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Hector Berlioz: Feuilletons

NOTICES DANS LE JOURNAL DES DÉBATS

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    Les notices sont présentées ci-dessous en ordre chronologique; elles sont soit signées par Berlioz lui-même, soit anonymes, mais dans quelques cas les notices non signées ont été écrites ou suggérées à la rédaction du journal par le compositeur.

28 novembre 1840
8 février 1843
27 novembre 1852
27 octobre 1853
13 décembre 1853
6 avril 1859
10 octobre 1859
20 novembre 1859
22 octobre 1861
16 novembre 1861

  28 novembre 1840 (p. 2)

    — M. Berlioz nous prie d’insérer la lettre suivante qu’il a adressée à la Revue des Deux-Mondes :

        « Monsieur,

    » Dans le compte rendu par la Revue des Deux-Mondes du festival que j’ai dirigé à l’Opéra on a commis des erreurs de faits dont je crois pouvoir vous demander la rectification.

    » L’auteur de cet article veut me rendre coupable du crime de lèse-majesté à l’égard de Gluck et de Palestrina : « Pauvre Gluck dit-il, vous ne vous doutiez pas, lorsqu’au son des trombonnes vous évoquiez jadis les esprits de haine et de rage, qu’un jour viendrait où M. Berlioz vous ferait l’aumône de quelques ophicléides ; et Palestrina qu’on arrache à la chapelle Sixtine, où quelques soprani suffisent à ses mélodies fuguées, pour l’écraser lui, le maestro paisible, à l’inspiration suave et religieuse, sous la pompe des voix et des instrumens. »

    » Or, l’acte d’Iphigénie a été exécuté absolument tel que l’auteur l’écrivit ; on n’y a donc point entendu d’ophicléides. Quant à Palestrina, quelques soprani lui suffisaient si peu que son madrigal Alla riva del Tebro, morceau profane du reste, et qui n’a jamais pu être entendu à la chapelle Sixtine, est à quatre parties (soprani, contralti, ténors et basses) ; il a fallu en outre une étrange préoccupation pour trouver écrasé sous la pompe instrumentale ce chœur chanté, d’après le texte du compositeur, sans accompagnement.

    » Voilà les erreurs qui devaient me blesser dans mon rôle d’interprète de maîtres que j’admire, et les seules qu’il m’importe de relever.

    » Recevez, etc.                         H. BERLIOZ. »

  8 février 1843 (p. 3)

    — On écrit de Weimar (Saxe) :
    « La musique de M. Berlioz fait ici la plus grande sensation. Tout le monde a été frappé de la hardiesse et de l’originalité des conceptions de ce grand artiste. Les morceaux intitulés : Scène à la Campagne et la Marche au Supplice on excité surtout d’unanimes transports. Ces deux compositions sont tout-à-fait hors de ligne et telles que l’art en voit naître rarement.
    » Après le concert, M. Berlioz a été rappelé par le public et couvert d’applaudissements. Mme la grande-duchesse a voulu témoigner au compositeur français sa satisfaction, en lui envoyant une belle tabatière d’or. »

Voir Weimar

  27 novembre 1852 (p. 2)

    On nous écrit de Weimar, le 23 novembre :
    « Notre cour, qui continue avec une si admirable persévérance les nobles et grandes traditions qui l’ont illustrée, vient de donner ces jours-ci plusieurs fêtes musicales à l’occasion de la représentation de l’opéra de M. Berlioz, Benvenuto Cellini. Le succès en a été aussi grand que M. Berlioz lui-même ait pu jamais le désirer. Benvenuto Cellini, monté par les soins de son ami Listz [sic], avec un goût et une intelligence qu’on ne saurait trop louer, et qui prouvent un amour passionné de l’art, a été joué deux fois sur le théâtre de la cour, mercredi et lundi derniers, au milieu des applaudissemens les plus enthousiastes. Les deux fois la salle était comble, car il nous était venu une multitude de spectateurs de toutes les villes environnantes : d’Iéna, de Brunswick, de Hanovre, de Leipsick, etc., etc. Le triomphe de M. Berlioz a été complet ; à la première représentation il a été rappelé après le troisième acte avec tant d’insistance, que l’intendant du théâtre est venu le prier de paraître pour en finir avec l’opiniâtreté du public. La seconde représentation, dirigée comme la première, par Listz, en sa qualité de maître de chapelle, n’a pas été moins brillante et moins chaleureuse.
    » Samedi nous avons eu, sous la direction de M. Berlioz en personne, un concert qui a confirmé l’éclatant succès de Benvenuto Cellini. Le programme se composait de sa symphonie de Roméo et Juliette complète et des deux premiers actes de son Faust. C’était beaucoup peut-être pour un concert ordinaire, mais, en dépit de l’heure avancée, on a cependant fait répéter un très grand nombre de morceaux. M. Berlioz devra conserver le plus vif souvenir de cette soirée, où tous les témoignages imaginables d’admiration et de sympathie lui ont été prodigués. L’Académie de chant de Weimar avait, pour la première fois, consenti à se joindre aux artistes du théâtre pour exécuter les chœurs. La plupart des dames amateurs, douées de belles voix et de quelque savoir en musique, s’y trouvaient, et l’exécution, témoignage du soin avec lequel elles avaient assisté à de longues répétitions, a dû satisfaire l’auteur. A la fin du concert, le grand-duc et la grande-duchesse l’ont fait appeler dans leur loge, et après l’avoir complimenté de la manière la plus gracieuse, le grand-duc lui a fait remettre son Ordre du Faucon-Blanc. Le lendemain il a dîné à la cour ; le ministre de France, M. de Talleyrand, assistait à ce dîner, et il a remercié le grand-duc de la bonté avec laquelle il avait accueilli son illustre compatriote.
    » Enfin, hier lundi, les artistes du théâtre, ainsi qu’un grand nombre d’amateurs et d’étrangers se sont réunis pour donner à la maison de Ville même, au Stadt-Hausen, un grand dîner à M. Berlioz. Le banquet a été splendide et suivi d’un bal. Plusieurs toasts ont été portés en allemand et en français. Au dernier, les artistes de la chapelle ducale ont offert au héros de la fête un bâton de chef d’orchestre en argent et à trois heures du matin, au moment de monter en wagon pour retourner à Paris, M. Berlioz les a retrouvés à l’embarcadère où ils étaient réunis pour le saluer encore une fois de leurs sympathiques hourrahs. »

Voir Weimar et CG no. 1537

  27 octobre 1853 (p. 2)

    — On écrit de Brunswick (Allemagne), le 27 octobre :
    « On vient de donner dans notre capitale un concert, sous la direction de M. Hector Berlioz, au bénéfice du fonds des pensions de la chapelle-musique de la cour.
    » Au commencement de ce concert qui avait attiré un public très nombreux, M. George Muller, maître de chapelle, a offert à M. Berlioz un bâton en argent pour marquer la mesure. Après le concert, les membres de la chapelle-musique ont décidé à l’unanimité que leur fonds des pensions serait dorénavant appelé fonds Berlioz. »

Voir Brunswick et CG no. 1657

  13 décembre 1853 (p. 2)

    — On lit dans la Revue et Gazette musicale :
    « M. Berlioz touche au terme de son voyage musical en Allemagne. A Hanovre, il a donné deux concerts qui ont excité dans le public et parmi les artistes un enthousiasme plus vif encore que ceux de Brunswick. Le roi a prodigué à l’artiste les témoignages de sa haute sympathie. S. M. assistait à toutes les répétitions et les interrompait souvent pour adresser au compositeur les choses les plus flatteuses. A la dernière, les artistes ont couvert ses partitions de couronnes, et au dernier concert ils l’ont rappelé et salué par des fanfares. Le roi lui a envoyé un très beau cadeau en diamans. A Brême, M. Berlioz était engagé par la Société des concerts ; il a été l’objet des mêmes acclamations qu’à Hanovre.
    » Le jeune violoniste Joachim a joué l’alto-solo de la symphone d’Harold d’une façon merveilleuse. A Leipsick, M. Berlioz était engagé, comme à Brême, par la Société du Gewandhaus : le concert se composait entièrement de ses ouvrages, sauf une symphonie de Beethoven. Le grand succès a été pour son oratorio de la Fuite en Égypte ; M. Ferdinand David, le Concert-Meister du Gewandhaus, a joué supérieurement l’alto-solo d’Harold ; les chanteurs Beer et Schneider ont très bien dit les solos du chœur des sylphes de la Fuite en Égypte. Une députation d’artistes et de gens de lettres était venue de Weimar avec M. Liszt, et reviendra pour le concert que M. Berlioz va donner pour son propre compte dans la même salle avec le même orchestre, la grande Académie de chant, les élèves du Conservatoire et les enfans du chœur de l’église de Saint-Thomas. Le programme se composera des quatre premières parties de Roméo et Juliette, des deux premiers actes de Faust et de l’oratorio de la Fuite en Égypte, redemandé unanimement. M. Liszt a joué, dans une grande soirée chez M. Ferdinand David, avec un effet immense, une nouvelle transcription, qu’il vient de faire pour le piano, de deux morceaux de Benvenuto Cellini, la bénédiction du cardinal et le serment des ciseleurs. »

Voir Hanovre et Leipzig

  6 avril 1859 (p. 2)

    Le nouvel ouvrage de M. Meyerbeer [le Pardon de Ploërmel] a obtenu hier, à l’Opéra-Comique, un de ces succès éclatans, triomphans, dont l’histoire de l’art n’offre que de bien rares exemptes. Du commencement à la fin de la soirée, l’auditoire a manifesté son enthousiasme, et à la chute du rideau les acclamations ont pris un tel caractère que, malgré la réserve dans laquelle il s’est toujours tenu en pareil cas, l’illustre maître s’est vu forcé de paraître sur la scène. Le compositeur et ses habiles interprètes n’ont pas seuls contribué à l’éclat de cette représentation : le public a dû applaudir aussi une belle mise en scène et des effets de décors d’une grande et saisissante nouveauté. L’apparition du Pardon de Ploërmel est un événement.

H. BERLIOZ.

Voir Débats 10 avril 1859

  10 octobre 1859 (p. 3)

    Le bruit de la réduction en trois actes de l’opéra de Roméo et Juliette [de Gounod] était dernièrement encore fort répandu dans le monde musical. Le fait de l’adjonction d’un ballet à la représentation de cet ouvrage semblait de nature à l’accréditer. C’est une erreur que je regrette d’avoir partagée avec beaucoup d’autres. La pièce n’a pas cessé d’être représentée en quatre actes.

H. BERLIOZ.

  20 novembre 1859 (p. 2)

    L’Orphée, de Gluck, a obtenu hier au Théâtre-Lyrique un éclatant succès. L’exécution musicale en général en est très belle, la mise en scène fait un grand honneur au talent et au sentiment poétique de M. Carvalho. Mme Viardot, admirable dans le rôle d’Orphée, a fait naître les émotions les plus nobles et les plus vives parmi l’intelligent public accouru pour l’entendre et qui l’a rappelée quatre fois avec enthousiasme. Ce triomphe d’un chef-d’œuvre si éloigné par son style des habitudes musicales de notre temps est un véritable événement.

H. BERLIOZ.

Voir Débats 22 novembre 1859

  22 octobre 1861 (p. 2)

    Notre collaborateur et ami, M. Joseph d’Ortigue, se dispose à faire paraître à la librairie académique de MM. Didier et Ce un volume intitulé la Musique à l’église. L’éditeur veut bien nous communiquer la préface de ce livre, et nous croyons faire plaisir à nos lecteurs en en extrayant les passages suivans. Ils y trouveront cette élévation de vues, cette foi dans l’art, ces idées religieuses et philosophiques qu’ils sont accoutumés à rencontrer dans les articles de notre ami, même dans ceux qu’il a écrits sur l’art profane. C’est là le seul éloge que nous ferons de notre collaborateur. Laissons-le parler. Personne ne peut mieux exposer la pensée et le plan de son ouvrage.

H. BERLIOZ.

  16 novembre 1861 (p. 2-3)

    M. Berlioz nous communique la lettre suivante que vient de lui adresser M. E. Legouvé: [NL p. 572-4, no. 2580ante-antebis]

    « Mon cher Berlioz,

    » Il faut que je vous fasse une querelle, une vraie querelle, et tout haut, et en public. Comment un homme d’un esprit comme le vôtre, un homme à qui Dieu, par une injustice criante, a donné autant de talent comme écrivain que s’il ne lui avait pas donné du génie comme musicien, peut-il railler cet illustre mort qui a été pendant quarante ans un des enchantemens du monde, et qui a ouvert un champ nouveau et immense à cet art même que vous adorez et que vous honorez? Vous voyez que je veux parler de Scribe et de la citation que vous avez faite avant-hier d’un des vers des Huguenots.
    » Je sais aussi bien que personne tout ce que Scribe, dans son impatience d’aller plus vite au but, et dans sa préoccupation constante [p. 3] de l’effet théâtral, se permettait de négligences, de sous-entendus, d’ellipses, de tout ce que j’appelais enfin en riant son style économique; je sais surtout, pour en avoir été témoin, tout ce que la tyrannie des musiciens lui imposait d’irrégularités de langage, contre lesquelles son bon sens se révoltait, mais qu’il subissait pourtant, car une fois que vous tenez une mélodie, un accent, une note, messieurs les compositeurs, vous en êtes si épris et vous êtes si insupportables, qu’il faut que tout cède pour qu’elle soit conservée; mais je sais aussi que s’il a consenti souvent à être pour vous incolore, inexact, insignifiant, il n’a jamais consenti à être bête. Aussi, quand j’ai lu avant-hier dans votre feuilleton ce vers de Valentine, que vous citiez de mémoire, ce qui explique l’infidélité,

    Ses jours sont menacés. Ah! je dois l’y soustraire

    je me suis écrié: Je suis sûr que cela n’y est pas! J’ai pris le volume et voici ce que j’ai lu:

    Je viens d’entendre, hélas! ce complot odieux,
    Ses jours sont menacés. Ah je dois l’y soustraire

    » Que cette phrase ne soit pas correcte, Qu’on trouve trop de distance entre le mot complot et le mot y qui le rappelle, soit; mais il y a un abîme entre cette incorrection et l’énorme bêtise que votre article prête à Scribe.
    » Je ne vous demande pas pardon, mon cher ami, de vous parler si vivement, car vous savez bien que je courrais de même à votre défense si je vous voyais attaquer injustement, attendu que je vous aime autant que je vous admire. Je désire la publicité de cette rectification; c’est un peu dur pour vous d’être obligé de faire imprimer vous-même tant d’éloges à votre endroit, mais ce sera votre punition pour avoir péché envers les sentimens qui sont l’objet de notre culte commun: l’admiration pour tout ce qui fut supérieur, la sympathie pour tout ce qui fut charmant, et le respect pour tout ce qui n’est plus.

    » A vous de cœur,
       » ERNEST LEGOUVÉ. »

    Voici la réponse de M. Berlioz: [NL p. 574, no. 2580antebis]

    « Mon cher Legouvé,

    » Vous me reprochez d’avoir été injuste pour Scribe; je pourrais vous reprocher de l’être un peu pour Meyerbeer en attribuant les incorrections de style de son poëte aux exigences souvent intolérables qu’il lui a fait subir. Il ne peut, dans le passage en question, avoir exigé de Scribe ni changemens ni remaniemens, puisqu’il s’agit là d’un récitatif et non point d’une mélodie proprement dite, dont la forme eût pu ne pas cadrer avec celle du vers. En tout cas, votre réclamation est une nouvelle preuve de votre cordialité pour vos amis. Je voudrais presque être mort et accusé de quelque énormité musicale pour être défendu par vous aussi chaleureusement.
    » Mille amitiés dévouées.

       » HECTOR BERLIOZ. »

    Voir Débats 12 novembre 1861

Site Hector Berlioz créé le 18 juillet 1997 par Michel Austin et Monir Tayeb; page Hector Berlioz: Feuilletons créée le 1er mars 2009; cette page ajoutée le 15 octobre 2011, mise à jour le 1er et le 8 mars 2016, et le 1er septembre 2023.

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