenir une jeune fille pour me la former, je l’avais
prié de me dire si Monique ne connaitraît personne qui pu me convenir,
et de me l’écrire vite
tout
simplement, au lieu de cela sans perdre une minute, sans savoir, si j’en
ai trouvé une ici, rien, il commence l’éducation d’une cuisiniere
à mon intention tu comprends Ma Chere que cela ne peut me convenir en aucune
manière je ne puis attendre mon retour de la Côte, et laisser Marc seul ici
sans [p. 3] personne ; et dans le doute si celle qu’on prend
me conviendra ; puis j’ai
découvert une bonne Auvergnate, qui sait
faire la cuisine ; et qui desire venir chez moi ses maitres quittant St
Chamond ou elle tient à rester, je l’aurai ainsi dans huit jours ce qui est
bien different ; il faut donc que j’ecrive de suite à mon pere qu’il s’est
trop pressé, au risque de le vexer mais comment faire mieux dis moi ?..
Il parait qu’il est contrarié horriblement que mon séjour
à la Côte ne coïncide pas avec le tien il me dit qu’il se croiras obligé
de me tenir compagnie souvent que ce sera un soucis pour lui, mais comprends tu
cela Ma Chère ? cela m’a attristé plus que je ne puis dire Je vois que
je voudrais contenter tout le monde et que je n’y réussirai pas, je crois que
mon pere avait deja cette idée la quand je parlais d’aller le voir au
commencement du carème, et qu’il avait cru changer les chôses en allant à
Grenoble passer quelques jours.
Mon mari ne peut comprendre cela. pour moi les idées de
notre pauvre pere m’étonnent moins.
[p. 4] pour m’achever hier j’ai eu une
frayeur épouvantable Josesphine s’est echappée des mains de sa bonne et est
tombé un coup affreux a la
renverse sur la tête pendant deux heures elle a poussé des cris horribles,
nous envoyâmes chercher notre medecin, impossible de le joindre ne sachant qui
devenir nous lui mîmes de la moutarde ; il vins ensuite et nous rassuras,
elle dormit assez paisiblement, mais à son reveil rien ne pouvait la distraire ;
ses yeux étaient éteins, nous étions fous d’inquiétude ; hier soir
cependant elle a reprit sa vivacité et son teint ordinaire ; aujourd’hui
elle va bien et je commence à croire que la chute n’etait pas seule cause de
l’etat ou elle était hier mais une crise de dents, le tout joint ensemble
elle ne voulut pas me quitter une minute l’inquiétude et la fatigue m’ont
abîmée ; quelle journée affreuse nous passâmes hier ; je croyais qu’elle
avait duré aumoins 48 heures !……
Dieu merci j’espère qu’elle n’aura pas de suite [p. 5]
je lui ai fait prendre un bain d’une heure mais ce soir elle est agité,
souvent elle l’est autant, mais tu sais ma chere que lorsqu’on a eu de
l’inquiétude on a peur de tout. Adieu Ma Chere je te quitte pour aller me
coucher ce dont j’ai grand besoin ; mais finette ne me permet guère
d’esperer de bien dormir
tu es bien sotte de ne pas me promettre d’amener Mathilde,
les terreurs de Camille me paraissent un peu fortes, mais on aime
tant ces pauvres enfants qu’on en devient absurde mais en prémiere
ligne [...]
je n’ôse trop insister, mais il m’en coute beaucoup beaucoup, cette chere
petite avait deja son lit prêt je me préoccupais chaque jour de ce qui
pourrait lui faire plaisir …… arrange toi aumoins pour me rester le plus
possible en compensation. il faudra bien que je me repôse un peu de mes tracas sans departir je n’ai pas eu le temps de m’asseoir aujourd’hui à peine
pour dîner.
toute à toi Adèle
[p. 6] [Au dessus de l’adresse, à l’envers]
J’ai reçu cette
semaine une lettre de Mme Méline qui me dit que les dernieres
nouvelles de Mme Julhiet
n’annoncait pas que son mari
se trouva mieux du séjour de Nice
cette pauvre femme espere tout du temps J’admire
sa perseverance et je la plains plus encore
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
[sous l’adresse]
mardi matin
finette a dormi contre notre attente, elle va tres bien ce
matin, elle est là assise par terre qui s’amuse paisiblement
2011.02.159 | Samedi 3 avril 1841 | À son père Louis-Joseph Berlioz | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, adresse à la dernière. Écriture plus soignée que dans les lettres précédentes à sa sœur. Timbres postaux: ST.CHAMOND, 3 (?) AVRIL 1841; LYON, ? AVRIL ?; LA COTE ST-ANDRE, 7 AVRIL (1841).
St Chamond Dimanche
Il y a bien des jours
que je forme envain le projet de vous écrire mon Cher Papa, mon temps ne m’appartient
plus maintenant, ma petite fille m’occupe du matin au soir, et pour trouver
moyen de faire une lettre c’est souvent une chôse impossible, malgré toute
ma bonne volonté ; cette semaine surtout la pauvre enfant avait des
coliques si violentes que j’étais inquiéte, quand je voyais de grosses
larmes inonder sa petite figure, cela me fendait le cœur, elle grossit
beaucoup c’est ce qui est cause de cela probablement, depuis deux jours grace
à dieu elle n’a plus de ces accès, elle est rose et blanche et fait
de bons sommeil et de bons repas, cette chere enfant n’est point
méchante quand elle ne souffre pas je la garde des heures entieres tres
sagement éveillée, à me faire des gentilles bonnes graces, il me tarde bien
mon Cher Papa de vous la faire admirer, le temps approche ou je songerai à me
mettre en route pour la Côte [p. 2] j’attendrai le mot d’ordre
de Nancy pour fixer mes projets ; jamais je n’etais six
grands mois resté six grands mois loin de vous tous c’est
long ! bien long, et je vous embrasserai bon pere avec une joie
inexprimable !. J’espere que je vous trouverai en bonne santé, je veus
vous faire compliments sur votre bonne mine absolument. Vos grandes réparations
doivent commencer à s’avancer, comment vous résignez vous avec ce beau
soleil de printemps à rester dans la maison pour les surveiller ?
Pour moi ces jours ci je me suis occupée de mon parterre, il
y a devant le cabinet de mon mari une petite terrasse grande comme un mouchoir
de poche, et c’est la ou je travaille a avoir quelques fleurs ; il y
avait ici un marchand tres bien fournis, et j’ai acheté plusieurs arbustes
qui me donne les plus belles esperances pour cet été, ce soi disant jardin me
sera précieux pour promener ma petite, et pour la faire jouer au soleil quand
elle aura deux ou trois ans.
[p. 3] Mon mari a reçu la procuration d’Hector
pour l’affaire de la maison Charbonnelle
il lui écrivait quelques lignes à la hâte en la lui envoyant, il est tres
occupé à ce qu’il parait a courir les Ministeres mais pourquoi ?…
mais qu’espere-t-il point d’explication ! son fameux Festival dans le
Panthéon réussira-t-il ? pas un mot à ce sujet, j’en suis toujours
réduite aux conjectures comme avec mon Oncle il ne faut pas être trop curieuse
avec ces deux Messieurs depuis quelques temps.
Le mariage de Mr Hypolyte quand se fait-il ?
J’espere tous les jours u[..] lettre de Mme Veyron qu’elle m’avait
fait annoncer par mon mari, si vous la voyez cher papa rappelez lui cela, et
faites lui mille amitiés de ma part.
Marguerite est tres adroite pour ma petite j’ai pleine
confiance en elle quand je sors
elle m’a dit qu’elle resterait chez moi cette année si je lui
donnais 200 tt de gage mon mari trouve comme moi que nous n’avons [p. 4]
rien de mieux à faire que d’en passer par ou elle voudra, nous la
remplacerions difficilement sous tous les rapports, et pour la petite surtout
nous arrangerons cela à la Côte.
Mes amitiés à Monique.
adieu mon cher papa Josephine se reveille et il faut que je
finisse nous vous embrassons bien tendrement tous trois
votre affectionnée fille
Adèle
[adresse ici au milieu de la page]
Monsieur
Monsieur Berlioz, Medecin
La Côte St André
Isère
2011.02.160 | Jeudi 6 mai 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les trois premières écrites, adresse à la quatrième; déchirures à droite et à gauche de la troisième page. Timbres postaux: LA COTE-ST-ANDRE, 7 MAI (1841); GRENOBLE, 7 MAI 1841.
La Cote St André Jeudi
Tu es bien gentille ma
Chere Nancy d’avoir su trouver le temps de nous écrire malgré tous tes
embarras, je commence à croire qu’il n’y a que moi qui ne sais pas suffire
à tout malgré ma bonne volonté et mon activité, je te remercie de tes offres
de services pour mes emplettes de draps J’ai écrit a Marc pour savoir si cela
lui conviendrait, il doit venir Lundi et sil est d’avis de faire cette
emplette il apporterait l’argent pour cela, il me semble qu’avec 300 tt on
pourrait en avoir 6 paires de neufs tres beaux en mettant la toile à quatre
francs l’aune ainsi partant de ce point il serait facile de voir si ils
on les
mises
trop haut
Je suis fachée Ma Chere Amie que Camille ne veuille point
profiter de tes renseignemens acquis à la sueur de ton front pour un
portail en fer tu ne
pouvais douter du zêle que mon mari aurait mis a cette grande affaire.
[p. 2] Mon pere va assez bien, il a eu cependant
depuis un mal de doigt assez violent pour l’empecher de dormir l’avant
derniere nuit, et me disait que : cela pouvait facilement devenir gangreneux !……
je commencai à m’effrayer puis en y réflechissant et surtout en voyant le
doigt je me rassurai bien vite, il ne faut plus trop prendre au pied de la
lettre ce que dis notre pauvre pere.
Ma bonne est revenue seulement hier dans la nuit, et j’en
avais passé, trois sans dormir avec finette et dans la journée je n’avais
pu trouver personne pour la garder, mais j’en etais presque bien aise cela me
distrayais
Je passe toujours mon temps ici assez peniblement, il me
semble qu’il y a des siecles que j’ai quitté Marc Sa visite me remontera,
il passera j’espere deux jours avec moi, puis je ne repartirai probablement qu’a
la fin de Mai, je me suis imposé cela quoiqu’il puisse m’en couter [p. 3]
Nous nous promenons tous les soirs avec mon pere du chuzeau au Moulin et à la
Grange, l’essentiel est que cela lui fasse plaisir, je jouis quand je vois qu’il
se distrais avec moi et ma Finette, mais sa surdité me fatigue horriblement,
non pas d’irritation d’esprit mais de p***
J’ai quelques visites a faire aujourd’hui et je ne puis m’y
décider
J’ai a peine vu Mme Pion de[..] toi elle avait
cinq ouvrier[lacune] plus intrepides
reculerais […] t[.] conviendras. Je pense [...] nous irons à
Beaurepaire av[.....] mari …… Je suis allée au couvent Lundi, Mme
Giroux t’attendait pour te
remettre des commissions pour les dames Gagnon,
elle fut consternée en apprenant ton départ.
Adieu Chere Sœur mille amitiés de ma part a tous nos parens
et amis à Mme Félicie un souvenir particulier en reconnaissance de
son aimable visite à St Chamond, j’embrasse Camille et Mathilde de moitié
avec toi
Adele Suat
[p. 4] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.161 | Lundi 10 mai 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les trois premières écrites, adresse à la quatrième; déchirure à gauche de la troisième page. Timbres postaux: LA COTE-ST-ANDRE, 12 MAI 1841; GRENOBLE, 12 MAI 1841.
La Cote St André Lundi
Je te remercie Ma Chere
Amie de l’empressement que tu veus bien me témoigner pour mes
commissions ; les gants vont parfaitement quand aux draps mon mari étant d’avis
de profiter de cette occasion d’apres ce que tu m’en avais écrit il a
apporté l’argent et nous te l’enverrons ou
par eux effet, ou Vendredi par
dumond.
Tu feras comme pour toi Chere Sœur Seulement si il en a six
plus fins que les autres nous preferons y mettre 5 fr l’aune au besoin s’il
le faut, et prendre les plus beaux, et les plus neufs. Nous te prierons Chere
sœur de nous faire faire une caisse et de nous les adresser directement à St
Chamond par le roulage ; mille remerciments d’avance pour tout l’embarras
que cela vous causera, mais à charge de revanche.
Mon mari est arrivé cette nuit mais ses affaires ne lui
permettent pas [p. 2] de faire un sejour de plus de deux jours nous
allons ensemble cette apres midi faire une visite à Mme Veyron,
demain nous allons à Beaurepaire ; et apres demain il pense repartir, je
me retrouverai encore plus tristement apres son depart, notre finette est plus
endiablée que jamais ; voila trois nuits que je dors a peine quelques
heures,
Marguerite est malade, ainsi
fatiguée ou nous il faut que
Marc et moi nous la gardions ce soir, j’ai encore plus de peine ici que chez
moi parce que j’ai une cuisiniere de moins pour le matin et Claudine pour les
nuits ; Monique ne peut absolument rien, elle etait hier d’une humeur
massacrante, je dinais chez Mme Laroche et pendant que je n’y
étais pas elle fit une scène à mon pere tres déplacée, a propos d’une
paire de bas qu’il lui demandait. tu vois chere sœur qu’il ne faut pas s’y
frotter.
[p. 3] Mme Pion est enchantée de la mousseline
que tu lui as envoyée ; mais elle en désirerait encore 2 aunes, les robes
seraient trop étroites a deux largeurs d’abord, puis les plis en
prendront beaucoup et il en manquerait evidemment. elle te prierais ensuite de
lui acheter 3 paires de gants en filets noir, d’un prix moderés, ni des plus
chers, ni des meilleurs marché.
Puis des remerciments et des excuses s[...] fin : je comprends
che[..] sœur
que l’absence prolog[..] d’Henriette doit multiplier les embarras
Connais tu le mariage de Mr Joseph Lacroix avec Melle
Bonnard de Vienne 120,000 tt comptant, 17 ans et une figure charmante…
c’est magnifique j’espère ; j’ai dîné hier avec lui, il était
rayonnant.
Adieu Chere sœur je vous embrasse tous bien tendrement, mon
mari te dis mille chôses affectueuses
toute à toi
Adele S
[p. 4] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.162 | Mardi 10 août 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages écrites, adresse à la dernière page; déchirure au milieu du feuillet. Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 10 AOUT (1841); LYON, 10 AOUT 1841; GRENOBLE, 11 AOUT (1841).
St Chamond Mardi 10 Aoust
Depuis ma derniére
lettre Chere Sœur j’ai eu beaucoup d’inquiétudes au sujet de
finette je
commence seulement depuis hier à respirer plus librement, cette malheureuse
dentition éprouve horriblement cette chere enfant, je craignais un epanchement
au cerveau et tu peus deviner quelle angoisse me déchirait Le medecin m’assurait
bien qu’il n’y avait pas le moindre danger, mais quand je voyais ma pauvre
petite si brulante, les yeux si éteins, et gemissant en me disant « Mal,
maman, mal ! .. je
croyais de perdre la tête je ne vivais plus c’est le mot nuit et jour je la
promenais, enfin le medecin s’est décidé a lui donner un coup de
Lancette
dans la gencive et depuis lors elle a été soulagée, mais je ne puis te dire
Chere Sœur l’emotion que j’ai éprouvé en tenant ma pauvre enfant pendant
cette petite opération [dans la marge de droite, verticalement] avant d’aller
à la Côte j’espere dis à Mathilde que finette lui dira Laide et polissonne tant quelle
voudra mes compliments à Camille [dans la marge de gauche,
verticalement] toute à toi, Adele [p. 2] elle faisait des
cris atroces, on me dit cependant que ce n’est pas douloureux et qu’il y
avait plus de peur que de mal ; peut être même faudra-t-il y revenir de l’autre
coté, et il faudra bien reprendre mon courage mais tout cela joint au manque
complet de sommeil depuis quinze jours m’a abimée ; mon mari se
désesperait de ne pouvoir rien pour me soulager, mais que faire ?
Josephine ne voulait pas me quitter à peine pour sa bonne, cette tendresse extraordinaire me frappait du reste Chere Sœur tu sais combien mon
imagination est ingénieuse en pareil cas …… maintenant grace à dieu elle
en est aux caprices je les trouve adorables et je ne sais rien lui refuser et
pour t’ecrire j’ai fait acte de courage en la faisant crier pour la faire
emporter de ma chambre, c’est sublime pour moi dans ce moment.
[p. 3] J’ai reçu hier quelques lignes de mon
père il allait tres bien, mon mari n’est pas allé a Beaurepaire comme tu
penses bien à cause de la petite, maintenant des affaires le retiennent ici, et
il est probable qu’il n’ira plus qu’au commencement d’Octobre en m’accompagnant
à la Côte, tous nos projets ont été dérangés cet été, maintenant je ne
desire qu’un peu de repos complet.
Marc est invité aujourd’hui [....]iner de Bapteme de Mr
Deloye sa femme est accouchée
tres heureusement en une heure d’un magnifique garçon je ne puis te
dire le plaisir que cela m’a fait, elle croyait rever ! elle ne pouvait
croire que ce bel enfant fut a elle la pauvre femme se frappait horriblement les
derniers jours de sa grossesse, elle ne pouvait voir aucune de nous sans fondre
en larmes, cela me fendait le cœur. [p. 4] Mr Munet
est venu nous voir il y a quelques jours ; Mme Richard est
repartie ce matin pour Mon Chat elle m’a fait promettre d’y aller
passer quelques jours avec les dames Ardaillon à la fin du mois.
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
[sous l’adresse]
Adieu Chere Sœur je te
quitte pour déjeuner, il est onze heures ; et c’est bien l’heure pour une
femme qui a veillée et bercé une
partie de la nuit.
je commencais a engraisser, et a recevoir des compliments sur
ma bonne mine
[dans la marge de droite, verticalement] c’est dommage que m[lacune]lle
n’arréte en si bonne disposition, mais [lacune
g]agnerai le temps perdu
2011.02.163 | Samedi 11 septembre 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les trois premières écrites, adresse à la quatrième. Au haut de la première page ‘11 Septembre’ semble avoir été ajouté après coup par Adèle. Timbres postaux: SAINT-CHAMOND, 11 SEPT (18)41; LYON, 12 SEPT (18)41; LA COTE-ST-ANDRE, 13 SEPT (1841).
St Chamond Samedi 11 septembre
Tu as un temps à
souhait pour ton voyage Chere Sœur, j’en profiterai aussi car je pars à
quatre heures avec Mr Richard pour sa campagne de Mon Chat, je
laisse ma finette à Marc ainsi je suis tranquille du reste elle va à merveille,
c’est un petit diable gentil a croquer, elle mange comme deux afin de vous
presenter une meilleure figure à la Cote
Mme et Mlles Ardaillon sont partis ce
matin, et nous allons mener toutes ensembles la vraie vie de
Chateau ; je suis sure que Mme Richard doit recevoir à
merveille, cette partie était projeté depuis cet hiver.
Marc viendra me chercher à la fin de la semaine.
J’ai eu avant hier une surprise agrèable en voyant arriver
notre cousin Victor B. mais le motif de son voyage à Lyon m’a étonnée bien
tristement, c’est un secret
Il a amené Pauline à la Ferrandiere au Sacré Cœur ou elle
veut se faire religieuse [p. 2] Ma Tante n’a pu lui résister
davantage elle tourmentait pour partir depuis plusieurs mois. Son pauvre frere
était navrè navrè, il en pleurait comme un enfant je le comprenais mieux que
personne quelle vide Pauline va faire dans cette famille, il craignait que la
santé de son Pere n’eu reçus
un choc.
Ils sont partis incognito, et veulent retarder le plus
possible d’en parler, dans la crainte ou l’espoir plutôt qu’elle
ne s’y accoutumera pas
Je serai a deux pas de son couvent a Mont Chat, mais Victor m’a
prié de ne pas aller la voir incore
pour ne pas la contrarier.
Il est parti ce matin
J’ai des millions de chôses à faire, je viens de donner
une lessive afin de la trouver prète à fermer
et repasser à mon retour et faire ensuite paisiblement mes préparatifs de
depart pour la Côte notre projet est de partir le 28 ou le 29 nous passerons
par Beaurepaire je pense [p. 3] pour differentes raisons et le 2
octobre je pense que j’aurai le plaisir de vous embrasser. J’ai
écris avant
hier à hector … que fais Mon Oncle ?
Adieu Chere Sœur embrasse notre bon pere bien tendrement
pour nous mille chôses à Camille à Mathilde mes amitiés à Mme
Pion, dis lui que j’emporte ses plumes
à Lyon pour en tirer le meilleur parti possible
J’ai ecris à Louise la
semaine passée adieu le temps me presse et je ne suis pas habillée
toute à toi
Ade[..]
Il viens de nous
arriver ici une Grenobloise mariée aù directeur de la poste. c’est Mlle
de Galbert.
Je ne sais si je pourrai en tirer parti j’ai peur que non,
son mari est tres bien, il s’appelle Mr de Morgues, il était à
Crest.
[p. 4] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
A La Côte St André
Isère
2011.02.164 | Mardi 21 septembre 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | Image |
Huit pages en tout (deux feuillets de quatre pages, adresse à la dernière page). Large déchirure au côte droit en bas de la septième page; texte en assez mauvais état. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 21 SEPT (18)41; LYON, 22 SEPT (18)41; LA COTE-ST-ANDRE, illisible.
St Chamond Mardi
J’ai trouvé ta
lettre hier en arrivant Chere Sœur, ayant prolongé un peu mon séjour à Mon
Chat, j’y étais si agréablement sous tous les rapports que je n’ai pu
résister aux instances de Mme Richard ; sa campagne est
magnifique, tu peus t’en faire une idée quand tu sauras que cette propriété
vaut cinq cents mille francs ! c’est un parc immense au milieu
duquel il y a une forêt de haute futaie qu’on traverse par des délicieux
sentiers, devant la maison une immense pelouse, puis des jardins anglais de
chaque côtés, et tout cela tenu avec un soins, et un gout parfait
Il est
impossible de mieux faire ses honneurs que Mme Richard, tous les
dimanches il y a du monde chez elle ; rien ne manque, piano, Billard jeux
de toute espèces, Album, journaux, puis un gentil petit cheval corse, et une
caleche mignature pour se promener dans le parc ; le temps a été à
souhait, nous pouvions rester dehors [dans la marge de gauche, de haut en bas]
Je te souhaite des cailles comme celles que j’ai mangé à Mon Chat tous les
jours [p. 2] toute la soirée, les enfants tiraient des petit feux d’artifices
qui faisaient un tres joli éffet dans la verdure. le matin nous prenions notre
café dehors sur une charmante table rustique
J’aurais jouis bien davantage de tout cela si mon mari et
ma finette en avait pris leur part, Marc a pu en profiter seulement dimanche.
Tu penses bien chere sœur que pour être à la hauteur de
cette vie j’ai fais de mon mieux pour être gentille, les dames Ardaillon
faisaient aussi beaucoup de frais aussi nous avons fini par conclure (modestie
a part) que nous avions été aimables a qui mieux mieux !.. pour ma
part j’ai fait deux conquètes ! … je ne te dirai pas de qui pour
ne rien gâter.
Etant à deux pas de la Ferrandiere je n’ai pas pu resister
à aller voir Pauline ; cependant prudemment je lui avais écris un mot
pour savoir s’il n’y aurait pas d’indiscretion elle me fit répondre qu’elle
m’attendait [p. 3] je ne puis te dire chere sœur l’impression pénible
que m’a laissée cette visite, j’en étais malade ; c’est que je n’avais
dèja plus retrouvé que l’ombre de notre bonne et si aimable cousine ;
elle me parlait de sa famille comme si elle n’y étais nullement necessaire,
comme y étant déja complétement étrangère, je n’oserais dire un mot plus expressif ;
peut être faut-il attribuer cela à la préoccupation inséparable d’un
nouveau genre de vie.
Son idée fixe était que je fis dire à sa mere qu’elle
était tres contente pensant qu’elle me croirait mieux que ses lettres ;
enfin je la quittai le cœur bien gros je t’assure, je n’aurai probablement
pas le desir de renouveller souvent de semblables visites ; pour me
remettre j’en fis une autre le même jour plus agréable j’allai chez Mme
Bouchardon, ou je trouvai sa mère et les
Faure toutes me firent l’accueil le
plus aimable, Mme Reval
sur tout me remerciait beaucoup [p. 4] d’être venue les voir,
elle me fit visiter avc orgueil la propriété de son
Eugene qui me parut bien mesquine, et bien peu confortablement tenue
en comparaison de Mon Chat, cela sent la Boutiquee un peu, à
part de beaux ombrages que j’admirai convenablement comme tu devines bien ;
enfin je passai une heure tres agréablement à parler d’autre fois ; de
douloureux souvenirs de part et d’autres furent rappelés aussi comme tu
peus
le presumer.
Mme Bouchardon fut [mot biffé] enchanté d’apprendre que tu
pouvais rivaliser de rotondité
avec elle, et me chargea de mille chôses pour toi, le jour ou elle est venu
ensuite me voir avec sa sœur Josephine, que j’ai trouvé horriblement changée.
Comme j’avais deux équipages à mes ordres j’ai fait
plusieurs courses à Lyon ; je me suis occupée un peu de ma toilette afin
de faire honneur à la Côte on y est
si difficile que ce n’est pas une plaisanterie, malgré toute la peine je me
suis donnée je n’espere guère [p. 5] recevoir beaucoup de
suffrages, cependant une élegante robe de gros
de Naples garnie en passementie,
un canezous d’un genre nouveau
orné de ma belle dentelle Valenciennes mon chapeau blanc restauré coquettement ...
Si ensuite toutes vos réunions d’automne ont eu lieu avant mon arrivée comme
cela est probable d’apres ce que tu m’ecris je regretterai beaucoup la peine
inutile que je me suis donnée en votre honneur et gloire.
Que je te dise encore Chere Sœur que j’ai voulu procurer
une petite surprise à mon pere ; je me suis rappelé qu’il m’avait
témoigné ce printemps le désir de voir des daguérréotypes et en
faisant faire par ce procedé le portrait de mon mari qu’il m’avait
promis depuis long-temps, j’ai eu l’idée de porter le mien à mon
pere ;
mais la Lumiére m’a tres mal traité, j’en suis furieuse ; pour
me consoler Marc est d’une ressemblance frappante, frappante [p. 6]
Je ne puis te dire combien j’en suis heureuse
Pour moi il parait qu’il m’est impossible de rester assez
immobile pendant une minute pas davantage, il faut qu’on vous fixe la
tête dans un cercle, et toujours avoir les yeux sur un objet sans remuer les
paupieres, c’est horriblement difficile, à cause de la reverberation du
soleil, puis l’idée que le plus imperceptible mouvement peut faire manquer l’opération
vous donne un besoin de bouger horrible, beaucoup de personnes ne peuvent pas
supporter cela on m’a recommencée deux fois peut être à la troisieme
aurais-je été plus heureuse ; mais le temps nous manquait.
Cette expérience m’a interressée au de la de toute
expression cela tient du prodige ; et je ne regrette pas mes 15 tt ni ma laide figure ; en voulant être trop gracieuse il parait que j’ai
bougé les levres et j’ai été punie. — Morale [p. 7] Ma
vivante image (qui ne l’est guère)
Ma chere finette m’a fait des tendresses extraordinaires à
mon arrivée, elle se porte à merveille, je lui ai trouvé bien meilleure mine,
c’est un diable s’il en fut et je réclame d’avance toute l’indulgence
du grand pere et de la Tante, je l’ai deja avertie que l’oncle
camille ne la
supporterais pas à table ; j’espere que Mathilde la protegera de sa
sagesse. dis a cette chere petite qu’elle m’[.] bien fait courir à Lyon
p[...] un gentil canezous à lui
a[......] Si je n’ai pas
reussis ce n’es[.....] ma faute, c’est très simple [lacune]
mais assez gentil, mais je […]
mieux comme à mon ordinai[lacune]
Je ferai ta commission [lacune] rubans si je peus,
tu [lacune] pour que ce n’est pas toujours [lacune] soignes donc bien ta
gripp[......] prie, quelle idée absurde [lacune] tousser avec ce temps tiède et
[lacune] le
papier me manque, j’ai tant a dire [p. 8] Je vis tellement
depuis quelques temps que je deviens prodigieusement bavarde Il me fallait
cependant reprendre haleine avant d’aller vous voir.
Mes compliments à la c***
étrangère que j’espere encore trouver à Beauregard
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Chez Mr Berlioz
La Côte St André
Isère
[sous l’adresse]
[… mes] amitiés à Mme
et Mlle Pion [… on
ne] peut rien faire des plumes [elles n]’en valent pas la peine [j’]embrasse
Louise et sa mère [ell]es ont du
briller à Rives ?…
adieu chere Nancy adieu père à bientot
Adele S.
2011.02.165 | Dimanche 12 décembre 1841 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Huit pages en tout (deux feuillets de quatre pages, adresse seule à la dernière page). Au haut de la première page ‘12 décembre’ semble avoir été ajouté après coup par Adèle. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 12 DEC. (18)41; LYON, 13 DEC. (1841); GRENOBLE, 13 DEC. 1841.
St Chamond dimanche 12 décembre
Que je commence par te
féliciter Chère Sœur, d’être enfin pourvue d’une cuisiniére et d’une bonne
à ce qu’il parait, le provisoire a toujours beaucoup d’inconvéniens et peu d’économie ;
il était temps que tu en fus sortis vraiment.
Ta longue lettre m’avait beaucoup interessée les détails
qu’elle contenait sur notre famille et nos amis étaient précieux pour moi ;
l’état de notre pauvre Tante Félicie me fait une peine profonde dis lui donc
je te prie mille chôses bien affectueuses pour moi à ta prémiere visite.
Pauline j’en suis toujours plus convaincue a été entrainée a cette
folle démarche par quelque idée fixe ; impossible a deviner, c’est
une enigme d’un autre genre que celle d’Odile, mais non moins étrange ;
dis moi s’il vallait la peine à cette derniere de vouloir se remarier à tout
prix pour vivre constamment separée de son mari ? il faut du reste (affection
à part) tenir bien peu de compte de l’opinion public pour arranger ainsi sa
vie !… [p. 2] Les pauvres Michal
sont un sujet d’une pitié profonde ; il ne leur manquait plus que la
maladie de Mélanie pour compléter leur affreuse position, c’est trop !….
pour une patience humaine vraiment…
Mon pere m’avait donné de ses nouvelles la semaine
derniere, ce qui m’avait surpris tres agréablement je t’assure je pense lui
écrire demain ainsi qu’a mon Oncle Felix avec qui je suis tres en arriere
mais j’attendais de savoir ou le prendre définitivement. la garnison de
Thionville ne le consolera pas beaucoup il me semble de son long carème à Huningues,
sa douce philosophie lui sera d’un secours indispensable dans cette occasion.
La nouvelle du départ de Mlle Lucie pour Paris
m’a fait crier Oh ! et Ah ! avec plaisir, mais je veus te gronder de
ne point me raconter l’evenement arrivé à leur cousin Blanchat
cela me préoccupe, une de leur petite fille est morte sans doute
malheureusement ?…… quel coup pour sa mere si impressionable [p. 3]
Je t’assure que j’ai fais comme tu t’y attendais de ta relation
poussielgue
les découvertes
souterraines sont charmantes tres heureusement trouvées ; le sejour d’Aubenas
est fait expres pour le sujet, on ne peut plus convenablement tomber ……
Je la vois délicieuse avec le costume de mariée,
d’honneur Mr Gourmier
a fait preuve d’un grand courage ce jour là…. je le tiens pour intrepide
…… c’est dommage que tu sois privée de ce jeune ménage pour l’ornement
de tes salons ce carnaval, auras-tu Mme Didier
cette Laide là aumoins serait precieuse je le souhaite pour l’agrément de
tes soirées. Pour moi je rumine un grand diner pour les prémiers jours de
janvier, je renonce a un bal pour des raisons que je te dirai un peu plus tard
rien ne presse … devine — si tu peus ?…..
Nos reunions se bornent jusqu’a present au — dimanches,
ce soir nous dinons [p. 4] chez Mme Richard dimanche
passé c’était chez Mme Ardaillon …
Je suis rassasiée de truffes déja cependant j’apprécie infiniment
ces bons petits diner, ou le confortable est si complêt, mais plus de truffes
de grace l’odeur seule me rassasie ……
Je te disais que nous sommes sur le point de terminer notre
marché de voiture avec .. Mme Charmeil,
en dépit de tout ce que le diable de sellier a fait pour la déprécier il
parait d’apres ce m’ecrivait hier Mme Charmeil
qu’il a fait plus qu’il l’a cassée, car quand Mr
Casimir l’a essayée elle penchait horriblement d’un côté, et elle était
en tres bon état positivement. Marc est de toute colère de cela et lui
écrit vertement, je pense que cela se terminera à 35 o
à cause de ces dégats, il faut baisser le prix c’est égal, nous
serons enchantés d’en être débarrassés aussi bien. [p. 5] Marc
vient d’ecrire à Mr Casimir pour terminer je n’ose encore trop
me feliciter j’ai peur de quelque nouvel anicroche.
Josephine continue à aller à merveille elle dort mieux la
nuit, et du reste elle supporte sagement Claudine la nuit quand il le faut
c’est un point capital pour nous ……
elle attend le jour de l’an avec impatience parce que son
pere lui promît un grand cheval qui aura des bonbons dans le ventre ; elle
raconte cela à sa maniére tres drôlement, elle est enchanté aussi de mettre
la cuisiniere en colère en lui disant « grosse Auvergnat
Sa passion pour le clerc de son
pere est toujours plus forte
cela promêt conviens Chere Sœur ?. rien au monde ne
vaut son Berthaud elle se precipiterais par la fenêtre s’il elle le voyait
dans la rue c’est incroyable vraiment, aussi je lui recommande de ne pas se
montrer pour éviter des scènes affreuses [p. 6] Pendant que j’y
pense tu ne voudrais point par hasard acheter un mouchoir de poche … une bonne
occasion. Tu te rappelles celui que j’avais donné à broder aux
demoiselles Ginet pour Mme
Richard ?…. et bien la jeune personne à qui elle voulait le donner (Mlle
Séguier cette fameuse pianiste de Lyon dont je t’avais parlé souvent) vient
de mourir subitement, en conséquence Mme Richard qui l’aimait
beaucoup ne veut pas revoir ce mouchoir cela lui ferait de la peine elle pense
le donner à vendre à sa lingère à Lyon ; mais peut être cela te
conviendrais-t-il, dans ces
cas
là on fait de bons marchés, reponds moi à ce sujet ? il est encore à la
Côte je pense que tout compris il couterait à peu pres 22 tt
— pour moi j’en aurai pour long-temps avant de faire pareille
emplette [p. 7] je ne rêve qu’économie, tout en dépensant de
l’argent, je recule pour mieux sauter je viens de prier Mme Richard
de m’acheter à Lyon ou elle va demain un joli chapeau dont j’ai un besoin
urgent comme à ma louable habitude je lui ai dis de faire comme pour elle ;
je suis sure que le choix sera parfait, elle a un gout exquis, je connais peu de
femmes qui se mettent aussi bien
Je pense ce soir me faire tres belle ; je mettrai un
bonne[.] tres frais arrivé de Lyon il est tres gracieux sur tout d’un cóté
de l’autre il deplait, mais je crois que c’est parce qu’il est à moi je
ne suis jamais satisfaite de ce que j’ai c’est une maladie.
Adieu Chere Sœur assez bavarder sur des riens, mille amitiés
a ton mari, à Mathilde des caresses mes compliments à tes belles sœurs
remercie Mme Dubaux de son bon souvenir [dans la marge de gauche,
verticalement] Mon mari ne veut point être oublié pres de toi Adèle
[p. 8] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.166 | Dimanche 1er mai 1842 | À son père Louis-Joseph Berlioz | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages écrites; adresse à la quatrième; déchirure au milieu à gauche de la troisième page. Timbres postaux: ST-CHAMOND, ? MAI (18)42; LYON, 2 MAI (18)42; LA COTE-ST-ANDRE, 3 MAI (année illisible).
St Chamond dimanche 1er Mai
J’attendais impatiemment de vos
nouvelles Cher Papa ; je ne sais pourquoi j’étais inquiète de n’en
pas recevoir, je comptais aumoins sur une lettre de notre chere petite Mathilde ;
et la pauvre enfant n’était guère en état de faire ce
grand travail, j’ai appris avec beaucoup de peine l’inquiétude qu’elle
vous avait donnée, vos soins si tendres et si éclairés Cher pere devaient
mettre complètement votre responsabilité à l’abris
mais malgré cela je comprends que l’absence de ses parents était ennuieuse
pour vous dans cette circonstance ; à leur retour il ne sera plus question
de maladie certainement et grace à votre sage précaution, ils auront aumoins
pu jouir sans trouble de leur voyage ; ils vous devrons donc Cher Papa de
doubles remerciemens, et de longues et aimables relations pour vous faire
oublier les pénibles préoccupations causées par la rougeole de Mathilde
J’espere bien que Nancy me donnera ma part aussi de ses
impressions de voyage, je ne lui en ferai certainement pas grace à son retour.
[p. 2] J’ai recu il y a quelques jours une longue et toute
affectueuse lettre de Madame Veyron j’attendais de savoir l’arrivée de sa
fille afin de lui répondre ; peut être le mauvais temps d’aujourd’hui
l’aura retenu à Pointieres
et si Raoul n’a point eu encore la rougeole elle n’osera affronter la
contagion en allant vous voir certainement, on aime pas a provoquer le mal pour
ses enfants.
Josephine a échappé à l’epidémie qui a regné ici
tout l’hiver, et si j’étais allée à La Côte ce printemps il est probable
qu’elle n’aurait pas été plus favorisée que sa cousine ; les
interminables précautions qu’il faut prendre m’auraient certainement
extremement contrariée.
Cette chere petite a été d’un bonheur extrème cette
semaine ; je lui ai mis des culottes !…. Mathilde comprendra
l’importance de cette inauguration ; cela prouve beaucoup sur l’article
propreté …… puis cela donne un air grande fille ….. la joie de
finette était si grande qu’elle a voulu aller à l’Etude de son pere faire
admirer ses fameux patalons,
aux deux clercs, à tous les gens de la maison [p. 3] c’était un
délire tres amusant, sa toilette l’occupe
beaucoup ; ce matin elle a pleuré une heure parce que la Marchande de Mode
n’avait pas garnis son chapeau
de paille à son gré elle voulait les mentonnieres attachées sous le menton
comme Maman, et non pas dessus comme les poupons Sa colere nous a fait rire aux
larmes son père et moi, je raconte cela pour amuser notre chère petite
[......]escente,
le bon papa me [..]rdonnera
ces détails à cette intention.
Marc est assez content de ses affaires cette année, sans
être tres nombreuses elles sont tres rendantes en génèral. il en négocie une dans ce moment qui serait magnifique, si
belle que je n’ose esperer qu’elle se termine mon mari s’en flatte, et
je desire de grand cœur qu’il ais raison un acte de deux mille francs et plus
ce serait bien gentil convenez-en cher pere ? la question se décidera
cette semaine probablement.
[p. 4] Adieu Cher Papa, n’epargnez pas
pour moi les tendres caresses à Mathilde puisqu’elle a été si docile à
vos ordres ; notre bonne Monique ne lui aura pas épargnés les gâteries
dans cette circonstance certainement
[adresse ici au milieu de la page]
Monsieur
Monsieur Berlioz
La Côte St André
Isère
[sous l’adresse]
Mes amitiés à Mme et Mlles
Pion
Nous vous embrassons tous bien tendrement adieu encore cher
Pere
Votre affectionnée fille
A S
2011.02.167 | Mardi 5 juillet 1842 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages, plus une feuille séparée écrite des deux côtés. Écriture assez hâtive et négligée. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 5 JUIL. (18)42; GRENOBLE, 6 JUIL. (18)42.
St Chamond Mardi 5 Juillet
Ma dernière lettre s’est croisée avec
la tienne Chere Sœur, et je présume que celle ci te trouveras enfin installée
dans ton grand salon de St Vincent, pour moi je ne trouve plus assez d’air
dans notre petit appartement, c’est à mourir de suffocation chaque nuit, mes
promenades en chemise m’ont gagnés je ne sais comment un gros rhume qui m’a
horriblement fatiguée pendant plusieurs jours, je me faisais pitié
vraiment, heureusement il a été aussi cours que violent et j’espère pouvoir
recommencer demain à prendre des Bains dont j’ai tant besoin dans ce moment
de toutes manieres ; je compte les jours avec impatience et terreur jusqu’a
ma délivrance je ne présume pas aller jusqu’a la fin de ce mois, mon medecin
crois aussi que je devancerai, et pour cela il a eu l’obligeance de retarder
son départ pour les eaux de St Galmier jusqu’au mois d’Aoust, je ne puis te
dire Chere Sœur combien j’etais [p. 2] préoccupée de le voir s’éloigner,
je n’ai aucune confiance aux autres medecins, c’etait un tourment de plus
pour moi en perspective dont je jouis d’être délivrée
De grace ne parle pas du courage d’Odile, cela me rendrait
furieuse, je ne lui crois aucun mérite je t’assures elle n’est pas
organisée pour souffrir comme les autres femmes positivement elle a celle là
un heureux privilège fais lui en mon compliment sincère ainsi que de sa grosse
fille quand tu la verras ; elle court déja peut être ?
J’ai reçu hier une lettre de Louise qui ne se flatte pas d’être
si intrepide, elle doit
repartir le 20 pour Tournon et sa mere n’ira la joindre que le 18 d’Aoust,
je croyais qu’elle devait accoucher plus tôt ces dames sont enfoncées dans
les noces et les réunions ; Louise me fait part en grand secret d’une
nouvelle œuvre de sa mère ….
j’attends qu’on m’en fasse part écrive officiellement
avant d’adresser à notre charmante amie mon bien empressé compliment [p. 3]
je suis heureuse de ce mariage il me fais du bien au cœur, ils doivent s’aimer
et se comprendre ; …. il n’y a que l’article finances qui ne
sera peut être pas assez brillant mais enfin pour la rareté du fait il faut
glisser là-dessus ; les parents s’executerons peut être au contrat ?
..
Il est probable que quand tu recevras ma lettre Mme
Golety t’aura déja écris la
grande affaire, mais prudemment je serai discrète ; ne t’étonnes plus
que le voyage de Grenoble de cette derniere ait été ajourné ; elle ne
pouvait laisser sa sœur dans un moment si décisif ; le mariage aura lieu
à Paris à la fin du mois prochain.
Je serais contente que tu ne sus rien afin de te
faire
chercher à deviner à la campagne on a l’esprit plus libre, et cela te
distr t’amuserais.
Encore un désappointement de
place dans notre famille ; le pauvre Victor
a été joué comme son cousin la place de Vienne est donnée à Mr
Gauthier malgré la promesse formelle [p. 4] de Mr
Teste le Beau député de
Vienne Ma Tante m’avait écrit que pour avoir la voix de mon pere aux
Elections on assurait la place, je m’étonnais il est vrais
beaucoup qu’il eut voulu s’engager à se déplacer même pour rendre ce
service à son neveu ; mais de la maniere dont ma Tante m’écrivait rien
ne semblait plus définitivement arreté de part et d’autre, et je ne
puis m’expliquer tout cela maintenant, tu me feras plaisir chere sœur de me
donner le mot de l’énigme ; mon mari a reçu une lettre de François
au sujet des démarches que nous avons faites et que nous ferons encore pour le
placer, il a été induit en erreur par sa mere, et demande mille explications
toutes naturelles, et que Marc s’empressera de lui repondre, du reste à son
retour de Paris il viendra ici, c’est plus simple
Que de peine il faut donc pour se faire une petite position
dans ce monde c’est éffrayant.
[p. 5] Tu dois deja songer au mariage de ta
fille la mienne sera grande aussi avant que j’aye le loisir de m’en douter,
elle est bien gentille depuis quelques jours mon gros ventre la préoccupe
beaucoup dernierement en me caressant elle sentit un violent mouvement de mon
enfant Oh ! sa bouge Maman !.. questce
ça ? puis c’etait des éclats de rires ! elle nous donne la comedie.
je ne puis m’expliquer que la petite d’Odile ne marche
pas encore ; il n’y a pas une énorme difference d’âge avec
Josephine ; j’en conclurais que la mienne est etonnante.
Tu est chanceuse
avec tes cuisinieres chere sœur, j’aime a esperer cependant que ton calme
agira sur ta nouvelle venue, et que tu pourras la garder
Je joins a ma lettre le reçu des trois
cents francs que Camille a envoyés à Marc ; nous ne pensions pas
que le fermier fut encore si éxact.
et mon pere croyait cela payé depuis deux mois voila la
difference.
Les Elections chauffent ici furieusement je ne sais ou fuir
pour ne pas en entendre parler, c’est un fléau.
[p. 6] Adieu Chere Sœur, mille amitiés à ton
mari, j’embrasse tendrement Mathilde tu devrais bien me l’amener, mais je n’ôse
l’esperer ?. mes compliments aux dames Gagnon je te prie
toute à toi
A S
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.168 | Dimanche 2 octobre 1842 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les deux premières écrites, la troisième blanche, adresse à la quatrième. L’écriture trahit l’extrême fatigue d’Adèle. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 2 OCT. (année illisible); LYON, 2 OCT. (année illisible); LA COTE ST ANDRE, 3 (?) OCT. (?) (année illisible).
St Chamond dimanche matin
Je fais un éffort Ma chere sœur pour t’ecrires
quelques lignes, apres la cruelle quinzaine que je viens de passer il n’est
pas étonnant que je sois si faible Je vais mieux maintenant depuis hier je me
lève plusieurs heures et je commence à manger, j’ai des faims feroces
Mon medecin m’a declaré que même dans trois semaines il
ne pourrait sans une extrème imprudence me permettre un voyage, me voila. Chere
Sœur condamnée sans retour a ne pas vous voir cette année ….. J’ai bien
pleuré je t’assures en apprenant ma condamnation
faut-il être malencontreuse .? …. apres un Eté si
cruel, si triste, j’avais tant besoin de me distraire, de bouger un peu et
rien, … rien ! …. tous mes preparatifs de departs étaient fait
je m’etais beaucoup donné de peine pour tout preparer, et au lieu de partir
je me remets au lit pour faire
une maladie
Enfin dieu me donne patience mais je suis bien découragée,
bien triste.
Mon bon Marc m’a soigné avec une tendresse extrème, il ne
m’a quitté [p. 2] ni jour ni nuit, il oubliait de manger et de
dormir … c’est bien doux chere sœur d’être aimée ainsi.
Mes Enfans vont à merveille Nancy veut me voir souvent elle
est toujours plus jolie et plus grosse
Si mon oncle est arrivé mille
tendresse, pour lui et mille regrets de ne pas aller l’embrasser
S’il vient ici il me fera du bien mais je n’ose l’esperer.
Adieu Chere Sœur la tete me tourne j’embrasse tout le
monde
A S
[p. 4] [adresse]
Madame
Madame Pal chez Mr Berlioz
La Côte St André
(Isère)
2011.02.169 | Dimanche 15 septembre 1844 (?) | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, mais la fin de la lettre manque; pas d’adresse, d’enveloppe ou de timbre postal.
St Chamond Dimanche matin
Décidement Ma bonne Sœur il faut que je
me mette en colere pour trouver le temps de commencer aumoins à t’ecrires ;
tous les jours de la semaine qui vient de s’écouler j’ai envain formé le
projet de prendre la plume ; je ne puis comprendre ma maladresse ; je
ne vois personne et ce n’est certes pas la societé qui m’absorbe ; j’ai
des lettres en retard qui me donnent des remords affreux mais il est impossible
que je puisse mieux faire malgré toute ma bonne volonté
Josephine a eu dernierement une rage de dents comme elle en
avait eu dans sa prémiere enfance ; il parait que ma pauvre enfant a les
gencives cruellement dures, puisque la dentition est si penible ; pendant
quatre jours elle n’a fait qu’un gémissement continuel qui me déchirait le
cœur plus que je ne saurais le dire ; elle ne voulait ni boire ni manger
se plaignait de mal au ventre aussi j’envoyai chercher le medecin – à deux
differentes reprises j’etais inquiéte et craignais une irritation ailleurs
encore que dans la bouche [p. 2] le medecin avait raison à ce qu’il
parait de m’assurer que la douleur de ventre n’etait que sympathique des
dents, du moment qu’elle n’a plus souffert de celles ci tout a cessé ;
mais tout cela l’avait rendue insupportable à un tel point
que j’en pleurais mes nerfs étaient montés à faire pitié
Nancy ne marche toujours point seule ; je ne comprends
pas cette paresse pour une enfant si forte
J’attendrai donc encore pour la retirer, mais je m’occupe
de préparer ici son lit, et de combiner le peu d’espace que j’ai pour la
câser dans la chambre de la bonne ; il faut recouper le lit de cette
dernière pour cela ; c’est encore de l’embarras
J’ai rangé hier une grosse léssive Enfin ma bonne sœur
voila ma vie.
D’apres ce que tu me disais, la Côte doit commencer ici à
se dépeupler chaque jour, au bourivari
des fêtes aura succédé celui moins agréable des vendanges ; le beau
temps aura je l’espère favorisé mon pere pour cette ennuieuse récolte ;
les bonnes nouvelles que tu me donnes de sa santé [p. 3] me rendent
bien heureuse ; ta présence est pour ce bon pere un beaume
comme à nul autre comparable ; je comprends bien Chere Sœur combien la
longue absence de ton mari doit être pénible pour toi, il me semble que les
autres années vous ne prolongiez pas autant votre séparation ; et votre séjour
à la Côte Je remercie ma Chere Mathilde de sa charmante relation ;
je lui repondrai un autre jour je suis trop pressée J’ai été émerveillée
de son orthographe plus encore que de son écriture, je suis les progrès de
cette gentille niéce avec le plus vif interèt.
Pauline m’a repondue dernièrement une lettre charmante ; et
qui m’a fait bien pleurer, elle a prononcé ses derniers vœux le mois passé
Je lui avais offert d’aller assister à cette cérémonie ; mais par
égard pour moi elle ne m’a point voulu ; présumant avec raison que je ne
pourrais l’entendre renoncer à jamais à sa famille sans éprouver une
emotion bien douloureuse …….
A propos de chôses tristes, je vais aller tout à l’heure
voir Mme de Morgue [p. 4] qui vient de perdre sa petite
fille ; cette visite me peine d’avance ; cette pauvre femme a été
malade de chagrin et de fatigues, depuis deux mois que sa petite était malade ;
elle était horriblement penible
Il est bien cruel de tout souffrir de toutes manieres pour en
arriver là. l’autre jour en assistant à la messe d’enterrement de cette
pauvre petite je ne pouvais retenir mes larmes mon cœur de mère se brisait.
Il y a eu ici cette semaine un brillant mariage ; il y a
eu nombre de diners de 60 a 80 couverts uniquement composés des proches
parents des deux époux chez le pere de la jeune personne Mr Chaland
propriétaire de ce beau jardin ou tu es allée je crois ? on avait mis la
table dans la serre qui si tu t’en souviens est superbe ; on dit que le
coup d’œil était tres
beau ; le luxe du service les toilettes tout cela au milieu d’une allée
d’orangers et de fleurs devait être charmant à voir.
le mari Mr Finoz est un tout jeune homme fort
riche, et qui va être confrere de mon mari, succedant à son père [la fin
de la lettre manque]
2011.02.170 | Dimanche 26 mai 1844 | À son père Louis-Joseph Berlioz | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les deux premières et le haut de la troisième écrites, adresse à la quatrième; l’écriture trahit la fatigue d’Adèle. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 26 MAI (18)44; LA COTE ST-ANDRE, 27 MAI (année illisible).
St Chamond dimanche
Je ne pensais pas mon bon pere que vous
eussiez appris par Nancy ma sotte indisposition ; et j’attendais pour
vous écrire d’avoir un peu plus de force.
J’ai cruellement souffert pendant huit jours une abondante
saignée, dix huit sangsues qui ont saignées à flots pendant douze heures et
de plus un coup de Lancette, et un
jeune d’une semaine ; tout
cela mon bon pere m’a affaiblis plus que je n’aurais pu l’imaginer, et
maintenant j’ai grand besoin de reposer mes forces, je mange beaucoup rien ne
me fait mal et j’espere que je serai de nouveau bientôt sur mon courant, mais
j’avoue chere pere qui je suis découragée de recommencer si souvent a
souffrir ainsi, puis délabrée comme je suis des épreuves pareilles ne sont
pas faites pour me remplumer ;
nous avions bien pensés à essayer de quelques eaux, celles du mont-d’or par
éxemple ; mais les douches [p. 2] m’effrayeraient beaucoup il me
semble que je ne pourrais les supporter puis avec qui aller à Aix ?
mon mari ne pourrait trop s’absenter au mons d’or c’est moins loin
d’ici puis que on fait ces eaux pour les maladies au Larinx peut etre
conviendraient elles également pour mon ennuieuse irritation ?
du reste la saison est peu avancée et nous avons le temps de réflechir.
Mon bon Marc est bien ennuié de me voir souffrir ainsi si
souvent ces tendres soins me soulagent plus que toute autre chôse en pareil cas,
jour et nuit il ne m’a pas quittée, et mes gémissement lui déchiraient le
cœur ; mes enfans vont tres bien
J’ai appris avec peine la maladie de Mr Boutaud,
Louise dois être bien inquiéte et bien ennuiée
Je voudrais bien savoir quand doit partir Mme Celine,
mes compliments bien affectueux je vous prie a toutes ces dames quand vous les
verrez
Adieu Cher Pere ; c’est pour moi [p. 3] un
veritable travail que d’ecrire quelques lignes
Je vous embrasse tendrement
Votre affectionnée fille
A S
[p. 4] [adresse]
[M]onsieur
Mons[ieur] Berlioz
La Côte St
André
Isère
2011.02.171 | Samedi 9 novembre 1844 (?) | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée écrite des deux côtés); pas d’adresse, d’enveloppe ou de timbre postal Écriture assez ferme et régulière au début de la lettre, se dégrade ensuite.
St Chamond Samedi 9
Tu dois être bien installée chez toi
maintenant Chere Sœur et en jouir d’autant mieux que tu es tranquille sur
notre bon Pere ; j’ai reçu ce soir une lettre de Mme Pion qui
me dit qu’îl va bien, et qu’il n’a pas pris ses grandes tristesses comme
cela lui arrivait toujours quand il se trouvait seul ; nous ne saurions
assez bénir la providence Chere Sœur de cette douce amélioration ; je te
félicite bien vivement aussi de ce que ta belle sœur n’est plus sourde, c’est
une garantie pour ta poitrine que me repôse beaucoup.
J’attends ta premiere lettre avec impatience tu me donneras
j’espere des nouvelles de tout notre monde ; Melle Nancy doit
être de retour d’Uriage il y a
un siecle que je ne sais rien de cette bonne amie ; j’ai hâte aussi de
savoir comment tu auras trouvé notre pauvre Tante Félicie ;
peut être est-elle encore à Murianette ? Marc a reçu cette semaine une
lettre de François [p. 2] les Messieurs de Vialloin
ayant vendu leur usine il se trouvera encore sans
place au mois de Juin … il est vraiment sous
une facheuse influence c’est à décourager au début d’une carriere, et ce
qui me fais craindre que la démarche que mon mari est chargé de faire aupres d’une
maison de Rîve de Gier en son nom ne réussisse pas ; enfin Marc y mettra
tout le zèle possible ; les propositions de François sont cependant de
nature à attirer l’attention de riches et ambitieux industriel, c’est une
belle occasion pour eux, c’en serait une aussi pour notre cousin le tout est
de s’entendre.
Je te remercie ma bonne sœur de l’empressement que tu
méttais dans ta derniere lettre
pour me recommander de me soigner et de prendre tous les moyens d’avoir un peu
de repos, mais j’en suis plus loin que jamais les embarras, les contrariétés
pleuvent sur moi sans interruptions depuis quelques temps … Marguerite me quitte
[p. 3] Jeudi – me voila donc sans bonne dans le moment ou je
songeais a en avoir deux ….. à la suite d’une scène de jalousie au sujet
de Nancy qui ne peut aller avec elle sans faire des cris affreux, elle m’a
déclaré qu’il fallait en finir, et de mon côté je trouvais que ma patience
ou ma faiblesse pour parler plus juste etait arrivé à son terme …. mais
cette conclusion a été tres orageuse Josephine est dans un desespoir incroyable
du départ de sa bonne elle a eu hier une espece de crise nerveuse à cette
occasion qui m’avait abîmée, ce soir encore elle a pleuré une heure
sans que rien put la distraire ; je ne puis te dire Chere sœur à quel
point je suis contrariée du départ de ma bonne dans ce moment Nancy me
tyrannise ; j’ai cent fois plus à faire dans la maison que jamais
J’etais attachée à Marguerite malgré son terrible
caractère, je comptais sur elle complêtement pour beaucoup de chôses, j’avais
depuis [p. 4] cinq ans l’habitude de son service ; je
déteste les visages nouveaux chez moi pour mes Enfans aumoins j’etais
tranquille maintenant ma maison est démonté la cuisinière me demande à
être bonne, alors
Marc a écrit à notre vieille Julie pour la prier de revenir aumoins
provisoirement afin d’avoir aumoins une fille de confiance l’autre a un
service charmant, mais j’ai des raisons pour veiller de pres avec Julie
qui pourra coucher à coté de l’Etude j’aurai moyen si je ne puis mieux
faire de coucher une seconde bonne, ce que je n’aurai pu faire autrement tout
cela me casse la tête plus que tu ne pourrais l’imaginer, je n’ai point d’énergie,
hier j’ai pleuré tout le jour j’etais abîmée de fatigues mes
Enfans
étaient întolérables, Nancy s’est enrhumée malencontreusement de sorte que
je n’ose la faire promener depuis deux jours, et je n’avais que l’heure de
la promenade de repos
[p. 5] Voila ou j’en suis Chere Sœur ne ris
pas trop de mon agitation je te prie ; mon mari s’en desole ; hier
il craignait que je ne finisse par me rendre malade aussi j’ai compris que j’etais
absurde et aujourd’hui j’ai plus de courage.
J’ai payé mon tribut à l’hiver ou la fatigue plutôt la
semaine passée par un rhume violent je suis resté dix jours sans sortir Marc
etais sans misericorde pour mes nerfs, avec raison mon terrible gosier lui
faisait peur, un soir je me suis cru prise d’une Esquinancie heureusement je n’ai
eu que la peur –
Demain nous avons un diner de Stephanois chez Mr
Ardaillon cela me distraira peut être, mais je suis si bêtifiée par mes
Enfans que je ne sais plus dire deux mots ma toilette aussi est fort en arriere
je n’ai point quitté le deuil encore pour toi Chere sœur tu dois être donc
dans le prémier coup de feu des visites des emplettes, tailleuse etc etc
j’approuve beaucoup le chapeau de Mathilde [p. 6] dis donc à
cette Chere Petite que je lui ecrirai plus tard, je l’ennuierais à coup sur
dans la disposition ou je suis ; Josephine lui dit mille chôses elle
commence bien à assembler ses mots, elle connait les capitales de l’Europe ce
dont elle est prodigieusement fiere, Mathilde hausse les épaules avec raison de
cette petite science de quatre ans Nancy s’acquitte tres bien de
manger, crier, et me tourmenter c’est ma bonne grosse paysanne qu’il
fais
bon embrasser s’il en fut aussi je la mange de caresse tout en gemissant de
ce quelle est penible
La sensibilité de Josephine nous tourmente souvent Marc et
moi, c’est trop pour son age, pas un nuage ne passe sur mon front quelle
ne s’en occupe, en devine la cause au moindre mot, croirais tu qu’elle se
désolait dernierement de ce que je n’avais qu’un vieux manteau retourné
pendant que je lui en achetais un neuf, quand je suis seule elle cause pour me
distraire comme un fille de l’age de la tienne
Adieu Chere Sœur le papier me fait finir brusquement
[dans la marge de gauche, de bas en haut] Mes amitiés à ton mari, mes
compliments à Mme Pochin AS
2011.02.172 | Mercredi 17 janvier 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Cinq pages (un feuillet de 4 pages écrites plus une feuille séparée, la première page écrite, adresse à la dernière). Timbres postaux: ST-CHAMOND, 17 JANV (année illisible); LYON, 18 JANV (18)44; GRENOBLE, 19 JANV (18)44.
St Chamond Mercredi
Chere Sœur
Je conviens que tu es une femme
prodigieusement occupée, je ne saurais plus en douter d’apres l’énumération
que tu m’as faites dans ta derniere lettre ; j’espère que tu es remises
des fatigues de ton grand diner, je t’admirais beaucoup de m’écrire la veille
de cette grande entreprise ; chez moi il ne faudrait pas que je me permisses
une telle liberté sous peine de voir oublier la moitié des choses.
Il est vrai que tu n’as pas deux petites filles à trainer
à tes bras ou dans tes jambes par surcroit comme moi.
J’ai reçu avant hier une lettre de mon pere qui me donne d’excellentes
nouvelles de sa santé et m’assure qu’il ne s’ennuie point trop ; j’en
bénis la providence du fond de mon cœur, quel soulagement aussi pour toi bonne
sœur ; en lisant avec empressement les deux pages de notre pere j’ai
été vivement émue en y apprenant la mort de Mr Veyron …. je ne m’y
attendais pas le moins du monde ayant reçu il y a peu de jours des nouvelles de
sa femme qui ne paraissait pas inquiète [p. 2] sur l’état de
malaise de son mari
Malgré le peu de sympathie qui existait entre eux je ne puis
croire qu’elle n’aye pas éprouvé aumoins dans le prémier moment un
déchirement douloureux, on n’a pas vecu trente six ans et plus ensembles sans
que la séparation ne soit pénible ? Je présume que Louise sera arrivée
bien vite aupres de sa mere. je ne sais point de détails donne moi donc ceux
que tu connaitras ; j’écrirai à Mme Veyron mais je voudrais
savoir sur quel ton avant ?
Pour moi j’ai regretté ce pauvre Mr Veyron il
aimait tant notre bonne mère il me souvient si bien comme il la pleurait avec
nous ; c’est un ancien et sincère ami de moins ; nous avions
toujours reçu de sa part l’accueil le plus empressé
Mon pere le regrette beaucoup.
J’ai reçu il y a quelques jours une longue et aimable
lettre de mon oncle, il se prépare à donner prochainement un grand bal helas !
pour sa bourse ….
Hector m’ecrivait aussi la veille du jour de l’an sa
lettre s’est croisée avec mon envois malheureusement et je n’ai pas su si il
l’avait reçue, c’est vexant. Il paraissait bien triste de l’état de sa
femme qui le tourmente toujours [p. 3] davantage et dont la santé
es plus mauvaise que jamais ; sa lettre me fit mal, bien mal un
découragement profond paraissait la dominer pauvre frère quelle
existence est la sienne ? l’impossibilité ou l’on se trouve de l’adoucir
un peu afflige cruellement.
J’ai été seule toute la semaine derniere mon mari a été
obligé de faire un voyage pour terminer enfin les affaires de son frère ;
à force de démarches il est parvenu à conclure la résiliation des Beaux
absurdes et ruineux qu’il avait sur les bras à Lyon Comme me disait quelqu’un
derniérement il serait quelques fois moins pénible d’être Batard …..
Pour parler de chôses moins ennuieuses je te dirai que je
suis dans des indécisions de toilettes de Bal, ma paresse s’éffarouche
considérablement de tout ce qu’il me faut
Mon mari me conseillerais d’aller demain a Lyon et revenir
le soir mes emplettes faites mais je suis trop vieille pour me décider
Nous avons une invitation de dimanche en huit ici chez Mme
Thomet une jeune femme de
négociant nouvellement mariée fort riche, jeune, somptueusement logée assez
jolie, mais dont l’entourage gâte un peu la position, et me gêne [p. 4]
pour accepter les nombreuses avances polie quelle me fait, il y a quelques
jours il y avait un diner au cercle, elle a réunis les dames chez elle à cette
occasion, j’etais du nombre. Les dames Ardaillons sont installées à Lyon dans
un appartement garni à l’hotel de l’Europe pour le reste de l’hiver ;
c’est presque plutôt un soulagement pour moi qu’une privation par le fait
de diverses circonstances Nous avons un grand diner Lundi prochain chez Mr
de Mourgues : Il faudra bien que nous songions a avoir du monde aussi dans
peu, un dîner m’éffraye un bal impossible, alors une soirée de jeu avec une
collation est ce à quoi nous nous arreterons je présume.
J’ai le projet aussi d’un gouter d’Enfant mes filles
ont déja reçu de nombreuses politesses à ma grande satisfaction.
Je ne t’ai pas dit je crois qu’elles avaient eu de jolis
presents du jour de l’an Mme Ardaillon a donné à Josephine une
jolie poupée avec un trousseau complet ; à Nancy une Bergerie charmante,
et à moi une cassette immense
remplis de délicieux Bonbons c’etait trop cela nous gène [p. 5]
Mme Richard a donné un gentil panier cabas à Josephine en paille d’Ytalie
cousu, et garnis de rubans, d’un gout exquis ; à moi une boîte de
Chocolat praliné dont j’aurais voulu te faire gouter chere sœur.
Ce que tu me dis des Etrennes de ta fille m’éffraye pour l’avenir,
que pourra-t-on imaginer de digne d’elle a dix huit ans ? comment une
montre en Or ! une broche ydem !
une robe en foulard etc etc c’est trop vraiment Ma Chere Mathilde, mais je ne
t’en fais pas moins mon compliment, et le cadeau en espèces de l’Oncle
Marmion encore que j’oubliais, tellement la liste est longue
quel beau role
que celui de fille uniq[..] conviens ma Chere niéce ? et apprécie le…
ainsi que le tendre baiser que je t’envois
Adieu Chere sœur nous allons tous bien ma maison ne marche
pas mal, mon mari est de retour chôse éssentielle pour mon contentement et mon
repos d’esprit
Mille compliments affectueux de notre part à Camille ;
un tendre souvenir à Mlle Clapier à Méline
quand tu les verras
Nous t’embrassons bien tendrement
toute à toi
A Suat
Si tu t’interesses encore à notre ancien *** Mr Anglès je te dirai qu’il vient d’obtenir la place de percepteur à Anjou en attendant que son fils ait l’age pour en remplir les fonctions en remplacement du beau Thivallier nommé à Giere à sa grande joie sans doute
[p. 6] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
2011.02.173 et enveloppe 2011.02.174 |
Mardi 30 janvier 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages avec enveloppe. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) ST-CHAMOND, 31 JANV. (18)44; (verso) LYON, 31 JANV. 1844; GRENOBLE, 2 FEVR. (18)44.
St Chamond Mardi
Nos lettres se sont croisées Chere Sœur
comme cela arrive souvent quand l’une de nous trouve l’autre en retard,
écrire pour en demander raison, est le moyen sur de recevoir des
nouvelles le jour même ; je ne veus pas m’exposer à tes tendres
reproches deux fois de suite Chere Sœur, et je profite vite d’un moment ou je
suis libre pour prendre la plume ; Je te dirai que je suis encore raide de
douleurs aujourd’hui pour avoir dansé comme une vraie jeune fille
avant hier jusqu’a quatre heures du matin ; la soirée de Mme
Thomet a été charmante et tres
animée, pour son coup d’essais la jeune maitresse de maison a fait des
merveilles, depuis que je suis ici je n’avais jamais vu de réunion aussi
brillante, mais c’etait pour moi toute une autre société ; j’avais
fait des frais de toilette étourdissants une robe de moire rose garnie en
tablier de nœuds plats en rubans [p. 2] de largeurs graduées ;
deux rouges d’angleterre lissant
à la taille aux manches de même,
les petits nœuds assortis à la
jupe, et tout cela allait à souhait, j’étais ravie de ma parure,
surtout de la coupe de ma robe qui me faisait une taille de vrai gravure de
mode.
puis dans mes cheveux une guirlande de fleurs de pechés
double
Tu vois Ma Chere si je me suis lancée,
je n’en ai pas dormi de remors
une nuit au grand divertissement de mon mari, puis cela m’a donné beaucoup de
soucis pour que tout fut complét, mais enfin j’en ai ensuite joui franchement
comme je me suis amusée.
J’attendais pour cette soirée Mme Viollet
mon ancienne voisine dont tu dois te souvenir, mais elle ne viendra que la
semaine prochaine elle était à Romans
avec son mari qui va je crois l’éclairer au Gaz quand elle ira s’y
installer je pourrai écrire à Mme Delphine [p. 3]
pour la lui recommander, elle est si bonne que sa maison serait précieuse pour
Mme Viollet, à qui je
m’interesse sincèrement.
J’ai reçu il y a deux jours une lettres de mon père, il ne
parait point songer à partir pour Grenoble, et ne s’ennuis pas encore chez
lui ; il me disait que Mme Veyron allait abandonner Pointieres
pour Tournon je ne m’en étonne point, cependant j’aurais cru qu’elle
aurait voulu aumoins y passer la belle saison ; il m’est penible de
penser que nous ne retrouverons plus cette maison amie ; cette pauvre Côte
n’est que ruines pour nous bientôt.
Tu me demandais si les démarches de François avaient
quelques chances de réussir dans notre voisinage, je crains bien que non,
ses propositions sans être rejetes
complêtement, n’ont reçu que des esperances vagues ; il s’abuse sur
certains points comme je l’ai vu dans la derniere lettre qu’il écrivait
dernierement à mon mari, à laquelle il n’a point encore pu répondre n’ayant
pas vu Melles Hatter,
et attendant une occasion favorable.
Ce que tu me dis de Jules m’étonne prodigieusement comme
toi je voudrais lire [p. 4] ses œuvres pour y croire !… dis
moi donc ce que tu en penses maintenant que tu dois les avoir lu
été initiée à ses secrets Mon oncle sera peu charmé par la celebrité future de son
fils, comme tu dis ma Chère il y en a assez d’un dans la famille, je ne
sais rien d’Hector, mon petit envois a-t-il été reçu ? je l’ignore.
Mes Enfans vont bien ; Nancy se developpe beaucoup, elle
a des yeux qui perceraient des murailles, je ne sais cependant si elle sera
jolie ? sa fraicheur m’étonne toujours
Josephine me donnait des conseils pour ma toilette tres
judicieux avant hier à propos dis moi donc la tienne chez Mme Croset
cela m’amusera.
Je ne me souviens point de Mr de Ventavin
tu me diras quelle est la jeune fille qu’il aura choisie ? Mme
de Mourgues me disait qu’il était horrible à voir.
Cinq heures arrivent Chere sœur j’ai quelqu’un a diner
il faut que je te quitte adieu donc j’attends ton journal avec
impatience c’est une bonne fortune que le courrier qui me l’apporte
Mon mari vous dis mille chôses affectueuses une bonne
caresse à Mathilde de ma part mes amitiés à Melle Nancy et a
Meline.
adieu adieu le papier me manque A
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
2011.02.175 et enveloppe 2011.02.176 |
Samedi 3 février 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages, plus une page séparée écrite des deux côtés), enveloppe. Écriture assez hâtive et négligée. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) ST-CHAMOND, 3 FEVR. (18)44; (verso) LYON (?), 4 (?) FEVR. (année illisible); GRENOBLE, 5 FEVR. (184)4.
St Chamond Samedi 3 Fevrier
Je reçois à l’instant ta longue et intérèssante lettre Chere Sœur, et comme je suis seule au coin de mon feu sans
crainte d’être interrompue avec le temps qu’il fait, je ne saurais mieux
faire que de prendre la plume pour te remercier des détails que tu me donnes,
et de la promesse que tu me fais de les renouveler souvent si je veus ? Oui
certe je ne demande pas mieux Chere Sœur maintenant que ma maison marche
passablement, j’aurai plus de temps à consacrer à ma correspondance ;
je te félicite d’avoir aussi retrouvé un peu de repos sur ce point
éssentiel, je ne t’avais rien dit de tes grandes tribulations de cuisiniere,
mais j’y avais cependant pris beaucoup de part, comme j’écrivais à mon
pere et que je m’en indignais fortement contre les filles de la Côte, j’ai
cru t’en avoir écrit sur le même ton ; le fait est que tu dois jouir d’être
débarrassée de ce tison de discorde dans ta maison Henriette perdait la tête
à son contact [p. 2] les scènes qu’elle t’a faites à cette
occasion me rappelle le genre de celles de Marguerite Je jouis aussi d’être
maîtresse chez moi, et recevoir qui bon me semble sans autorisation à
demander ; ma bonne est d’un caractère assez agréable.
Compliments pour compliments ma Chere tu devais être adorable
chez Mme Croset j’aime le genre simple de ta toilette simplicité
somptueuse il est vrai mais tes blanches épaules devaient tres bien ressortir
sur le mat du velour les
Bracelets aussi étaient charmants, comme toi j’apprécie,
et j’use de la mode des bracelets pour cacher mon bras ; ce soir tu seras charmante
tres bien aussi avec ton costume bleu
Mathilde ne dois pas t’épargner les conseils j’en suis
sure, mais ne le dis pas aumoins comme ma fille « Maman pourquoi as tu des
creux noirs dessous les yeux ? cela n’est pas joli est ce par ce que tu
es vieille ?…
Voila des vérités qui seraient penibles à s’entendre
dire à d’autres femmes beaucoup plus encore qu’a moi, je reçois
tres gaillardement rides et cheveux blancs [p. 3] Apres les plaisirs
du carnaval tu auras les jouissances du carème, je presume que tu auras bien le
courage de faire le coup de poind
s’il le faut pour entendre Mr Lacordaire, on attend de longues
heures souvent à moins, ainsi j’attends prochainement un compte fidèle de l’impression
que tu auras reçue en entendant ce celebre orateur je suis curieuse de savoir
si tu le prefereras à Mr de Ravignon ;
à propos de célebrités je te dirai que je dévore dans ce moment l’histoire
de la révolution de Mr Thiers ; c’est admirable tu le sais !
depuis long-temps je cherchais envain à me procurer cet ouvrage si vanté, le
style est si entrainant que je passerais la nuit à le lire.
Je croyais que la niege
aurait fait partir subito mon pere pour Grenoble il n’en est rien d’apres
ce que tu me dis, l’ennuis ne le tourmente toujours point je suis ravie de l’apprendre
Ou donc ce bon pere avait-il appris que Mme Veyron
quittait Pointieres décidement ?
Je comprends l’embarras de Louise au sujet du calme
de sa mere ; sa position était aussi fausse que penible, la bonne Madame Veyron
ne saurait mieux dissimuler [p. 4] apres la mort de son mari que de
son vivant ou cependant cela aurait été souvent nécessaire, en définitive il
vaut mieux qu’il en soit ainsi, son bonheur commence, a l’époque ou il
finit pour les autres femmes.
Ta pauvre belle sœur doit se trouver cruellement îsolée
depuis la maladie de sa Tante Teisséire, c’est une circonstance doublement
triste pour toi Chere Sœur tu avais bien besoin aumoins que la surdité
disparut pour te dédommager un peu de tes longues soirées tête a tête ;
Comment point de cadeau de jour de l’an ? c’est incroyable de la part
de Mme Teîsseire, foudroyant pour Mr Pochin …… mieux
vaut encore comme tu dis cependant n’être point obligée de sortir par
tout les temps pour aller lui tenir compagnie ; je suis charmée pour toi
des réparations qui vous allez faire faire dans votre appartement il sera
magnifique et commode apres cela
Tu as encore le temps cet hîver d’apprécier le confortable
de ta voiture pour aller dans le monde tu auras fort bon air dedans
[p. 5] J’aurais voulu être temoin des
émotions de Melle Marie Charmeil quî mieux que moi peut les
comprendre ? quand je me rappelle mes debuts à Grenoble, le bal de Mr
Simon ou en rentrans le cœur me
battait à me rompre la poitrine ; comme Octavie toi tu n’avais jamais
pris les chôses avec tant d’ardeur
Si Mr Charmeil ne donne point d’augmentation de
pension je suis en peine des toilettes de ses filles, sa femme n’est pas tres
habile pour faire quelque chôse de bien dans ce genre. Comment va maintenant la
mère faure J’ai su que Mme
Casimir a été grippée long-temps ainsi que ses Enfans ; il y a eu un bal
la semaine derniere chez le Sous-Prefet toute la salle était en émois par la
représentation de Lucrèce, une célebrité de l’Odéon était venu à
Vienne pour jouer le chef d’œuvre de ponsard,
et acteur et auteur on se les arrachaient, diner, soirées ils demandaient
merci me racontait-on.
Tu me vèxes Chere sœur en me faisant craindre d’avoir
envoyé un cadeau au portier ou a la domestique d’Hector, Mme
Souchon arrive ici demain peut être saurai-je à qui elle a remis le paquet il
etait cacheté avec grand soin ; et tu sais que souvent Hector oublie d’accuser
[p. 6] réception de ce qu’on lui adresse, cependant le 5 janvier
il avait du déja avoir reçu mon envois, je n’y comprends rien.
D’apres ce que tu me dis de Méline sa santé est meilleure
sans doute elle devait être tres bien avec sa robe de velour ; parlez
moi d’avoir des belles sœurs comme Mme Victor c’est charmant je
te prie de lui faire mes amitiés quand tu la verras
Mon mari vient d’écrire à François pour lui transmettre
la sotte nouvelle du refus définitif des Melles Hatter. J’en suis
tres contrariée pour lui et pour moi qui aurais été bien aise de son
voisinage, les chôses s’arrangent rarement comme on le desirerait.
dis à Mathilde qu’elle est trop grande pour prendre la
coqueluche ce serait ridicule ainsi j’espere qu’elle ne sera pas si sotte et
je l’embrasse bien dans cet espoir
Adieu Chere sœur conviens que pour cette fois je suis
prompte à la réplique je te renvois la balle ; gare à toi maintenant a
être leste aussi
Nous vous embrassons tous
toute à toi
A Suat
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.177 | Vendredi 23 février 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Cinq pages en tout (un feuillet de quatre pages, une page séparée écrite du premier côté, adresse au second). L’écriture à la quatrième page déborde parfois à droite sur la première; petite déchirure au milieu à gauche de la cinquième page. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 23 FEVR. (18)44; LYON, 23 FEVR. (1844); GRENOBLE, 25 FEVR. (18)44.
St Chamond Vendredi 23 Février
Je crains que tu ne sois en peine de nous
Ma bonne sœur, ma derniere lettre était faite pour t’en faire désirer une
autre le plutôt possible, mais malgré ma bonne volonté de te rassurer,
les embarras m’ont tellement accablés la semaine passée et celle-ci
que prendre une plume était une chôse infaisable ; je ne saurais par ou
commencer s’il fallait t’énumerer toutes mes petites tribulations ;
mais Josephine va assez bien sauf une paleur extrême qui me préoccupe
péniblement, j’espère qu’avec un régime soigné, et de longues promenades
son teint s’améliorera insensiblement ; je n’ai pu m’occuper comme
je l’aurais désiré de ma Chere petite ; j’ai eu chez moi Mr
et Mme Biallé depuis
vendredi dernier jusqu’a hier, c’etait une visite assez innoportune dans une
maison désorganisée comme la notre nous les avions attendu envain un mois
avant ou nous aurions été charmé de les recevoir, et un malencontreux hasard
les a fait retarder leur voyage, figure toi Ma Chere [p. 2] que le
jour même de l’installation de ma nouvelle bonne j’ai commencé a avoir du
monde, des Messieurs de Lyon venant pour affaires, il me fallait faire
moi même ma chambre, songer à mon déssert, mettre ma table, entretenir 6
feux de charbon, et tout cela avec Nancy aux bras qui etait et est encore
enragée c’est le mot, elle qui est tres propre ordinairement
depuis quelques jours ne demande jamais et me fait des ordures à chaque
coins on dirait qu’elle y met de l’intention pour nous donner le double d’embarras
Dimanche j’ai improvisé un diner de douze
personnes ;
j’ai fait un veritable tour de force d’activité mais ayant des politesses
indispensables à rendre nous avons mieux aimé profiter du sejour chez nous de
nos anciens voisîns ; hier j’ai eu encore quatre personnes à déjeuner.
Enfin c’est fini Ouf ! ……
Puis les invitations, les diners, les soirées, les visites,
tout cela a l’occasion de Mme Biallé, j’en suis rendue
[p. 3] depuis samedi je me suis couchée à Minuit tous les soirs,
toilettes, et bons dîners j’en ai une veritable indigestion même le
Mercredi
des cendres nous avons eu une réunion chez Mr Thomet
on a fait de la musique et même danser j’etais tres contrariée de commencer
ainsi le carème, et si j’avais pu refuser je l’aurais fait a coup sur.
Au milieu de tout cela cependant j’ai eu quelques moments
agréables chez nous Dimanche nous avons fait de bons éclats de rire ;
Lundi chez Mme Portier également.
Ma jeune bonne est tres intelligente le bourivari
de ma maison loin de l’étourdir comme je le craignais l’a développée
d’un seul coup j’ai pu avoir la nourrice de Nancy heureusement pour nous
seconder.
Maintenant j’ai mille chôses en arriére, mes Enfans
n’ont de rien n’ayant pu toucher une aiguille depuis si long-temps, ma bonne
travaille en perfection, elle brode tres bien même mais le temps manque pour se
servir de ses talents, la lingère que je prenais depuis long-temps ayant été
[p. 4] de moitié dans l’Escapade de la bonne que j’ai renvoyé (Elles
étaient allés avec les clercs de mon mari danser au bal Masqué, drapées de
mes manteaux coiffées de mes chapeaux de mes voiles etc)
Tu conçois Ma Chère
qu’on ne peut tolerer semblables chôses, envain on s’est jeté à mes
genoux, évanouis tombé sur le marbre de ma cheminée d’ou il
fallut
la relever toute en sang ce qui
me fit une frayeur horrible ces scènes m’ennuiaient trop pour vouloir courir
la chances de les voir recommencer. Je te fais mon compliment de ta cuisiniére
il est bien temps que tu sois satisfaite apres tant de mal en contre
Je me doutais que mon pere ne serait pas resté long-temps
chez toi, ses habitudes de campagne rendent impossibles sous tous les rapports
son séjour à la ville
J’espere que l’accident de ma Chere Mathilde ne l’aura
pas retenu trop long-temps prisonniere ; Camille du être éffrayé dans le
premier moment il y avait de quoi, les brulures sont si douloureuses les cris de
la pauvre enfant devaient lui déchirer le cœur, et lui faire maudire sa
maladresse cruellement.
[p. 5] Je n’ai point de nouvelles d’Hector
toujours ni de mon Oncle ; je ne compte que sur toi pour en avoir ;
remercie Melle Nancy de ses compliments aimables et affectueux
Je ne puis y croire ; mais l’intention m’a touchée, c’est d’une vieille
amie. Je l’embrasse tendrement en reconnaissance charge toi bonne sœur de
lui prouver que je ne l’oublie point ; le nom de ma fille m’est
doublement precieux puisse-t-il lui porter bonheur en attendant c’est un petit
diable rose qui commence a être
tres gen[...]
[.]e te la présenterai à Paques [..] l’espere ; le temps
marche si vite qu’il me semble que nous serons bien tôt a cette époque qui
doit nous reunir tous aupres de notre bon pere en attendant ecrivons nous
souvent Si le pere Lacordaire ne t’absorbe pas trop en quittant
Grenoble il doit precher à Lyon j’irai l’entendre à tout prix certainement
Adieu Chere Sœur Marc te dis mille chôses amicales il se
fache du matin au soir contre moi pour me faire reposer et soigner, mais mon
activité dévorante m’empèche de lui obéir comme il voudrait. J’embrasse
Mathilde et Camille adieu tous A S
[p. 6] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
2011.02.178 | Jeudi 7 mars 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, adresse à la dernière. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 8 MARS (18)44; GRENOBLE, 10 MARS (18)44.
St Chamond Jeudi
Je suis toujours en retard vis a vis de
toi et de bien d’autres Chere sœur, mais j’espère que tu ne m’en sais
pas trop mauvais gré ; depuis ma derniere lettre Josephine m’a donnée
de nouvelles sollicitudes ; l’irritation d’entrailles recommençait, il
y a fallut se remettre au régime rigoureusement, pendant plusieurs jours l’înquiétude
m’a torturé de nouveau ; elle va bien maintenant, sa paleur n’est plus
aussi extrème, son regard a repris toute sa vîvacité, je respire plus
librement, la semaine derniere je ne pouvais regarder ma pauvre enfant sans
pleurer, il me semblait la voir maigrir heure par heure, maintenant elle mange beaucoup
bien sans que cela lui fasse mal et j’espère qu’elle reprendra bien vite ;
je la promène beaucoup le medecin le recommande ; le changement d’air
lui fera grand bien me dit-il et achevera sa convalescence en conséquence à
moins d’un obstacle imprévu nous avons toujours le projet d’aller à la
Côte à Paques, ou tu me dévancera de peu de jours probablement. [p. 2]
Je n’ose me flatter que nous ayons le beau temps à cette époque
ordinairement l’hiver reprend toute sa rigueur la Semaine Sainte par a propos,
et je suis déterminée contrairement au printemps dernier à partir munie de
robes chaudes schals et autres
précautions, pour moi et mes enfans, tu dois être payée pour en faire
autant Chere sœur ; c’est peut être un moyen d’avoir un soleil
brulant par contradiction.
Mon pere m’a écrit dernierement, il ne se plaignait point
de sa santé ; je ne sais toujours rien d’Hector ni de mon oncle tout
deux m’étonnent par leur silence prolongé outre mesure.
Nous avons ici une épidemie de départ la famille
Derose
est partie samedi pour Vousier petite ville des Ardennes, apres un séjour de treize ans à St
Chamond Mr derose a été peu charmé d’un avancement acheté au
prix d’un pareil éloignement
Je n’ai point vu ces dames avant leur départ, elles
avaient été si sottes pour moi depuis long-temps, et Mr si
désobligeant dans ses rapports d’affaires avec Marc que nous n’avons point
eu d’adieu [mot biffé]
à nous faire ; ce qui m’aurait fait beaucoup de peine autre fois [p. 3]
Madame Louise Richard quitte le pays définitivement aussi pour se fixer à Mon-Chat
Son mari s’est retiré du commerce pour cela. c’est donc encore une
société agréable de moins je reste seule de notre ancien cercle intime si
agréable au commencement de mon mariage. un autre départ qui m’ennuis sous
un autre point de vue, est celui de notre curé de St Pierre qui va
Chanoine à Lyon ; c’etait un homme éclairé, et prudent, connaissant le
monde, et je crains de le remplacer pour moi difficilement
Pour toi Ma chere tu es toujours ravie au troisième ciel par
le pere Lacordaire, je t’envie ; mais non. parce que je ne pourrais être assez
libre de mon temps [....] aller l’entendre,
mes Enfants m’absorbent toujours davantage ; je me donne beaucoup de
peine et je ne suis pas plus avancée l’indisposition de Josephine augmente l’ouvrage
de la maison tous les jours un bain à préparer donne
de l’embarras je t’assure Enfin elle va bien c’est l’éssentiel.
J’espere que l’état de malaise de Mathilde n’a pas
duré, embrasse bien cette Chere petite de ma part. Adieu Chère Sœur mes amitiés
à ton mari le mien ne veut pas être oublié aupres de toi
Ton affectionnée sœur
A S
[p. 4] Je te posterai les dalhias, et si je puis j’y joindrai quelques tubercules de Chrysantèmes roses qui ont fait mon admiration cette automne et mon envie pour toi Chere Sœur.
[adresse en dessous au centre de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
Isère
2011.02.179 | Mercredi 20 mars 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, adresse à la dernière. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 20 MARS (18)44; GRENOBLE, 22 MARS (18)44.
St Chamond Mercredi 20 Mars
Je te remercie Ma bonne Sœur de
vouloir bien excuser mes longs retards à t’ecrires, le fait est qu’il n’y a pas
de ministre si occupé que moi, c’est à me rendre ridicule aux yeux de
beaucoup de gens mais deux enfans, et deux machines de domestiques à
diriger, c’est énorme pour moi, une seconde bonne m’aurait été
nécèssaire cet hiver, mais en dépit de tes conseils et de ceux de mon mari à
ce sujet je me suis obstinée à vouloir faire cette économie ; aussi je
fais un rude métier depuis quelques mois Enfin voila la belle saison, les jours
plus longs, Josephine rétablie ; et à mon retour de la Côte je pourrai
la mettre à l’Ecole ; j’espère que nous partirons
pourrions partir le Samedi
Saint, Marc pourra aussi passer les fêtes de Paques à la Côte, et notre
réunion sera plus complête, tu es bien gentille de me promettre Chere Sœur d’arranger
ton séjour d’apres le mien ; nous allons avoir joliment à babiller, je
suis pour ma part tres disposée à t’ecouter avec grand plaisir ta provision
sera plus riche à exploiter que [p. 2] la mienne ; nos enfans
aussi seront bien heureuses ensembles, sauf des coups et des disputes
indispensables, Mathilde mènera la bande et te protègera ; Josephine me
parle d’elle sans cesse, ce voyage chez le bon papa, est une grande joie
en perspective ; je l’ai menée a St Etienne Vendredi dernier
et cette petite course lui avait fait autant de bien que de plaisir je compte
donc beaucoup sur le changement d’air, elle a repris son teint ordinaire, et
sa gaité plus encore mais j’ose à peine m’en vanter car cela me porte
toujours malheur, quand je t’écris ainsi le lendemain elle retombe malade :
J’ai écris a Hector il y a quelques jours mais je n’ose
me flatter d’une reponse je n’ai jamais rien su de mon petit cadeau, si ce n’est
que Mr Souchon l’avait remis au portier vers le 15 janvier
Notre pauvre frere a tant de préoccupations pénibles dans
la tête qu’il est bien excusable en beaucoup de chôses, j’ai hâte de
savoir par mon Oncle quelques details sur ce triste ménage comme tu l’as
bien nommé, mais il est à craindre de ne rien apprendre de satisfaisans.
[p. 3] Dieu veuille aumoins que mon Oncle
obtienne quelque chôse de son séjour a Paris, il n’y a plus de temps a
perdre pour lui.
J’ai fait ta commission de rubans, et je cultive tes
fleurs avec des truffes, les dalhias ne seront peut être pas pres
malgré mes soins à l’époque ou je partirai, pour ces
tubercules de choix il faut que la végètation soit déja
avancée pour les détacher les uns des autres, mais je serais si heureuse de te
faire plaisir que je ne négligerai rien a ce sujet les bons diners ne font pas
mal.
Dis moi donc puisque je m’en sou[....]s par hasard chere sœur
si tu veus que je te porte mes bas de fil que tu m’avais demandé a échanger ?…
J’avais appris à Rive de Gier par Mme Perret
la nomination de Mr Simon nous nous en étions réjouies ensembles, c’est
le prélude d’un beau mariage pour Melle Elmance,
un peu de bruit réussit souvent.
J’ai fait la connaissance ce jour la de Mme
Martin qui m’a plu beaucoup, nous nous sommes promis de nous voir elle est
bien mieux que sa sœur Mme Perret
comme m’avais dis Mme Nicollet rappelle moi donc au souvenir de
cette derniere je te prie ; mes amitiés à Melle Nancy à
Méline sont elles comme toi Lacordairiseés ! [p. 4] Nous
parlerons longuement de cette homme éloquent, ton enthousiasme me gagne, et
j’ai juré de me faire écraser
s’il le faut pour l’entendre à Lyon.
[adresse en dessous au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
[au bas de la page, sous l’adresse]
Adieu Chere Sœur a bientôt, j’ai énorme lessive a ranger qui m’attend vite vite telle est mon cris de
guerre
J’embrasse Camille et Mathilde
Ton affectionnée sœur
AS
2011.02.180 et enveloppe 2011.02.181 |
Lundi 6 mai 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée écrite des deux côtés); enveloppe. Timbres postaux: (recto) St-CHAMOND, 6 MAI (18)44; (verso) LYON, ? mai (18)44; GRENOBLE, 8 MAI (184)4.
St Chamond 6 Mai
Chere Sœur
J’ai trouvé ta lettre Samedi soir à
mon retour de Lyon, la triste disposition d’esprit ou tu étais en l’écrivant
m’a fait de la peine ; je comprends Chere sœur combien la sotte affaire
de notre oncle a plus de conséquences pénibles pour toi, que pour aucun autre
membre de la famille et j’ai hâte de te sentir à la campagne à l’abris
des épreuves que tu trouves à chaque pas à Grenoble ton beau frère serait
ennuieux de retarder encore son
arrivée chez toi, son voyage est hors de propos dans ce moment ou tu es
absorbé par de si pénibles préoccupations. La maladie de ta voisine me
désole encore davantage ; la charge est lourde ma pauvre sœur, Madame Félicie
la soulagera peut être un peu momentanément ?
Je pense souvent que tes corvées du troisième te
préserveront d’autres malheurs plus amer à supporter [mot
biffé], la part des tribulations est justement distribuée par la
providence ; tu serais encore bien digne d’envie pour certaines personnes
[p. 2] J’étouffe pour toi quand je te vois le soir confinée dans
sa petite chambre, criant à perdre haleine, malgré ton rhume et
ton ennuis ; certainement tu n’aurais pas tant de mérite à te donner la
discipline Ma bonne Sœur, mais malgré cela je désire bien vivement te savoir
privée de ce moyen de mortification.
J’ai appris avec peine la mauvaise fin du pere
Lacordaire, il lui fallait peut être cette chute pour compenser tant, et de si
immenses succès ! l’esprit d’orgueil l’aurait tenté trop
fort ; mais ce doit être une horrible torture pour un homme en pareil cas
s’il a le sentiment de sa faiblesse accidentelle
J’ai passé hier l’apres midi à lire la brochure du pere
de Ravignon sur les Jésuites, il me semble que si j’entendais ce saint homme
il me monterais comme toi pour le
pere Lacordaire ; cet échantillon de son style m’a ravie ; j’ai
acheté cela à Fourvieres en sortant de la chapelle ; ou j’avais eu le
bonheur de communier et de gagner une Indulgence à l’intention de notre
pauvre mere [p. 3] Prier pour elle, et remercier Dieu de m’avoir
conservè ma fille m’avaient émue plus que je ne puis dire. Ma Chere petite
était charmante à genoux à côté de moi et priait de son mieux elle a fait
cette course assez pénible sans fatigue aucune ; Marc m’avait
accompagné dans la crainte qu’elle ne put marcher, mais elle a été en tout
d’une gentillesse admirable pendant le voyage, je l’ai mené avec moi à Mon
Chat ou nous avons passés deux jours Madame Richard a été si aimablement
empressée qu’il n’y avait pas possibilité de refuser, j’etais du reste
bien aise de ce rapprochement
Mon petit séjour a été tres agréable j’ai beaucoup vu
de monde fait immensément de commissions mes petites emplettes à mon gout, un
temps admirables pour mes courses
J’ai couru la piste des Dmes Pion de Bijoutier
en marchands de nouveautés enfin nous nous sommes rencontrées aux Terreaux, et
j’ai pu leur faire mon affectueux compliments ; j’etais allé envain à
leur hôtel à leur taudis plutôt [p. 4] car jamais je ne
comprendrai qu’on se loge dans un pareil endroit, c’est indécent.
leurs
emplettes sont tres bien d’apres ce quelles m’ont racontés en ca**ront.
cachemir long vert applications robe magnifiques, rien ne manque pas
même les diamants ! Montalon
m’a dit avoir monté une fort belle broche des diamants de la mère ! as-tu
jamais vu des diamants à notre
chere voisine ?…..
Enfin peu importe ; Celine
était laide à faire trembler ; la fatigue et la poussière n’embellissent
personne elles couraient la ville depuis huit jours à se tuer, elles me
faisaient vraiment pitié ; la mere avait l’air d’avoir la fievre comme
elle me le disait.
Elle m’avait donné de bonnes nouvelles de notre pere et
lui portera des miennes. En revenant de Mon Chat je suis allé voir Pauline qui
m’attendait avec impatience pour savoir des détails sur l’affaire de mon
Oncle, sa mere lui avait écris succintement à ce sujet et la renvoyait à moi
pour plus amples informations.
[p. 5] elle ne prend pas la chôse tranquillemens
non plus je t’assure, il me semblait voir briller les yeux de ma Tante
dans certains moments ; pour la distraire un peu je lui ai parlé de mon
idée de marier Victor, elle veut en écrire à sa mere peu m’importe
Je sais maintenant par Mme Richard que la jeune
personne ne redouterais pas de se marier loin d’ici. Mme Richard m’a
beaucoup demandé des nouvelles de Mme Dubeuf aussi sa bonté
gracieuse l’avait séduite.
Le mariage Ardaillon a lieu jeudi, je m’occupe activement
de ma toilette j’ai apporté de Lyon une robe tres jolie en Bassege
bleue chinée avec feuillage
blanc, garnie de deux volants
plats immmenses, manches blanches
à bouillons et entre deux ;
ceinture à larges bouts
et ma pelerine en dentelles pour complêter le tout J’oubliais une écharpe en
Bassège déssein
cachemir orange et bleue je serai tres belle il me semble mais pas tres entrain
de rien les idees tristes ne manquent pas, pas plus que les chôses irritantes
chez moi comme chez toi, chacun a son lot chere sœur. [p. 6] Je suis
bien aise que Mathilde ait pu prendre sa part de la St Philippe,
Josephine était dans le ravissement des illuminations, et des feux d’artifice
de Lyon, ce n’est pas sans intrepidité que j’ai pu lui donner ce plaisir je
t’assure, mais ses transports de joie me dédommageaient bien
Elle veut que je dise à Mathilde bien des tendresses de sa
part, et en fait de grandes nouvelles que je lui ai acheté un chapeau de
Bergere qui ressemble au sien qui lui faisait tant envi.
Ma Nancy va bien ; elle m’a fait de charmantes caresses à
mon retour.
Adieu Chere Sœur mes amitiés à ton mari Nous vous
embrassons tous
Ton affectionnée sœur
AS
Sais tu qu’Hector donne un concert cette semaine ou Litz et Delher se feront entendre ? Si tu en apprends le résultat écris le moi vite je te prie
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
2011.02.182 | Samedi 11 mai 1844 | À son père Louis-Joseph Berlioz | Texte corrigé | — |
Cinq pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée, la première écrite, adresse à la dernière); petite déchirure de la cinquième page au milieu à gauche. Écriture un peu plus soignée que dans la lettre précédente. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 11 MAI (18)44; LYON, 12 MAI 1844; LA COTE ST-ANDRE, ? MAI (18)44.
St Chamond 11 Mai
J’ai mené une vie si érrante, et si
agitée depuis mon retour de la Côte cher pere, que ma correspondance s’en
est ressentie ; maintenant que me voila rendue à mes paisibles
habitudes ; je me hâte de réparer le temps perdu, j’ai compté sur
Madame Pion pour vous donner de mes nouvelles il est vrai, J’eus le plaisir de
la voir quelques instants, au milieu de ses nombreuses courses ; et des miennes,
la joindre était difficile ; je poursuivais ces dames de Bijoutiers, en
Marchands de Nouveautés, c’était le moyen aumoins de leur faire savoir mon
extrème desir de les rencontrer ; j’ai reçu hier les lettres de part du
mariage de Celine ce qui m’a appris qu’îl avait eu lieu jeudi probablement,
le même jour j’ai assisté ici à celui de Melle Ardaillon avec le
comte d’Arloz, et qui a fait beaucoup de frais ici, il y avait 6 équipages magnifiques
à la porte de l’église ; le soir un diner de 40 couverts dans la serre
au milieu du jardin parfumé de fleurs, c’etait charmant, puis les deux cents
ouvriers [p. 2] des hauts fournaux de Mr
Ardaillon, vinrent suivant l’usage du pays offrir un bouquet Monstre à la
jeune mariée – et faire un compliment, une excellente musique (celle du 39ème
en garnison à St Etienne) precedait ce cortège, et jouas des
morceaux charmants toute la soirée ; puis un beau feux d’artifice a
terminé la fête, au milieu des vivas et des houras d’une foule innombrables,
tout cela était jolis à voir des fenêtres du salon, pour moi j’étais
admirablement placée à côté d’une demoiselle fort aimable et dont la
conversation était un plaisir de plus, à table on m’avait fait choix d’un
voisin tres aimable dit-on, un Lion de Bellecour Mr de
Latour, mais comme les grands seigneurs et les hommes à la mode font peu de
frais pour les autres j’aurais bien mieux aimé certain vieillard fort gai et
qui seul faisait des frais pour animer la réunion j’etais entouré d’un
groupe de jeunes gens de la noblesse, tous ensemble ne valaient pas à coup sur,
l’aimable vieillard, eux mêmes lui rendais cette [p. 3] justice,
quand au vicomte d’Arloz il était charmant, mais si son amour débordait il m’amusait
beaucoup à observer.
Les amis ne lui épargnaient pas les plaisanteries, un d’entreux
improvisat même une chanson burlesque à ce sujet qui provoqua des explosion de
rires. Enfin Cher Pere j’ai passé jeudi une journée agreable ; j’avais
une toilette charmante ; et il y en avait de magnifiques, s’en
parler de la mariée Qui était resplendissante.
Notre chere voisine aura fait les chôses plus modestement je
présume, comme pour Mme Ardaillon l’heure de la séparation sera
cruelle ; les pauvres parents ce jour la subissent une épreuve
douloureuse ; je comprends ces déchirements, pour Mme Pion ;
il sera plus terrible encore, le départ pour Florence m’épouvante pour cette
pauvre mère
Veuillez donc me donner quelques détails à ce sujet Cher
Pere, je lui ecrirai plus tard, quand elle sera plus calme, le bonheur de sa
fille sera je l’espère son immense compensation le caractère de son neveu
doit lui être bien connu comme sa position. [p. 4] Mes enfans vont
bien Josephine a été bien heureuse de son séjour à Lyon et à la campagne de
Mme Richard, le feu d’artifice de la St Philippe l’avait
transporté, pour le lui faire voir Marc et moi nous nous faisions écraser dans
la foule ; elle était éffrayante sur le quai ce jour là. Nous avons du
reste un Eté anticipé qui favorise tout admirablement, malgré le
besoin qu’on commence à avoir de la pluie je ne puis me décider à la
désirer.
J’ai vu Pauline au sacré cœur elle me reçoit toujours
avec beaucoup d’affection ; nous avons passé agréablement une heure
ensemble à causer de la famille ; en nous promenant seules dans le
parc qui est magnifique.
Le dernier concert d’Hector a eu de brillants et sonnants
résultats d’apres les Débats, je présume qu’on vous l’aura fait lire à
cette occasion. La derniere lettre de Nancy était triste l’état de Mme
Pochin la désole ; c’est un lourd fardeau que cette malheureuse femme,
elle me pèse cruellement pour Nancy.
Je pense que Mr Blanc va mieux Nancy saurait bien
si son état donnait de l’inquiétude, et elle ne m’en dis rien, Méline me
préoccupe beaucoup je voudrais bien savoir que l’etat de son mari ne l’inquiete
plus
[p. 5] Madame Thomas qui se promettait tant de
joie de ce voyage de sa fille à Paris aura eu de penibles angoisses si vraiment
son gendre a été gravement malade ; ainsi toutes les joies sont
incomplêtes dans ce pauvre monde, un moment de bonheur éffraye !……
Adieu Cher pere Marc m’appelle pour déjeuner, si ma
lettre pouvait vous distraire un instant de l’ennui du dimanche je serais bien
contente.
Nous vous embrassons tous bien tendrement Josephine voudrait
bien raconter a son bon papa et à Monique son [...]age à Lyon, elle ne
tari[.] pas sur ce chapitre, ses relations [.]ont tres comiques ; elle avait
fait la conquête de tous les gens de l’hôtel du commerce par sa gentillesse
cette chere petite est notre joie et sa sœur de même bien entendu
Adieu encore Cher pere je bavarde trop aujourd’hui
votre affectionnée fille
A S
[p. 6] [adresse]
Monsieur
Monsieur Berlioz
La Côte St André
Isère
2011.02.183 | Mardi 16 ou mercredi 17 juillet 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | Image |
Sept pages en tout (deux feuillets de quatre pages chacun, les trois premières pages du deuxième feuillet écrites, adresse à la quatrième). Timbres postaux: AIX-LES-BAINS, sans date; SA** I PONT-DE-B., 18 JUIL. (18)44; VOREPPE, 18 JUIL. (année illisible).
Aix Mercredi 16 Juillet
J’ai trouvé ta lettre ici avant hier
soir à mon retour de Geneve Chere Sœur, et je suis tres disposée à y
répondre longuement comme tu me le demandes, j’ai tant à te dire, qu’il me
faudrait une main de papier pour y suffire, cependant j’ai eu un revers de
médaille tres triste ce matin à mon délicieux voyage en Suisse ; c’est
le départ de mon bon mari, tu peux deviner chere sœur l’imprèssion que j’èprouve
en me retrouvant seule ici, j’ai le cœur gros à étouffer, Marc avait une
peine si grande a me laisser que j’ai été obligée de faire la forte
pour lui donner courage ; la raison nous disait bien haut que quinze
jours loin de nos chers enfants, et de nos affaires étaient beaucoup ;
j’attendrai une lettre dâté de St Chamond avec une impatience
dévorante, j’ai soif de détails sur mes mignones qui vont bien du reste à
ce qu’on m’ecrivait.
J’ai pris ce matin ma 5ème douches je vais à merveille ;
en dépit de mon excursion à Chamonix et à la Mer de Glace !…… la
tentation était trop forte pour résister à faire [p. 2] cette
ravissante promenade, il faisait un temps admirable, une route superbe ;
figure toi Ma Chere qu’on monte à Chamonix en voiture avec des chevaux de
poste, et la moitié de la route est comme une allée de jardin, c’était à
ne pas y croire vraiment, notre caleche était découverte et nous roulions
rapidement au milieu d’un paysage enchanteur.
Que je te regrettais Ma bonne sœur toi si bien faite pour
jouir de ce qui est grand et beau ; mon imagination n’avait
rien de Chamonix au mont auvers
c’est une véritable
ascension éffrayante dit-on dans certain passage, mais pour moi j’avais
bien autre chôse à faire que d’avoir peur ; il y avait des moments ou
le panorama que j’avais sous les yeux etait tellement admirable qu’au risque
de me rompre le col je lachais la bride de mon mulet pour joindre les mains dans
une extase d’admiration !…… arrivé à la mer de glace ce spectacle
est tellement sublime que si j’avais été seule mon prémier mouvement aurait été
de me mettre à genoux Je n’avais rien imaginé de pareil et j’en jouissais
avec mon ardeur de quinze ans [p. 3] à gauche le Mont blanc ce
géant des montagnes avec sa croupe blanche, à droite la Mer de glace ;
devant moi la ravissante vallée avec son petit village si propre l’Eglise si
pittoresquement placée, le tintement de la cloche dans le lointain le torrent
de l’Arva serpentant dans la
vallée comme un immense ruban, et dont les eaux blanche et écumeuse comme du
lait, font un effet extraordinaire ; la promenade sur la mer de glace m’a
ravie, mais il y avait trop de monde, d’Anglais surtout avec leur
physionomies impassibles c’est un fléau que ces touristes de
profession ; ils envahissent tout, il y en avait aumoins cinquante !..
Ma compagne de voyage a doublé pour moi le plaisir de cette course jeune,
aimable enthousiaste, nous nous comprenions à merveille, et ne pouvions
assez nous féliciter du heureux hasard qui nous avait réunis partis ensemble
dans la diligence d’aix à geneve ; allant de même a Chamonix Mr du
Corail (le pere de la jeune
personne) me proposas de nous réunir faire route ensemble jusqu’au bout [p. 4]
ce que nous acceptames avec empressement c’est un homme fort aimable, d’une
gaité douce et charmant au possible pour un compagnon de voyage, il connaissait
les amis de nos amis, il habite Riom et mon admiration pour la Limagne
que j’avais parcourue il y a trois ans lui avais gagné le cœur, je lui
trouvais une ressemblance étonnante avec mon Oncle comme lui ancien militaire
homme du monde par excellence, bon
gaie, et ses traits même avaient beaucoup de rapports avec ceux de mon oncle ;
je conserverai de sa fille la jolie Mathilde un souvenir bien agréable ;
en nous disant adieu nous nous sommes promis de nous retrouver absolument de
maniere ou d’autre
Nous logions ensemble à Geneve dans la meme chambre à
Chamonix et a Sallanche ; Dimanche nous sommes allés à Lausanne j’ai
été ravie de cette ville, et je ne sais si je ne prefererais pas encore mieux
l’habiter que Geneve ? cependant j’ai trouvé cette derniere aussi
delicieuse que la premiere fois, nous l’avons parcouru dans tous les sens
pendant deux jours ; sans omettre un Magasin. [p. 5] J’y ai
acheté un robe de foulard superbe d’étoffe et tres jolie pour 57 tt
7 aunes de la grande largeur, quelle difference en France ?… a
mon retour ici j’ai trouvé la pension beaucoup plus nombreuse Mr
Marc
etait partis, il avait jugé a propos de me reconnaitre, et de me demander de
tes nouvelles comme de la femme la plus aimable qu’il ait jamais
rencontré !. hem !..
Litz ne vient point comme on l’avait annoncé, on parlait aussi de Mr de
Chateaubriand mais ce sera une autre déception.
Ce que tu me dis d’Hector m’a navrée pauvre frere qu’il
paye cher son erreur, il faut qu’il souffre cruellement pour se plaindre à
toi, j’attends avec impatience des nouvelles de son concert monstres, j’ai lu
à Geneve un article du Charivari fort plaisant à ce sujet … j’ecrirai à
mon Oncle J’ai à la pension une de ses anciennes connaissances Melle
Victoire de Semeville (dit
Selignon) elle est fort aimable pour moi et m’a proposé de me chaperoner au
bal du cercle apres le départ de mon mari.
Génèralement on trouve Aix moins brillans que l’an
dernier, cependant [p. 6] on commence à s’animer un peu on a
dansé la polka dimanche, j’ai eu un regret extreme de ne pas y être les
journaux nous parlent depuis si long temps de cette danse que j’aurais été
curieuse de la voir
Malheureusement le polkeur est partis et la polkeuse ne
trouvera peut etre pas son pareil.
Je suis encore ici pour une quinzaine qui me paraitra longue,
mais il faut faire complêtement ma saison puisque je suis venue pour cela, Melle
Salomon ne me gène nullement elle est d’une discrétion parfaite
Mes vieilles dames me gâtent elles ons eu la bonté de me
dire mille chôses aimables à mon retour je fais des frais énormes pour elles,
et pour la charmante dame blonde dont je t’ai parlé.
Je te parlerai de tout ce monde le plus que tu ne
voudras Chere sœur je n’ai garde de renoncer au plaisir de se voir à St
Vincent, je voudrais voir nos parents et nos amis de Grenoble en passant ou bien
revenir avec toi un jour de St Vincent ce qui serait mieux [p. 7]
d’apres mon calcul je partirais d’ici de demain en quinze a peu pres, je
passerais un jour à Grenoble un a St Vincent, deux aussi a la Côte,
et apres cinq semaines d’absence je m’acheminerais enfin pres de mes
chers tresors ; Mme Pion m’a fait donner avant hier de bonnes
nouvelles de notre bon pere en écrivant à Melle Salomon, elle a
reçu de celles de sa fille Celine, elle était arriveé au bon port dans le
lieu de sa résidence
Je viens d’interrompre ma lettre pour en lire une du clerc
de mon mari mes enfans se portent à merveille, j’avais besoin de cette
certitude aujourd’hui plus que jamais
Adieu Chere Sœur la main me fait mal, tu auras de quoi lire
en te promenant sous tes frais ombrages, prepare tes bosquets pour me recevoir
je te prie, je serai difficile j’ai vu de si delicieux jardins à Geneve Mes
amitiés à Camille une bonne caresses à Mathilde, dis moi quand tu m’ecriras
si on a découvert les voleurs sacrileges du Toulanil ?
toute à toi A S
[p. 8] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
Voreppe par Grenoble
France
Isère
2011.02.184 | Vendredi 26 ou samedi 27 juillet 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, adresse à la dernière; petite déchirure à la troisième page au milieu à droite. Timbres postaux: AIX-LES-BAINS, sans date; SA** I PONT-DE-B., 28 JUIL. (18)44; VOREPPE, 28 JUIL. (18)44.
Aix Samedi 26 Juillet
Il me tarde bien Ma bonne sœur d’aller
me reposer aupres de toi de la vie agitée que je mène ; il y a des jours ou il me
semble que j’ai le vertige cependant loin de mon mari et de mes enfant je ne
saurais autrement prendre patience qu’en m’étourdissant, l’epreuve est bien longue
chere sœur, et chaque soir en me retrouvant seule dans ma petite chambre ;
le regret me prend si fort que j’ai bien de la peine à m’endormir, pour m’aider
a prendre patience j’ai vu arriver hier avec bonheur Mr et Mme
Burin dans notre pension, Adele
est toujours gentille, gracieuse comme a son aimable habitude, son mari n’est
pas plus malade, cependant il a perdu sa mère brusquement il y a un mois et
cela lui avais donné une violente secousse
J’ai aussi ici la famille Ardaillon bien que ces dames ne
soient pas chez Mme Saugie
nous faisons tous les jours des promenades ensembles et nous nous retrouvons le
soir au cercle, notre société tiens tous le [p. 2] un côté du grand Salon c’est charmant nous sommes
maintenant aussi tres nombreux à table 45 personnes aumoins
J’ai perd abdiqué mon titre de l’Elegante
de la pension ; ne ris pas chere sœur mais en depit de moi on me l’avait donné ;
il est vrais de dîre qu’il n’y avait que des vieilles dames et des ci devant
jeunes personnes dans le genre de Melle Victoire, ainsi ce n’etait
pas un trop brillant triomphe que d’être la merveilleuse et la jeune ;
du reste il est temps que je parte mes provisions de toilettes sont épuisées
complêtement, je suis cruellement lasse de depenser de l’argent chere sœur
cela ne t’étonneras point tu dois te souvenir comme il file ici, c’est à
avoir des remords en depit de tout ce que mon Cher Marc m’ecris d’aimable
pour me rassurer à ce sujet
Nos cheres petites vont toujours tres bien, ma Nancy dis tout
le jour « sotte Maman a laissè petite » tu vois qu’elle commence
a avoir un vocabulaire plus étendu que lorsque j’etais à la Côte
Josephine prend mon parti contre sa sœur, et prétend que je
ne suis point [p. 3] sotte mais que c’est pour me guerir que je
suis partis ; ces petits details m’intéressent si fort chere sœur que j’oublie que tu ne
peus y
trouver le même charme.
Mon projet est de partir Samedi à moins que ma compagne de
voyage Melle Salomon soit obligée de retarder ce qui pourrais être,
comme je prefererais ne point faire la route seule j’attendrais un jour dans
ce cas la je t’ecrirai pour t’en prévenir, pour ne pas te faire venir à
Grenoble inutilement
Je serai bien heureuse de t’embrasser en descendant de
diligence ainsi donc chere sœur j’aurai ce plaisir le sam[...] sauf
a moins que je ne te don[lacune]
contraire ; je passerai le dimanche et le lundi chez toi j’espère ;
j’avais écris à mon pere il y a quelques jours un peu brievement pensant que
tu lui aurais envoyé ma longue lettre sur Chamonix
Je ne puis suffire à ma correspondance tous les jours je
fais un éffort pour écrire aux uns ou aux autres, et cependant je suis encore
en arriére avec mon oncle ; avec l’affreuse chaleur, et les douches qui
affaiblissent c’est un travail que de prendre ma plume ainsi je la quitte
chere sœur dans l’espoir de me dédommager bientôt [p. 4] en
babillant longuement avec toi
Le concert d’Hector est renvoyé d’apres les
debats …
On nous avait annoncé ici Mr de Chateaubrians, mais il parait qu’il
ne viendra point, le Prince et la Princesse d’Orange ont traversé Aix la
semaine derniere, ils ont de drôles de tournures.
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Voreppe
près Grenoble Isère
France
[au bas de la page sous l’adresse]
Je suis allée visiter le fameux chateau de
Lemathe avec Mme de
Nantes la femme de ton Mr de Nantes, le pauvre homme Son depis la cruellement servis, il est impossible de voir une femme plus commune
au moral et au physique cela te ferais de la peine vraiment !.
Mille chôses à ton mari et a ta fille
Je t’embrasse bien tendrement
toute à toi
A S
2011.02.185 | Jeudi 22 août 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | Image |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée, adresse à la dernière). Écriture plus régulière et lisible que d’habitude. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 22 AOUT (18)44; LYON, 23 AOUT (18)44; VOREPPE, 24 AOUT (18)44.
St Chamond jeudi 22 aoust
Je voulais t’ecrires il y a plusieurs
jours Chère Sœur, mais depuis jeudi dernier j’ai souffert des douleurs de
dents si horribles que je n’etais pas capable d’autre chôse que de gémir,
et de pleurer, j’ai passé deux nuits à me rouler parterre au pied de la
lettre, et j’attendais le jour pour envoyer chercher le medecin et me faire
arracher ma mauvaise dent quand enfin l’enflure survenue,
la douleur a cessé et je me suis endormi d’un sommeil profond, à midi comme
je me levais dimanche toute brisée encore de ma torture mon mari vint me dire
que Mr Rastaing
arrivait, cette visite n’étais pas propre à me faire du bien ; le
pauvre homme a un desespoir incroyable en me voyant il éclata en sanglots et me
fit tant pleurer que je fus obligée de me recoucher dans l’apres midi, tu
sais ma bonne sœur combien je suis accessible aux [p. 2] idées
tristes et lugubres, ma sympathie ne peut jamais manquer à ceux qui sont dans
la douleur, le pauvre Monsieur Rastaing était touchant en parlant de sa
femme ;
il lui a rendu les soins les plus éxaltés,
l’a fait enterrer à Lyon a coté de sa fille, et ne l’a pas quitté morte
…..
je ne l’aurais jamais cru susceptible d’un desespoir si
violent, le même soir il a voulu coucher dans le lit ou sa femme était morte,
et n’a rien touché dans l’appartement.
depuis ma derniere lettre ma Josephine a été encore tres
souffrante je m’en suis fort tourmenté, depuis deux jours enfin elle va bien,
et cette irritation d’entrailles semble avoir cedée au régime rafraichissant
que nous lui faisons suivre avec les soins les plus minutieux, bains, lavement
nourriture legère, tels sont les seuls remèdes, mais elle avait une mine si
pâle que je ne pouvais la regarder sans pleurer, elle me semble un peu moins
verte maintenant, et a repris toute sa gaité indice certain [p. 3]
quelle va mieux ; tu vois ma bonne sœur qu’a peine arrivée je me suis
vite remise à mon [mot biffé] ordinaire
de soucis et de tourments, le repos, et la distraction de la vie des eaux m’avaient
aumoins redonnés des forces pour continuer.
L’état de ma pauvre belle sœur est une préoccupation
bien douloureuse, les lettres que nous recevons sont peu rassurantes, et je n’ose
plus les ouvrir qu’en tremblant ; elle a des vomissements, un dévoiement
presque continuel, des coliques affreuses, tout cela sont des symtômes
funestes pour elle surtout si faible par nature
Marc est bien attristé de l’état de sa sœur, je n’ose
pas lui en parler même je vois toujours si noir que je ne saurais rien lui dire
de tranquillisant.
Ton mari j’espère est parfaitement remis de son
indisposition maintenant le temps étant moins chaud ses courses à Grenoble le
fatigueront moins, sa santé s’en trouvera mieux.
Tu as peut être Mme Pochin chez toi, il vaut
mieux la posseder que de l’attendre ; on est plus pres de la regretter
…………
[p. 4] dis à ma Chere Mathilde que sa lettre m’a
fait grand plaisir, quand au mouchoir de poche de la poupée c’est un petit
chef d’œuvre qui a transporté Josephine de joie ; elle en remercie tendrement
sa cousine ; je suis touchée des regrets que cette chere petite avait
témoigné apres mon départ je voudrais bien esperer l’avoir un jour ici pour
la gâter à mon aise, mais les filles uniques sont des trésors qu’on n’ose
expôser sur les chemins de fer, ainsi je n’aurai jamais ce plaisir là. J’ai
vu Mr Perret qui m’a
longuement parlé d’Hector il savait tout mais a mis beaucoup de tact a
glisser sur certain point Hector lui avait fait une peine extrème mais plus
encore le petit Louis il a trouvé à cet enfant un air de tristesse extrème ;
il me disait que son éducation souffrirait étrangement si on le laissait si
pres de sa mère que ce spectacle, et cet exemple même pouvaient avoir
de graves conséquences il croyait même qu’Hector desirerait l’éloigner !
…. je le comprends [p. 5] comme il doit retourner a Paris au mois
d’Octobre nous lui avons dis que si Hector lui en parlait, d’accepter en
notre nom ; je serais soulagée de savoir ce pauvre petit pres de moi
à Lyon par éxemple, si son pere voulait il ne lui en couterait peut être pas
même si cher au college que dans sa pension de Paris ?
Voila Chere amie un triste sujet de reflexions s’il en fut ;
mais si Hector part pour l’Allemagne que deviendrait le pauvre petit s’il ne
nous l’envoi[...]
La nomination de Mr Burdet [...]
étonnée, à la place d’Odile je serais peu empressée de revenir à Grenoble
dans ce moment, apres un scandale pareil j’aurais mieux aimé rester plus
loin, elle ne pense pas de même à coup sur ….
Je n’ai point de nouvelles de mon pere depuis que je l’ai
quitté ecris moi donc je te prie si tu es plus favorisée Adieu Chere Sœur je
t’envie ta verte montagne et tes frais ombrages pour mes cheres fillettes plus
encore que pour moi toutes deux seraient si heures
de rouler [p. 6] dans
ton allée de noyer, mais patience un jour viendra bien peut être ou elles
auront de l’air, et de l’herbe à discrétion. Notre pauvre neveu en a
bien
moins encore et j’en voudrais pour tous
Sais tu que le duc de Nemours a envoyé à Hector un vase de
porcelaine de Sèvres ?…
[adresse ici au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
a Voreppe
par Grenoble
Isère
[au bas de la page sous l’adresse]
Mes compliments aux dames Gagnon en retour de tout ce quelles ont bien voulu te dire d’aimable sur mon compte ; as tu eu Mme Olonce à diner comme tu le voulais ? J’embrasse tendrement ton mari et ta fille adieu encore Chere Sœur Marc est de moitié aussi dans le baiser que je t’adresse
adieu adieu A S
2011.02.186 et enveloppe 2011.02.187 |
Dimanche 8 septembre 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages. Écriture assez négligée. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) ST-CHAMOND, 8 SEPT. (18)44; (verso) LYON, 8 SEPT. (année illisible); VOREPPE, 10 SEPT. (18)44.
St Chamond Dimanche
Je jouis pour toi Chere sœur du temps ravîssant que nous avons depuis quelques jours Si il continue tu partiras avec
regret pour la Côte ; je ne comprends pas comment mon pere t’attendait
avant le 15 Septembre, il me semble que je lui avais dis cela fort positement
en passant à la Côte ; il m’a écris il y a peu de jours ; une lettre
assez décousue ; sa santé n’allait pas mal c’est l’éssentiel,
votre arrivée est son idée fixe vous êtes si aimables tous tant
que vous êtes que je comprends à merveille son empressement j’espère que tu
trouveras nos bonnes voisines propres à te donner un peu de distraction par
leurs fréquentes visites, leurs tribulations sont enfin finies j’en suis
soulagée. Pour nous ma chere nous n’avons plus qu’une pensée c’est
l’état de ma pauvre belle sœur nous recevons tous les deux jours des lettres
qui nous alarment cruellement. Je ne vois plus arriver le facteur sans un
battement de cœur horrible [p. 2] je vois pâlir mon bon Marc
chaque fois qu’il ouvre une lettre de Beaurepaire je ne puis te dire à quel
point je suis attristé des souffrances de notre chere Louise, j’y pense nuit
et jour, et je suis bien peu propre à donner bon espoir à ses filles, je leur
écris sans cesse, mais sans avoir la force de dissimuler mes tristes
prévisions, ces pauvres enfants perdront tout en perdant leur
mère, Seraphine la fille
de M. Lecointe qui est un ange de
vertu et qui adore sa belle mère sera leur seul et frêle appui, elle m’écris
des lettres déchirantes, elle prévois la tâche immense que la providence va
lui impôser, elle en est épouvantée, Son père ne sera bon à rien s’il perd
sa femme et il en vieillira de dix ans ;
Je ne vois que des gens tristes et dieu sait que je suis
très accèssible à partager les impressions de ce genre Mme de Morgues
a perdu son enfant apres l’avoir vu deux mois à l’agonie cette pauvre femme
m’a bien fait pleurer aussi, apres tant de souffrances n’avoir plus rien c’est
cruel, elle va partir pour le dauphiné, j’en serai [p. 3]
soulagée je la voyais souvent depuis quelques temps je la comprenais si bien
que mes visites la soulageait.
Mr Jules Richard c’est enfin marié la semaine derniere avec son
héritiére ; on l’a dit extremement aimable, et j’espère
que ce sera une ressoure de société
pour moi, elle remplacera un peu Mme Louise. Les dames Ardaillon sont
encore à Gl**d Si j’avais
le loisir
d’y songer je me trouverais un peu isolée dans ce moment mais le temps passe
pour moi avec une rapidité incroyable ; Marc a été tres souffrant
pendant huit jours, il avait des colliques et une grande irritation d’entrailles
je commencais à m’inquièter tout a fait quand son indisposition a enfin
cédé Mes enfans vont à merveille je les fait jouir le plus possible de ce
beau temps en les envoyant toutes les après midi à Rigondie
chez la nourrice de Nancy,
elles sont tres entrain aujourd’hui d’aller voir le feux d’artifice ;
c’est la féte patronale de la ville et le Maire pour attirer le plus de
curieux possible a fait de grands frais, il y a un orchestre excellent danse
sur la place, mât de cocagne [p. 4] illuminations, et enfin
un tres beau feu d’artifice, ce dont je jouirai extremement pour mes fillettes
Josephine trouve la nuit bien longue à venir, son entrain est plaisant elle ne
bouge de la fenètre pour voir circuler la foule, les rues de St Chamond si
désertes ordinairement sont tres animées aujourd’hui.
J’ai écris à mon Oncle mais pour me punir à bon droit
de mon long silence il ne m’a point encore répondu
J’ignore si Hector est partis pour Bade sa lettre m’avait
attristé profondement et inquiété pour sa santé sur tout, de si immenses
fatigues ; des déceptions au bout, et un ronge cœur comme le sien pour se
repôser, il faudrait une organisation de fer pour resister.
Tu as payé ton tribut à Mme Pochin je t’en
fais mon compliment, ta dernière lettre était évidemment écrite sous son
influence.
Adieu chere sœur dis moi donc comment s’est passée ton entrevue ;
ce projet de mariages réussira-t-il ? en attendant Victor n’a encore
rien obtenu j’en suis tres fachée je souhaite fort que Francois se rapproche
de gl** afin que ton reve puisse se réaliser, en attendant j’embrasse bien ma
chere niece et le futur beau pere adieu adieu
ton affectionnée sœur
AS
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
Voreppe
par Grenoble Isère
2011.02.188 et enveloppe 2011.02.189 |
Samedi 21 septembre 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout (un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée écrite des deux côtés). Écriture assez négligée. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) ST-CHAMOND, 21 SEPT. (18)44; (verso) LA COTE ST-ANDRE, 22 SEPT. (18)44.
St Chamond Samedi 21 7bre
Je n’aurai garde de mériter encore tes
reproches Chere sœur, tu m’as si bien prouvé que j’étais indigne de ton
aimable exactitude à laquelle j’attache cependant tant de prix que la crainte
de recevoir moins souvent tes lettres me stimulera ; je t’observerai seulement que tu
as toujours beaucoup
plus à dire que moi chere sœur, tu sais que tu m’interresseras en me parlant
longuement de nos amies et parents, tu as une source de nouvelles intarrissable ;
je suis tres pauvre au contraste, et tres convaincue que ce qui remplit ma vie
modeste et paîsîble n’est pas dîgne d’attirer ton attention ; je n’aime
pas à parler sans cesse des gentillesses de mes cheres petites, je comprends qu’il
n’y a que mon mari qui trouve toujours le sujet digne d’attention. Je ne
serais pas du système de Madame Blanc qui veut sans pitié pour ceux qui l’entourent
occuper exclusîvement de son enfant, c’est du [p. 2] reste
une tres mauvaise politique ; elle rendra son petit George aussi ennuieux
quelle était elle même dans son enfance, ce serais grand dommage de le
gâter ainsi je la plains sincerement d’être enceinte c’est trop tôt, mais
je la tiens pour extravagante si elle prend une nourrice chez elle ; c’est
une énorme depense, et plus énorme encore embarras avec un petit appartement
comme le sien et un enfant si jeune que l’ainé
Enfin chacun comprends les chôses à sa manière, et nous nous critiquons tous
à tour de rôle dans ce pauvre monde.
J’avais appris la mort de Mr Julhiet par le
Journal de Lyon ; et j’avais été bien préoccupée de sa femme ;
il me tardais que tu m’apprîsses si quelqu’un de sa famille l’avait
entourée dans ce moment terrible ; la bonne Mme Thomas étais
celle qui pouvais le mieux la comprendre la présence de son fils cadet, etait
bien necessaire aussi à cette pauvre femme ; à son retour a Valence elle
ne sera pas accueillis si
affreusement seule, les soins quelle donnait à son
mari avec tant de dévouement remplissait sa vie, l’espoir la soutenait
toujours [p. 3] je crains pour elle maintenant la réaction de six
ans d’épreuves, le courage le mieux trempé a des bornes ; mais la
providence la récompensera j’espère de tant de souffrances ; je suis
sûre chere sœur que tu serais empressée d’aller conforter la pauvre amie son
malheur est de ceux maintenant dont on peut parler sans blesser, peut être
penses tu à aller à Valence de la Côte
Je te remercie de tout l’interet que tu me témoignes pour
ma belle sœur je suis heureuse de t’apprendre qu’elle va mieux, c’est une
véritable résurrection à laquelle nous osons à peine croire encore mais
depuis longues années son existence est un miracle ; chacun de ses enfans
et elle en a fait cinq l’ont mise au porte du tombeau puis les
souffrances morales agissent sî vivement chez cette bonne Louise qu’elle est
usée par tous les bouts Sa vie n’a été qu’un long sacrifice ; mais
elle est si necessaire à sa famille que dieu veuille la laisser encore
augmenter ses trésors de mérites
Marc a été tres sensible a tout ce que tu lui disais d’affectueux
à ce sujet, il me charge de t’en remercier [p. 4] Nous n’avons
point recu de lettres de Beaurepaire depuis huit jours ; et on nous
écrivait tous les courriers avant que son état ne se fut amélioré, et nous
en concluons que le mieux se soutiens.
En commencant ta derniere lettre Chere Sœur tu m’avais
presque éffrayée en me disant que notre bon pere étais souffrans, et couché
au moment de ton arrivée, heureusement en tournant la page tu me rassurais ;
maintenant ta présence sera un beaume salutaire il me tarde pour tous que ton
mari vienne vous joindre ; les vendanges lui laisseront quelques jours
encore de liberté je présume.
Tu seras d’un grand secours à Mme Pion pour
distraire Nancy, mais un mari serait encore ce qui réussirait le
mieux mais je ne me charge pas de la lui trouver, je crains quelle ne trouve pas si
bien que sa sœur, ses vapeurs
ne sont pas encourageantes .....
La pauvre mere est peut être bien faible mais nous en ferions toute de même en
pareil cas probablement toi la prémiere ; la santé de ta fille a été
si brillante jusqu’a présent que tu ne peus [p. 5] juger de ce
que tu ferais si elle te donnait de l’inquiétude.
L’adresse d’Henriette est bien (rue des Imbergeres
no 4 à Sceaux)
Je n’ose croire à l’espoir de mon Oncle pour le
bienheureux grade en question c’est une question immense pour
son avenir, et je craindrais bien le grand cordon pour tout honneur, tiens moi
au courant exactement à ce sujet je te prie
J’ai eu l’espoir de voir Mme Munet
vendredi dernier elle m’ecrivis pour me dire d’aller l’attendre le
lendemain au premier convois du chemin de fer Mon empressement était extrème je
n’eus garde de ne pas y aller une heure d’avance … mais point de Sophie Je
suis allée aussi quatre fois de suite envain, inquiète de ce manque de parole
je lui ai écris mais point de réponse !… et tu te plains de moi chere sœur
que ferais tu donc avec une femme comme Mme Munet ?
elle est désesperante pour ses amies vraiment
J’ai une grande rage
d’ouvrage dans ce moment je brode, je fais des bourses je tricotte le soir un
petit bonnet pour Nancy au fil d’Ecosse tres fin [p. 6] avec des
jours
variés, c’est joli est amusant les leçons de Josephine m’occupent
[mot biffé] régulierement, je deviens un peu cuisiniere
par force aussi, sous peine de mourir de faim il faus m’en mêler souvent et
je m’étonne moi même d’honneur !
Ma Nancy nous amuse beaucoup elle babille comme quatre ;
elle a une vanité comique, elle me demande tous les jours des fauchettes (manchettes)
et une bague conçois tu cet atôme ? si sa sœur avait un bout de ruban de
plus quelle ce serais un désespoir, rien ne lui échappe ; elle est d’une
malice diabolique, et ne se laisse jamais oublier ce n’est plus du tous le
même caractère que Josephine ; elle a déjà des idées à elle
tres arretées et n’hésite jamais ; je crois quelle me donnera du fil à
retordre si je puis m’exprimer ainsi, enfin Marc et moi nous les trouvons
adorables mais je ne les gâte pas remarque que je ne dis pas nous car leur pere
est faible pour elles au dernier point. adieu chere sœur n’oublie pas de faire
mes amitiés en masse a toute la maison d’abord puis aux Pion et Veyron
specialement j’embrasse Mathilde
toute a toi A S
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
La Côte St André
Isère
2011.02.190 | Mercredi 23 octobre 1844 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | Image |
Cinq pages en tout, un feuillet de quatre pages plus une feuille avec une page écrite et l’adresse à la dernière. Timbres postaux: ST-CHAMOND, 23 OCT. (18)44; LA COTE ST-ANDRE, 24 OCT. (18)44.
St Chamond Mercredi 23 Octobre
Je commencais à m’inquiéter de ton
silence Chere sœur, tu as raison les louanges perdent les plus sages ; en
voilà la preuve ; et j’étais déterminée à t’ecrire ce matin que le
courrier m’apporte ou non une lettre de toi, j’en avais reçu une d’Hector
deux heures avant la tienne que j’avais hâte de te communiquer pensant avec
raison que tu étais inquiète ; il était arrivé a Paris la veille, et ne
me dit pas d’ou il vient ni dans quel but, pas un mot de Louis
non plus ni des propositions que je lui avais faites à son sujet. tu
conviendras qu’il y a de quoi irriter si ce n’est décourager de recevoir
des nouvelles si incomplêtes, il n’est pas faiseur de feuilletons pour rien ;
il laisse toujours la suite a un autre jour ! …..
Il me charge de te dire de lui envoyer sa pension a Paris
rue de Londres 31 comme par le passé, il esperait décider Henriette à rester
á Sceaux [dans la marge à gauche, verticalement de haut en bas] dis nous je
te prie a quelle epoque Faure
donnera de l’argent. [p. 2] c’etait plus économique et plus
commode tu comprends Chere sœur, mais il a éssayé envain toute
son éloquence et il se résigne à reprendre son ancien appartement,
voila donc un démenagement nouveau et dispendieux apres un voyage inutile à ce
qu’il paraîtrais par le ton de sa lettre qui annonce un grand découragement
de toutes chôses ; elle m’a fait une bien triste impression. Je le
croyais au fond de l’Allemagne et grande a été ma surprise en voyant le
timbre de Paris.
Je ne sais si mon Oncle ne nous donnera pas quelques détails
[mot biffé] ? il ne parais pas qu’il l’eut vu cependant,
il n’en parle pas, et
tu crois que mon
oncle avais le projet de quitter Paris le 14, et Hector n’y etais arrivé que
le 17, mais je ne lui pardonnerais pas de ne pas être allé a Sceaux voir
Henriette et Louis surtout apres tes reccommandations à ce sujet, nous
saurons cela bientôt.
[p. 3] Je te fais mon compliment sincère du
retour de ton mari, je comprends que pour tous deux cette separation devait
paraître bien longue et bien triste, je jouirai ce soir en pensant à
vous de vous savoir enfin réunis au coin du feu, le temps est si
affreusement triste et froid depuis plusieurs jours qu’on a bien besoin d’être
ensemble pour en supporter le poid,
et l’ennui, je vois toujours arriver l’hiver avec un serrement de cœur extrême
il me faut le soleil pour me ranimer, au moral comme au physique il est vrai que
j’avais eu tant
[mot biffé] de tribulations l’année derniere que j’en ai conservé un
séjour pénible ; mais j’aime à esperer que tout îra mieux pour moi
cette saison nouvelle ; ma jeune bonne se forme, j’en suis tres contente,
mes enfans l’aiment beaucoup ma cuisiniere au contraire nous
fait toujours plus
détestable cuisine, et de plus interminables oraîsons ;
l’un est aussi ennuieux que l’autre ; Marc [p. 4] l’envois
au diable chaque fois qu’il se met à table, et moi je regrette amèrement les
deux cents francs que jui ai promis …. enfin ….
Je te dìrai que mes deux fillettes causaient
tranquillement à côté de moi quand j’ai ouvert ta lettre ; je leur ai
lu le paragraphe qui les concernait, Nancy a compris à merveille que Marthe n’était
pas gentille, et m’a dit « donné à moi bonbon « suis
sage » Josephine pretendait cependant que les ongles de sa sœur étaient
redoutables tres souvent aussi mais pour elle seulement, et qu’elle ne
ferais
jamais cela à une dame et surtout si elle lui donnait des dragées !…
bien quelle soit souvent comme le chien de Jean de Nivelle
Je ne décide point encore a mettre Josephine a l’école
cet hiver, je lui fais dîre sa leçon régulierement elle a beaucoup de zèle ;
elle veut que Mathilde sache ainsi que son bon papa qu’elle sait 17
departement outre les capitales de l’Europe ce dont elle est tres fiere ;
il n’y a pas de quoi tu conviendras.
[p. 5] J’oubliais aussi quelle commence à
faire un ourlet, Mathilde sourira de pitié mais voila ma commission faite
Tu as réveillé d’anciens souvenirs Chere sœur en me
parlant de Mr Tréfont
lui et dada n’etaient il pas
mes danseurs en titre ; et on n’oublie point
son jeune temps sî vite le pauvre capitaine a été cruellement éprouvé par le
malheur à ce qu’il parait dix ans d’absence laisse bien des places
vides !… je l’aurais revu avec plaisir je t’assure, Mr
Amedée m’aurais surpris aussi bien agréablem[...] s’il avais pu s’arreter
ici en pass[...] si son voyage en Auvergne lui avait fais plaisir il aurait
trouvé de l’écho chez nous à coup sur. Mme Charmeil est peut
être à Vienne, cependant j’ai su que le pere Almeras
était tres peu satisfait du mariage de son fils Mme Octavie
lui gagnera le cœur bien vite sans doute.
Adieu Chere sœur Marc m’attend pour déjeuner, et mon
papier fuit, je veus cependant te charger encore de mille tendresses pour notre bon
pere, ton mari et ta fille ; fais une visite de ma part aux dames Pion je
te prie.
ton affectionnée sœur
A S
[p. 6] [adresse]
Madame
Madame Camille Pal
La Côte St
André
Isère
2011.02.191 | Lundi 30 décembre 1844 | À son père Louis-Joseph Berlioz | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, les trois premières écrites, adresse à la dernière. Écriture hâtive. Timbres postaux: ST CHAMOND, 31 DEC. (18)44; LYON, 1 JANV. (?) (18)45 (?) (presque illisible); LA COTE ST-ANDRE, 2 JANV. (18)45.
St Chamond 30 Décembre
Je ne veus pas être la dernière à vous
souhaiter une bonne et heureuse année cher pere en dépit de tout l’ennui
que j’ai depuis quelques jours, il serait cruel pour moi de ne point trouver
un instant pour vous écrire ; Ma Chere petite Nancy a eu un accident Samedi
matin qui nous a horriblement éffrayé, mais qui n’aura pas de suite grave je
l’espère, elle est tombée sur le coupeau
d’une plaque en fonte devant le feu de la cuisine, son pied s’est
accroché dans la fente d’une brique et sa joue gauche a frappé au point d’avoir
une affreuse coupure qu’il y a fallu rejoindre avec une épingle et du fil, il
me serait impossible d’exprimer mon bon pere l’angoisse que j’ai éprouvé
en tenant ma pauvre enfant pendant cette petite opération, elle n’a pas
cependant crié comme beaucoup d’autre enfant l’aurait fait. [mot
biffé] maintenant ce qui me tourmente c’est la crainte quelle ne sois marquée [p. 2] cette idée serait insoutenable ; le
medecin me rassure beaucoup, il a reunis
la plaie tres adroitement, puis elle est bien jeune on me cite beaucoup d’accidents
de ce genre qui n’ont pas laissé de traces
Veuillez me dire ce que vous en pensez Cher pere votre
opinion sera pour nous la plus forte de toutes ; on n’a pas encore oté l’épingle,
l’œil est affreusement enflé, et fermé, elle a un peu de fievre la nuit
seulement et s’amuse volontier, le
jour elle est bonne comme un ange cette chere petite elle
n’est point penible malgré son mal
Nous ne la laissons point manger autre chôses que de petits
bouillons par prudence, j’espere que ce regime ne sera pas nécèssaire
long-temps !
Jugé de tout l’ennui que j’ai eu mon bon pere j’attendais
ce malheureux jour cinq personnes de la famille de mon mari de Vienne,
dans mon petis appartemens ce n’est poins un petit embarras de coucher tant de
monde
J’aurais eu malgré cela le plus grand plaisir à les
recevoir dans un [p. 3] moment moins penible pour moi, par surcroit
j’avais une courbature qui me faisait bien souffrir, et n’etais le peu d’envie
que j’avais de faire des frais pour amuser mon monde, aussi Marc a-t-il été bien soulagé de leur depart ce matin eux mêmes étaient désolés de
leur arrivée inopportune, mais comment prévoir une si facheuse circonstance ;
J’arrivais de Lyon ou j’avais passé trois jours tres
agréablement, j’etais enchanté de mon petit voyage, j’avais même
fais des
invitations pour un dîner de dix personnes pour demain, j’ai bien hésité
si je contremanderais nos convives [...]
nos provisions etans faite, nous voulons en profiter, mais il est difficile d’avoir
plus de malencontres à la fois.
Puis le jour de l’an et les visites à faire et a recevoir
en masse tout cela m’agite outre mesure J’espere que ma petite me laissera
dormir cette nuit pour me remettre
Je vous ecrirai encore dans deux ou trois jours cher pere
pour vous donner de ses nouvelles, je vous quitte j’entend quelle m’appelle
et je ne veus point la faire crier
Je vous embrasse bien tendrement ainsi que Marc
Votre affectionnée fille
[p. 4] [adresse]
Monsieur
Monsieur Berlioz
La Côte St
André
Isère
2011.02.192 | Samedi 30 décembre 1843 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Un feuillet de quatre pages, adresse à la dernière. Timbres postaux: ST.CHAMOND, 31 DEC. 18(4*); LYON, 31 DEC. (année presque illisible); GRENOBLE, 2 JANV. (? ) (18)44 (le quantième et l’année sont bien lisibles, mais le nom du mois semble bizarrement écrit à l’envers).
St Chamond 30 Décembre
Embrassons nous Ma bonne sœur en nous
souhaitant à tous réciproquement paix et santé pour l’année qui va
commencer ; ma lettre t’arrivera juste au moment favorable pour t’adresser
les vœux les plus tendres, je n’aurais pas voulu être prévenue par toi bien
Chere sœur je ne suis pas cadette pour rien à mesure que je vieillis je m’attache
a ce titre qui me désolait souvent il y a 15 ans
Mes Enfans sont a la promenade j’en profite vite pour t’écrires,
je suis toujours prodigieusement occupée, le jour de l’an et ses
éxigeances achève de me précipiter les comptes à régler, les Etrennes à
donner les visites, les lettres etc c’est à en avoir la tête brisée ;
et bien plus encore la bourse vide, tout le monde est si riche ici qu’on a
encore fort mauvaise grace à avoir l’air de s’étonner de l’argent qu’il
faut dépenser.
J’ai ma vieille Julie depuis quinze jours bien contente de
l’avoir, elle nous fait d’excellentissimes diner, mais pas davantage Sa
lenteur n’est pas chôse à propos [p. 2] pour moi dans ce moment,
aussi je fais une grande portion de l’ouvrage de la maison ; je ne puis
me résigner à rester tranquille quand je vois du désordre même dans ma
cuisine, le matin tous en portant et trainant mes deux Enfants je mets la main
à tout, et encore bien des chôses sont en retard ce qui me brule le sang, je
deviens vive comme la poudre, et mon mari s’impatiente souvent de me voir
toujours en mouvement
Hier j’ai écris à mon pere, peut être est-il deja pres
de toi ? le froid vif que nous avons depuis huit jours l’aura chassé de
ses champs ; il a du comme moi recevoir une lettre de Louis l’écriture
et l’orthographe m’ont étonné pour son age, mais les idées étaient tres
confuses, c’etait à n’y rien comprendre Sa correspondance avait été trop
nombreuse à ce qu’il parait pour ce cher enfant.
J’ai profité de l’occasion de Mme Souchon qui
arrivera aujourd’hui à Paris pour envoyer quelques jolis rubans à Henriette,
et une pièce d’or à Louis, n’ayant rien su imaginer de mieux, d’autant
que sa mere pourrait lui en acheter quelque chose d’utile ; j’etais
heureuse de trouver [p. 3] une occasion si à propos.
Je fais cette année de la munificence pour mes filles, une petite commode pour
sa poupée (qui n’existe pas) à Josephine et un grand cheval à Nancy, et
tout cela pour la somme de cinq francs, je trouve que c’est énorme et j’en
ai du remors.
Je ne doute pas que tu ne fus
charmante Chere sœur le jour de tes visites avec ta fraiche et riche toilette ;
je suis tres disposée à t’admirer, mais rien pour rien dans ce monde, je
veux que demain tu rendes à ton tour hommage à mon bon gout et au tien puisque
tu [.]’avais aidé à choisir ma robe chez Mr Chabas, elle est
délicieuse fai[..] ma tailleuse a réussis en perfection, je elle est
ai fais garnie avec un seul volant au
biais haut jusqu’au genou, puis
la taille lisse avec une double taille à volonté et un
revers formé par des biais ce qui est simple et tres gracieux et nouveau, puis mon mari m’a fait venir pour
mes Etrennes une capote à coulisses rose garnis d’une plume idem posée en
guirlande d’un gout parfait, et qui ne me vas pas tans mal vraiment toute
décrépite que je suis ; je ne voulais point faire de chapeau cet hiver,
mais l’attention aimable de Marc m’a fait grand plaisir
[p. 4]
On m’interrompt à chaque instant chere sœur, je ne sais plus ce que j’ecris
mieux vaut que je finisse tu n’y perdras pas grand chôse, adieu donc charge
toi de mes amitiés à ton mari, et d’une bonne caresse pour Mathilde
Marc ne veut point être oublié aupres de vous
toute à toi
A
[adresse en dessous au milieu de la page]
Madame
Madame Camille Pal
Rue Neuve
Grenoble
[au bas de la page, sous l’adresse]
Mes compliments bien tendres à Melle
Nancy n’oublie point je te prie
J’ai écris à Mme Veyron hier je ne sais ce que
deviens Louise, quand tu verras Mme Blanc dis lui mille choses de ma
part, si je peus je lui ecrirai prochainement
2011.02.193 et enveloppe 2011.02.194 |
Samedi 3 mai 1845 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout, un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée. Écriture assez hâtive. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) VIENNE, 4 MAI (18)45; (verso) GRENOBLE, 5 MAI (18)45.
Vienne Samedi 3 Mai
J’ai reçu ta bonne lettre Chere sœur
dans le meilleur moment possible pour l’appréssier et la lire à mon aise,
étendue sur mon canapé dans mon joli salon déjà bien cîré et meublé à
faire plaisir à voir grace à mon activité et a l’aide de
ma bonne cousine, et de ma cuisinière nouvelle (dont je suis
enchanté jusqu’a présent) et d’Amedée
mon frotteur que j’avais amené
et qui m’a été d’une utilité immense, partis de chez moi le mercredi
matin avec eux, le même soir tout était en ordre J’ai pu
coucher dans le lit que je te destine rien ne manquait pas même les rideaux
tous mes cristaux et porcelaines
déballés et rangés, mon salon décoré en entier, rien de cassé comme
je le craignais, enfin brisée de fatigue, mais satisfaite j’étais tres
fiére le jour de la fête de faire ma toilette et d’aller à la messe de
St
Philippe, la cérémonie était superbe à St Moulin
la musique militaire, et religieuse m’a fait du bien au nerf.
[p. 2] il y avait un monde fou, des toilettes
fraiches et jolies à voir, le soir nous sommes allés au champ de Mars admirer
le feu d’artifice qui favorisé par le temps a été tres bien ; mon mari
était arrivé dans l’apres midi, émerveillé de trouver une maison
organisée et une femme habillée et l’attendant avec impatience pour recevoir
ses compliments.
J’ai apperçu ta belle sœur de loin Marc a rencontré hier
Mr Henri, ils se sont parlés mais froidement je ne sais s’il
viendront nous voir d’aprés les franches et conciliantes démarches dont je
la
sais un gré infini mais nous croyons devoir les attendre sans être ensuite
tres empressés à rendre leur visite ; de la fenêtre de ma cuisine j’apperçois
Jacques sur la terrasse qui fait son bonheur Mme Félicie pour cela seul
devrait se consoler de son appartement.
Je n’ai point entendu parler de Mme Casimir mon
mari était allé laisser une carte
chez le sien il l’a rencontré
ensuite et a été tres poli, comme devant, mais sa [p. 3]
femme pas de nouvelle. j’attendrai aussi d’autres relations
me dédommmagerons j’ai dêja reçu plusieurs avances tres aimables, Mr
Coutomier (Clemence) est venu me voir hier, et d’autres les Messieurs Guimer
sont charmants pour nous il parait que Mme Edouard nous a chaudement
recommandès à eux.
Je compte partir ce soir rejoindre mes enfans et finir mes
affaires Marc m’a devancé de quelques heures, mais je ne sais vraiment
comment je ferai le voyage ? figure toi ce nouveau guignon Chere sœur
quand je me croyais enfin au bout, ce matin en me reveillant j’ai sentis une
douleur tres forte audessous du genoux droit, j’ai cru que ce ne serait rien,
j’ai fait plusieurs courses pour acheter du bois et du charbon etc etc a
present ma douleur a augmenté affreusement je ne puis faîre un mouvement sans
gémir, et marcher sans une peine infinie en boitant beaucoup .... que faire la
voiture augmentera le mal peut être ? je ne puis comprendre la cause de ce
mal subit hier soir je n’avais rien, je ne me [p. 4] suis point
heurtée, la fatigue seule serait donc la cause, mais hier je n’ai rien fait
de pénible absolument. cela m’inquiète vraiment je ne sais si j’enverrais
chercher un medecin mais lequel ? Si Marc était ici encore cependant je
souffre beaucoup, depuis que je t’ecris bien que ma jambe soit étendue ;
elle est bien plus raide
je vois bien qu’il faut renoncer
a partir Marc sera en peine ;
il faut que j’ecrive un mot pour
le chemin de fer de ce soir ; adieu chere sœur c’est trop aussi de
tribulations je dois envoyer chercher le medecin la douleur devient trop vive il
y a enflure, et c’est le même genoux ou j’avais eu mal apres ma grande
maladie il y a troîs ans mais ce n’est pas la même place
Je ne fermerai ma lettre que quand j’aurai vu Mr
Boissat, le connaissant un peu je
le prefere à un autre ma cousine aidera à me soigner en attendant le retour de
Marc patience patience !......
Mon cousin et sa femme viennent de passer une heure avec moi
ils écriront à mon mari [p. 5] et feront parvenir la lettre,
figure toi Chere que ma cuisiniére a mal au pied et souffre horriblement de
sorte que tu peus comprendre comme c’est facile aujourd’hui de me soigner et
de faire mon ouvrage
J’avais donné rendez vous aujourd’hui
à plusieurs ouvriers pour des meubles à placer, allonger, et je ne puis faire
un pas sans d’atroces douleurs je suis étendue sur mon canapé d’ou je t’écris
pour me distraire et m’occuper : Mr Casimir a eu hîer une
soirée en l’honneur du pere Lacordaire, si il sait (comme je le crois)
que nous sommes ici je ne lui pardonnerai pas de ne nous avoir pas invité, moi
qui donnerait tout au monde pour voir de pres cet homme prodigieux !
manquer une occasion pareille c’est trop dur aussi ; il me semble que je
serais plus résignée à ma vexation de douleur si j’avais eu ce bonheur
hîer
pour compensation enfin...
Demain on nous attendait à St Chamond pour un grand dîner d’adieux
en notre honneur chez Mr Tomet
le fils [p. 6] il sera plus vexé que nous encore s’il est
possible.
Je n’ai pu encore avoir un medecin ma douleur ne diminue
point malgre une application de coton
énorme pour y ramener la chaleur, je me brule le sang de ne pouvoir bouger
ayant mille chôses à faire Je pleurerais de bon cœur, mais je vais éssayer d’être
tres calme pour la rareté du
fait ; demain mon mari reviendra me joindre une fois qu’il sera pres de
moi tout ira mieux. Je t’écrirai pour te donner de mes nouvelles, et t’envoyer
la soie que je n’ai pas ici si
toute fois je puis retourner à St Chamond aussi tôt que je voudrais ?
Je n’ôse plus faîre un projet tellement tous tourne contre moi, sans ce mal
de genoux les chôses seraient bien maintenant, comme toi je croyais être à la
fin de mes peines mais je commence une longue série à ce qu’il paraît adieu
Chere sœur la chambre est prête à te recevoir je fais mille projets pour qu’en
tu viendras adieu tous [dans
la marge de droite, de bas en haut] l’histoire des 30,000 tt
à St Etienne promis au pere Lacordaire est un conte ? [dans la
marge de gauche, de haut en bas] mille chôses à Mathilde et à Camille
toute à toi AS
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
rue neuve
Grenoble
2011.02.195 et enveloppe 2011.02.196 |
Mercredi 20 août 1845 | À sa sœur Nancy Berlioz-Pal | Texte corrigé | — |
Six pages en tout, un feuillet de quatre pages plus une feuille séparée. Écriture souvent négligée. Timbres postaux sur l’enveloppe: (recto) VIENNE, 20 (AOUT) (année effacée); (verso) VOREPPE, 21 AOUT (18)45.
Vienne Mercredi matin
J’ai promis à mon pere de te donner de
ses nouvelles à mon arrivée ici Chere Sœur, et je m’empresse de te dîre que
je l’ai laissé bien tres bien ;
Ta lettre m’avait extremement effrayée ton
voyage précipité à la Côte me faisait craindre que notre bon pere ne fut
serieusement indisposé malgré ce que tu me disais pour me rassurer j’eprouvai
le besoin d’aller voir ce qu’il en était, esperant encore te trouver à la
Côte dimanche ; je partis samedi soir pour Beaurepaire avec Marc et
Joséphine, nous y couchâmes et le lendemain matin apres avoir lu la messe
Louise me fit conduire par sa voiture ; j’arrivai à onze heures et tu
étais partis à huit, n’ayant pas reçu ma lettre que j’avais cependant
mise à la poste Vendredi, et qui arrivat apres moi à la Côte à mon grand
regret parce que peut être aurais eu
retardé ton depart jusqu’au lendemain c’était une contrariété
à ajouter à tant d’autres !... mon pere parut [p. 2] bien
heureux de me voir, dans son premier moment de surprise avec sa mauvaise vue il
me prit pour toi, et me demandat comment je revenais !...
Nous dinâmes de bon appetit ensemble il prit du bouillon
gras et un morceau de viande même ce qui me surprit et me fit plaisir
Je parlai jusqu’a extinction tu connais cela Chere Sœur ;
puis il fut se promener en voiture jusqu’a la mie
plaine pour voir la ferme de Mr Blanchet
dont il revint enthousiasmé et humilié
dans son orgueil d’agriculteur modèle.
Pendant sa course je vis les dames Pion et Thomas, Louise
arrivait de Tournon le soir même je la vis en passant, et promis d’aller le
lendemain passer deux heures à Pointiere ce que j’ai fais
de mon pied mignon Mon pere m’accompagnat à huit heures du matin jusqu’a
Tournon ;
puis à Midi Mme Veyron me fit reconduire en voiture, je ne voulus
point laisser diner mon pere seul ayant si peu de temps à lui donner Marc vint
de Beaurepaire dans [p. 3] l’apres midi, et nous voulions repartir
le soir par la dîligence à neuf heures mais nous trouvames place dans aucune
des trois, ce qui fut une immense
contrariété pour nous, j’etais exasperée de voir toujours les chôses aller de
travers je grogné outre mesure, il fallut prendre la voiture d’Antoine
coute que coute à trois heures du matin, nous sommes arrivés ici hier
à dix par un vent horrible qui achevait de m’abimer apres la nuit que j’avais
passé...
Voila Chere sœur encore un épisode à ajouter à tant d’autres
du même genre J’ai l’imagination si noircîe que je ne peux plus prévoir
que chôses tristes en tout point Mon mari est de nouveau tres souffrant de sa
tête cela m’inquiéte sérieusement en se prolongeant ainsi, mon pere qu’il
a consulté m’a effrayé sans le vouloir certainement, mais ma pauvre tête
travaille joliment depuis, Marc croit qu’une fatigue d’Estomac est cause de
ses douleurs de tête, il redoute une gastrite [p. 4] j’espere qu’il
se trompe et ques les conseils que mon pere lui a donné feront un bon éffet,
mais quand je le vois triste et souffrant je perds la raison Chere sœur, hier
soir j’etais folle d’inquietude ce matin je me remonte une bonne nuit l’a
remis aussi de la fatigue du voyage mais je crains bien chere sœur que mon
projet de voyage à la Cote pour l’automne ne soit subordonné à bien des
chôses, j’ai bien fait d’y aller en courant embrasser notre bon pere ;
peut être des épreuves bien poignantes me sont-elles encore réservées ?
malgré le tribut que j’ai payé si largement depuis plusieurs mois entre Marc
et Josephine je ne puis avoir deux jours de repos, tous deux sont sous le coup
d’une indisposition qui en se prolongeant m’inquiéte et me désole ; Mme
Pion m’a dis que tu avais trouvé Marc tres maigri et tres
changé, il avait repris cependant et allait bien pendant que tu étais ici ;
en entendant cela j’ai recu un
coup au cœur, tout m’impressionne et me frappe, un mot, un rien un
rapprochement, je parle peu ou pas cependant de ma préoccupation, il me semble
[dans la marge de gauche, de haut en bas] Mes compliments à Mme
Pochin elle te préserve d’autres malheurs apprécies la
bien [p. 5] que c’est
donner un corps à mon inquiétude mais je n’ai jamais l’esprit tranquille J’envie
bien fort le calme à toute épreuve de ta belle sœur Félicie. elle est
revenue ici avec son mari Lundi dernier, il va mieux toujours mais s’est mis
dans la tête d’aller consulter
à Paris et passer l’automne Sa femme a ecrit à Mr Blanchet
comme tu le sais peut être ? pour avoir des informations sur un medecin et
d’apres sa réponse ils partiront du soir au lendemain ; Mr
Golety a du passer hier à Lyon
allant à la Côte et amenant Jacques à sa mère en conséquence elle est
repartis hier pour le chercher Mr Henri a voulu y aller aussi ils doivent
revenir ce soir, mais avec un homme malade et inquiet sait-on jamais ce qu’on
fera positivement
J’allais oublier de te parler d’une chôse cependant
essentielle
Monique a eté prise dans la nuit du Lundi au mardi d’un
coup de sang sur les jambes, au moment de notre départ elle avait eu toutes les
peines du monde à se lever et me disait que souvent deja elle avait eprouvé
des accident de ce genre [p. 6] mais jamais de cette violence ;
elle ne pouvait faire un pas sans un appui Si mon pere avait eu besoin dans la
nuit de quelques choses jamais elle n’aurait pu monter, penses donc ma chere
combien il est imprudent de les laisser ainsi coucher seuls dans cette immense
maison !.. il faudrait impérieusement que mon pere prit une seconde
domestique Monique le demande à corps et a cris et je comprends cela si elle le
sent prédisposée souvent à de pareils accidents, j’etais tres ennuiée de
partir la laissant ainsi, je voulais
aller chercher quelqu’un elle ne voulut pas absolument, et me dit que cela
passerait comme d’autres fois .....
J’avais été tres vexée aussi Chere sœur de
ma franchise au sujet de ta fille
je n’y attachais pas d’importance en écrivant à mon pere, mais te faire de
la peine était si loin de ma pensée ! je pouvais si peu me douter que tu
lirais ma lettre ! enfin j’ai été désesperée autant que possible de
ce qui est arrivé, mais j’aurais parlé de mes enfants de même tu peus bien
le croire Chere sœur, je vois ta fille avec des yeux de mère en bien comme en mal tu fais cela depuis long-temps et tu dois me pardonner et me comprendre, le
papier me manque pour continuer, j’aurais encore a dire adieu adieu [dans
la marge de gauche, de haut en bas] Nous avons ramené Angèle avec nous
pour quelques jours
[enveloppe]
Madame
Madame Camille Pal
Voreppe
pres Grenoble
Isere
Site Hector Berlioz créé par Michel Austin et Monir Tayeb le 18 juillet 1997; pages Lettres de la famille du compositeur créées le 11 décembre 2014, mises à jour le 1er avril 2015.
© Musée Hector-Berlioz pour le texte et les images des
lettres
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